Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
le code de l'urbanisme ;
le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...'hirondel,
- les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,
- et les observations de MeE..., représentant les communes du Mans et d'Yvré l'Evêque et de MeB..., représentant la SAS Direct Distribution.
Une note en délibéré présentée par les communes du Mans et d'Yvré l'Evêque a été enregistrée le 3 janvier 2019.
Une note en délibéré présentée par la SAS Direct Distribution a été enregistrée le 4 janvier 2019.
Considérant ce qui suit :
1. Mme G...demande à la cour d'annuler l'arrêté du 9 mai 2017 par lequel les maires des communes du Mans et d'Yvré-L'Evêque ont délivré à la SAS Direct Distribution un permis de construire un immeuble à usage commercial (lot n°1), d'une surface de plancher créée de 60 539 m², sur un terrain situé route de l'Eventail au Mans et avenue du Mans à Yvré-L'Evêque. En cours d'instance, a été produit le permis de construire modificatif que les mêmes autorités ont délivré, le 23 août 2018, à la SAS Direct Distribution qui a pour objet d'apporter une correction à la superficie du terrain, d'apporter des précisions sur l'état initial du site, l'insertion du projet dans son environnement, le calcul des aires de stationnement et la conformité aux règles d'urbanisme à l'échelle du lotissement ainsi que d'apporter des modifications quant au nombre d'arbres à planter et à leur localisation.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial.
3. Les maires des communes du Mans et d'Yvré-L'Evêque ont délivré, le 23 août 2018, à la SAS Direct Distribution un permis de construire modificatif qui a été communiqué à la requérante afin qu'elle puisse présenter ses observations. Ce permis a été accordé au vu d'un nouveau formulaire " Cerfa " afin de rectifier l'erreur contenue dans le même formulaire présenté à l'appui de la demande de permis de construire initial quant à la superficie exacte des terrains d'emprise du projet et d'une notice explicative des modifications. Cette notice était, en particulier, destinée à apporter des précisions sur l'insertion du projet dans son environnement et des modifications sur le nombre d'arbres à planter sur les aires de stationnement. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de la notice architecturale en tant qu'elle porte sur l'insertion du projet dans son environnement et de la méconnaissance des dispositions de l'article 1AUdc 13.6 des règlements des plans locaux d'urbanisme des communes du Mans et d'Yvré-l'Evêque concernant le nombre d'arbres à planter en fonction des places de stationnement créées ne peuvent plus être utilement invoqués dans le présent litige.
4. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
5. En premier lieu, l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme prévoit que le projet architectural contenu dans la demande de permis de construire comprend une notice précisant notamment le traitement des clôtures, et l'article R. 431-9 du même code qu'il comprend aussi un plan de masse des constructions sur lequel doivent apparaître les plantations maintenues, supprimées ou créées.
6. D'une part, et contrairement aux allégations de MmeG..., la notice architecturale précise bien, en page 21, le traitement des clôtures qui seront à panneaux à mailles verticales en treillis soudé doublés d'une haie végétalisée pour les cours de livraison et parkings personnel. D'autre part, la demande de permis de construire comprenait une étude de sûreté et de sécurité publique qui décrivait le site actuel comme formé de parcelles composées " pour la plupart de prairies enherbées, de friches herbacées et localement boisées ", assortie de documents photographiques et de vues aériennes. Etait également joint un plan de masse " Toiture - paysagement " sur lequel apparaissaient les plantations maintenues ou créées. Dans ces conditions, la circonstance que l'état des plantations maintenues, supprimées ou créées n'apparaisse pas sur un même plan de masse n'a pas empêché le service instructeur d'apprécier l'évolution paysagère induite par le projet. Le moyen tiré de la méconnaissance des articles R. 431-8 et R.431-9 du code de l'urbanisme ne peut qu'être écarté.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de l'article 39 de la loi du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial (...) ". En vertu des termes mêmes de l'article 6 du décret du 12 février 2015 relatif à l'aménagement commercial, ces dispositions sont entrées en vigueur le 15 février 2015.
8. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'un projet soumis à autorisation d'exploitation commerciale en vertu des dispositions de l'article L. 752-1 du code de commerce doit également faire l'objet d'un permis de construire, ce permis tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale dès lors que la demande de permis a donné lieu à un avis de la commission départementale d'aménagement commercial et que le permis a été délivré après le 14 février 2015. Ce permis peut ainsi faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif, en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale. Il en va toutefois différemment lorsque le projet a fait l'objet d'une décision de la Commission nationale d'aménagement commercial avant le 15 février 2015 et d'un permis de construire délivré, au vu de cette décision, après le 14 février 2015. Dans ce cas, seule la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial est susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir en tant qu'acte valant autorisation d'exploitation commerciale. En effet, l'autorisation d'exploitation commerciale ayant déjà été accordée, le permis de construire ne peut alors faire l'objet d'un recours qu'en tant qu'il vaut autorisation de construire.
9. Il ressort des pièces du dossier que la Commission nationale d'aménagement commercial a accordé le 16 janvier 2015 aux sociétés " Direct Distribution ", " Sicom2 ", " Groupe Herimo " et " If Béner ", l'autorisation préalable requise en vue de procéder à la création d'un ensemble commercial, d'une surface totale de vente de 47 475 m², sur le territoire des communes du Mans et d'Yvré-L'Evêque dont il est constant qu'elle portait notamment sur le projet en litige. Dans ces conditions, et eu égard à ce qui a été dit aux points 7 et 8, le permis de construire en litige, qui a été délivré le 9 mai 2017 par les maires des communes du Mans et d'Yvré-l'Evêque, ne peut pas être contesté en tant qu'acte valant autorisation d'exploitation commerciale, dès lors que cette autorisation a été délivrée par la Commission nationale d'aménagement commercial avant le 15 février 2015. Par suite, le projet ne nécessitant pas un nouvel examen au titre de l'exploitation commerciale, la société était dispensée de devoir l'assortir à nouveau, lors du dépôt de sa demande de permis de construire, d'un dossier d'autorisation d'exploitation commerciale selon ce qu'exigent les dispositions de l'article R. 431-33-1 du code de l'urbanisme.
10. En troisième lieu, le point 4.2.3 de l'article 1AU 4 des règlements des plans locaux d'urbanisme des communes du Mans et d'Yvré-L'Evêque relatif aux eaux pluviales prévoit : " Sous réserve des autorisations réglementaires éventuellement nécessaires, et conformément au règlement d'assainissement, l'aménageur pourra être tenu de réaliser sur son terrain des dispositifs appropriés pour la collecte, la régulation, et en tant que de besoin le traitement des eaux pluviales avant infiltration ou rejet vers un exutoire désigné à cet effet par le gestionnaire du réseau ou du fossé "."
11. Il ressort des pièces du dossier qu'à l'appui de la demande de permis de construire a été présentée une notice hydraulique réalisée le 5 décembre 2016 par la société Socotec sur les modalités de gestion des eaux pluviales pour le terrain d'assiette du projet composant le lot n°1 de la zone d'activité de Béner. Si, à la date à laquelle cette notice a été réalisée, le choix définitif du type et des caractéristiques de l'ouvrage n'avait pas été arrêté, trois types de rétention, qui selon l'étude, sont " à équivalence de garantie, de fiabilité, pérennité et d'étanchéité " avaient néanmoins d'ores et déjà été retenus. En outre, par un arrêté du 25 octobre 2016, la préfète de la Sarthe a accordé au titre de la loi sur l'eau à la SNC Bénermans, en sa qualité d'aménageur de la zone d'activité de Béner, une autorisation pour rejeter les eaux pluviales collectées sur le site ou issues du bassin versant amont et interceptées par le projet, dans la rivière l'Huisne via les réseaux d'eaux pluviales appartenant à la communauté urbaine Le Mans Métropole selon un plan d'ensemble joint en annexe de l'arrêté. Par suite, Mme G...n'est pas fondée à soutenir que le permis de construire contesté a été délivré en méconnaissance des dispositions de l'article 1AU 4 des règlements des plans locaux d'urbanisme des communes du Mans et d'Yvré-L'Evêque au motif que les services instructeurs n'ont pas été mis à même de s'assurer de la collecte et l'évacuation des eaux pluviales du projet de construction et que le dossier ne permet pas de s'assurer que le pétitionnaire dispose d'un accord pour rejeter les eaux pluviales dans les réseaux publics.
12. En quatrième lieu, aux termes de l'article 1AUdc 6 des règlements des plans locaux d'urbanisme des communes du Mans et d'Yvré-L'Evêque relatif à l'implantation des constructions par rapport aux voies publiques ou privées et emprises publiques : " Les constructions peuvent s'implanter à l'alignement. En cas de retrait, elles doivent s'implanter à 3 mètres minimum de l'alignement ou de la limite qui s'y substitue. Un retrait minimal de 35 mètres doit être observé par rapport à l'axe de la RD 313 sous réserve de la prise en compte des dispositions d'aménagement indiquée dans la note de dérogation aux dispositions de l'article L. 111-1-4 du code de l'urbanisme (pièce no 4.4) ".
13. Le bâtiment projeté doit, notamment, être édifié au surplomb de la voie interne reliant le rond-point n°3 au rond-point n°4, qui doit être réalisée dans le cadre d'une opération de lotissement. Si l'article 1AUdc 6 prévoit que les constructions peuvent s'implanter à l'alignement ou en retrait des voies publiques ou privées, il n'a pas pour effet d'interdire la construction en surplomb d'une voie interne telle que celle reliant ces deux ronds-points. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 1AU 6 ne peut qu'être écarté.
14. En cinquième lieu, l'article 1AU 11 des règlements des plans locaux d'urbanisme des communes du Mans et d'Yvré-L'Evêque relatif à l'aspect extérieur des constructions et à l'aménagement de leurs abords prévoit : " Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ".
15. Il résulte de ces dispositions que si les constructions projetées portent atteinte aux paysages urbains et naturels environnants, l'autorité administrative compétente doit refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage urbain ou naturel de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site urbain ou naturel sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.
16. Il ressort des pièces du dossier, notamment de la notice architecturale, du volet paysager et de l'étude de sûreté et de sécurité publique, que le projet en litige s'inscrira dans l'opération d'aménagement d'un site commercial situé sur un terrain d'environ 34 hectares. Le terrain d'assiette du projet, qui est situé au nord du périmètre de l'opération commerciale, est borné, au sud, par des zones en friches qui occupent le territoire jusqu'en limite de l'avenue du Mans, à l'est, par la rocade Est et le sentier d'accès qui la longe pour l'entretien des talus, au nord, par des terrains plus abrupts qui s'inscrivent dans un coteau herbeux et à l'ouest, par des parcelles enherbées et quelques habitations pavillonnaires. Plus au centre de ce terrain d'assiette, une parcelle est occupée par une habitation, desservie par le chemin des Perrières. Le bâtiment projeté sera, quant à lui, composé, pour les façades, de bardages en cassettes aluminium laqué de teinte gris clair métallisé avec des auvents de même finition, un mur rideau en vitrage clair et des soubassements en parement bois, teinte acajou et, pour les volumes en saillie sous auvent, par des parements en panneaux béton présentant un aspect pierre naturelle. Le projet prévoit de mettre à profit la topographie du site, qui est pentue dans sa partie haute, pour insérer la volumétrie de la construction dans le terrain afin de réduire sensiblement l'émergence des bâtiments en regard du profil de la rocade Est et soustraire une partie importante du volume aux vues riveraines. Le projet sera séparé de la rocade sud par un espace paysagé qui épouse la déclivité du site atténuant l'aspect homogène des façades. Sur le coteau Nord, en accompagnement de la route de l'Eventail, seront recomposés des bosquets et haies champêtres constitués d'essences forestières (Charme, chêne, noisetier, pin sylvestre), de nature à réduire l'impact des façades pour les inscrire dans l'échelle des bâtiments environnants. Des plantations sont prévues pour renforcer celles existantes afin de préserver l'habitation existante sur le site des vues sur le projet. Dans ces conditions, en raison de l'intérêt peu marqué des lieux avoisinants alors que la requérante n'apporte aucun élément de nature à démontrer que le projet autorisé porterait atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, et compte tenu du parti architectural retenu, les maires du Mans et d'Yvré-L'Evêque n'ont pas méconnu les dispositions de l'article 1AU 11 en délivrant le permis de construire contesté.
17. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non recevoir opposée par les communes du Mans et d'Yvré-l'Evêque, que la requête présentée par Mme G... ne peut qu'être rejetée.
Sur les frais liés au litige :
18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de Mme G...les sommes que les communes du Mans et d'Yvré-l'Evêque et la SAS Direct Distribution demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. Les dispositions du même article font par ailleurs obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par Mme G...soit mise à la charge des communes du Mans et d'Yvré-L'Evêque, qui n'ont pas la qualité de partie perdante dans la présente instance
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme G...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions des communes du Mans et d'Yvré-l'Evêque et de la SAS Direct Distribution tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...G..., à la SAS Direct Distribution, à la commune du Mans, à la commune d'Yvré-L'Evêque et au ministre de l'économie et des finances.
Copie en sera adressée pour son information au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 2 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président,
- Mme Brisson, président-assesseur,
- M. A...'hirondel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 janvier 2019.
Le rapporteur,
M. H...Le président,
A. PEREZ
Le greffier,
A. BRISSET
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°17NT02092