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18/05/2017 | FRANCE | N°17NT00720

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 18 mai 2017, 17NT00720


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2017 du préfet de la Sarthe l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant son pays de renvoi, lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée d'un an et l'informant qu'il fera l'objet d'un signalement aux fins de non admission dans le système d'information Schengen pour la durée de l'interdiction de retour, d'une part, et l'arrêté du même jour l'assignant à résidence, d'aut

re part.

Par un jugement n° 1700748 du 26 janvier 2017, le magistrat désigné ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2017 du préfet de la Sarthe l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant son pays de renvoi, lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée d'un an et l'informant qu'il fera l'objet d'un signalement aux fins de non admission dans le système d'information Schengen pour la durée de l'interdiction de retour, d'une part, et l'arrêté du même jour l'assignant à résidence, d'autre part.

Par un jugement n° 1700748 du 26 janvier 2017, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 février 2017, M.C..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2017 du préfet de la Sarthe l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant son pays de renvoi, lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée d'un an et l'informant qu'il fera l'objet d'un signalement aux fins de non admission dans le système d'information Schengen pour la durée de l'interdiction de retour, d'une part, et l'arrêté du même jour l'assignant à résidence, d'autre part ;

3°) d'enjoindre au préfet, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quarante jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me A...en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique au titre de la première instance, d'une part, et la même somme sur le même fondement au titre de l'appel, d'autre part.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée ; elle est entachée d'une erreur de fait ; elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; son signalement aux fins de non admission dans le " système d'information Schengen " n'a pas été précédé de la saisine des autorités référentes en méconnaissance de l'article R. 231-4 du code de la sécurité intérieure ; elle est insuffisamment motivée ; elle méconnaît l'article R. 231-6 du code de la sécurité intérieure ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ; elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'incompétence ; elle est insuffisamment motivée ;

- la décision d'assignation à résidence est insuffisamment motivée ; elle méconnait l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire, enregistré le 10 mars 2017, le préfet de la Sarthe conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens présentés ne sont pas fondés.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 mars 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- le décret n° 2016-1956 du 28 décembre 2016 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Delesalle.

1. Considérant que M. B...C..., ressortissant marocain né en 1980, est entré en France régulièrement le 23 octobre 2015 ; que le 23 janvier 2017, il a été convoqué par la gendarmerie nationale aux fins de vérifier la régularité de son séjour sur le territoire national ; qu'estimant que le séjour de M. C...n'était pas régulier, le préfet de la Sarthe, par un arrêté n° 17-037 du 23 janvier 2017, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français en fixant son pays de renvoi et, par un arrêté n° 17-038 du même jour, l'a assigné à résidence ; que M. C...relève appel du jugement du 23 janvier 2017 du magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes rejetant sa demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

2. Considérant qu'il y a lieu par adoption des motifs retenus par les premiers juges d'écarter les moyens tiré de l'insuffisance de motivation ;

3. Considérant qu'à supposer même que le motif tiré de ce que le projet d'union de M. C... " peut se faire au Maroc et que sa conjointe est d'accord pour l'y accompagner " soit entaché d'inexactitude matérielle alors même qu'il résulte d'un procès-verbal de son audition par la gendarmerie nationale le 5 janvier 2017 dans le cadre d'une enquête relative à son projet de mariage que l'intéressé a déclaré que sa compagne était d'accord pour se marier et vivre au Maroc dans le cas où leur union ne serait pas possible en France, il résulte des termes du motif tenant à l'absence de stabilité et d'intensité des liens noués, que le préfet aurait pris la même décision s'il ne s'était pas fondé sur ce motif ;

4. Considérant que M. C...a vécu au Maroc jusqu'à l'âge de près de trente-cinq ans et était présent en France depuis un peu plus d'un an à la date de la décision ; que s'il a un projet de mariage avec sa compagne, avec qui il vit depuis la fin de l'année 2015, il ne ressort pas des pièces du dossier que leur relation serait antérieure à cette date ; qu'il ne peut utilement se prévaloir de ce que la décision aurait pour effet de séparer celle-ci de ses enfants français présents en France ; que, dans ces conditions, en obligeant le requérant à quitter le territoire français, le préfet n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :

5. Considérant qu'en l'absence de décision portant refus de titre de séjour à laquelle ferait suite la décision d'interdiction de retour sur le territoire français, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de son illégalité est inopérant ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 4 que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

7. Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger (...). / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / (...). " ;

8. Considérant qu'en se bornant à se prévaloir de sa situation personnelle et familiale, laquelle ne relève pas de circonstances humanitaires au sens de ces dispositions, M. C...n'apporte aucun élément de nature à établir que le préfet de la Sarthe aurait méconnu celles-ci ;

Sur le signalement aux fins de non-admission dans le " système d'information Schengen " :

9. Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger à l'encontre duquel a été prise une interdiction de retour est informé qu'il fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, conformément à l'article 24 du règlement (CE) n° 1987/2006 du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 sur l'établissement, le fonctionnement et l'utilisation du système d'information Schengen de deuxième génération (SIS II). Les modalités de suppression du signalement de l'étranger en cas d'annulation ou d'abrogation de l'interdiction de retour sont fixées par voie réglementaire. / (...). " ;

10. Considérant que l'arrêté vise le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne la décision portant interdiction de retour ; que, dès lors, et en tout état de cause, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation manque en fait ;

10. Considérant que M. C...ne peut utilement se prévaloir de l'article R. 231-4 du code de la sécurité intérieure qui n'était plus en vigueur à la date de la décision dès lors qu'il a été abrogé par le décret du 28 décembre 2016 relatif à la partie nationale du système d'information Schengen de deuxième génération (N-SIS II) publié au Journal officiel du 30 décembre 2016 et entré en vigueur le lendemain ; qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire, en tout état de cause, que le préfet était tenu de saisir le ministère de l'intérieur ou la direction générale de la police nationale avant de signaler M. C...dans le système d'information Schengen ;

11. Considérant qu'en vertu du 2° de l'article R. 231-6 du code la sécurité intérieure, peuvent être enregistrées dans le traitement N-SIS II les données à caractère personnel relatives aux personnes signalées aux fins d'interdiction de séjour à la suite d'une décision administrative ; que M. C...ayant fait l'objet d'une interdiction de séjour, le préfet a pu légalement, en tout état de cause, décider de le signaler aux fins de non-admission dans ce traitement ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

12. Considérant que la décision a été signée par M. Baron, secrétaire général de la préfecture de la Sarthe, qui disposait d'une délégation à cet effet en vertu d'un arrêté du 26 mai 2015 du préfet, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département ; que dès lors, le moyen tiré du signataire de la décision doit être écarté ;

13. Considérant que la décision, qui comporte les circonstances de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée ;

Sur l'assignation à résidence :

14. Considérant que la décision fait état des circonstances de fait et de droit, en visant notamment l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur lequel elle se fonde ; que, par suite, elle est suffisamment motivée ;

15. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : / (...) 5° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé ; / (...) " ;

16. Considérant que dès lors qu'il n'est pas contesté que M. C...ne pouvait quitter immédiatement le territoire français et qu'il est constant que son éloignement demeurait une perspective raisonnable, le préfet tenait des dispositions du I de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le droit de l'assigner à résidence ; que le requérant ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 561-1 de ce code ni de ce qu'il présentait des garanties propres à prévenir le risque de soustraction à l'obligation de quitter le territoire ou de son absence d'intention de s'y soustraire en raison de son projet de mariage ;

17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et au ministre de l'intérieur.

Une copie sera transmise, pour information, au préfet de la Sarthe.

Délibéré après l'audience du 4 mai 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Aubert, président assesseur,

- M. Delesalle, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 mai 2017.

Le rapporteur,

H. DelesalleLe président,

F. Bataille

Le greffier,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT00720


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17NT00720
Date de la décision : 18/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Hubert DELESALLE
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : SCP GALLOT LAVALLEE IFRAH BEGUE

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-05-18;17nt00720 ?
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