Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007 et 2008.
Par un jugement n° 1104936-1301055 du 19 novembre 2014, le tribunal administratif de Rennes a fait droit à sa demande.
Procédure devant la cour :
Par un recours et un mémoire enregistrés les 3 mars et 10 décembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 19 novembre 2014 ;
2°) de remettre à la charge de M. A...les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007 et de 2008.
Il soutient que :
- M. A...était domicilié ...au sens de l'article 4 A du code général des impôts dès lors qu'il avait son foyer en France ainsi que le prévoit le a du 1 de l'article 4 B ;
- il ne peut bénéficier de l'exonération prévue par l'article 81 A du code général des impôts pour l'année 2007 et le début de l'année 2008 lorsqu'il était employé par la société Gesmar-CH SA, celle-ci ayant son siège en Suisse, laquelle n'était pas membre de la Communauté européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu la convention fiscale prévue ; qu'il n'établit pas avoir travaillé plus de cent-quatre-vingt-trois jours en Angola en 2007 ; qu'il n'était pas employé par la société Franship Offshore Lux SA dont le siège est au Luxembourg ;
- il ne peut bénéficier de cette exonération pour les revenus perçus à compter du mois de mars 2008 dès lors qu'il n'avait plus la qualité de salarié mais celle de travailleur indépendant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juillet 2015, M. A... conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre de la première instance et de l'appel et d'une somme de 70 euros au titre des dépens.
Il soutient que :
- les moyens invoqués par le ministre ne sont pas fondés ;
- il n'était pas résident fiscal en France au regard du a de l'article 4 A du code général des impôts n'ayant pas eu, en 2007 et en 2008, son foyer ou le lieu de son séjour principal en France ;
- il se prévaut sur ce point, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des paragraphes n° 4 de l'instruction 5B-24-77 du 26 juillet 1977 et n° 6 et n° 10 de la documentation administrative 5B-1121 du 1er septembre 1999 ;
- il n'était pas résident fiscal en France au regard du c de l'article 4 A du code général des impôts dès lors qu'il n'y avait pas le centre de ses intérêts économiques ;
- il se prévaut sur ce point, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des paragraphes n° 6 de l'instruction 5B-24-77 du 26 juillet 1977 et n° 17 et n° 19 de la documentation administrative 5B-1121 du 1er septembre 1999 ;
- à supposer qu'il ait été résident en France, il remplissait les conditions posées par l'article 81 A du code général des impôts pour pouvoir bénéficier d'une exonération totale de ses revenus salariaux pour les années 2007 et 2008 dès lors qu'il a été envoyé en Angola par une société dont le siège est au Luxembourg ;
- il se prévaut sur ce point, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des paragraphes n° 31 de l'instruction 5B-24-77 du 26 Juillet 1977, n° 19 de la documentation administrative 5B-1122 du 1er septembre 1999 et n° 2 de la documentation administrative 5F-1312 du 20 juillet 1998 ;
- il a acquitté deux contributions pour l'aide juridique d'un montant de 35 euros chacune.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Delesalle,
- et les conclusions de M. Jouno, rapporteur public.
1. Considérant que M. A...a travaillé en Angola sur des plates-formes pétrolières, du 1er janvier 2007 au 4 mars 2008, en qualité de salarié employé par la société Gesmar-CH SA, et du 5 mars au 31 décembre 2008, en qualité de travailleur indépendant recruté par la société Stapem Offshore SA ; que sur ses déclarations d'impôt sur le revenu relatives aux années 2007 et 2008, il s'est prévalu de l'exonération des salaires perçus au titre de ces activités sur le fondement de l'article 81 A du code général des impôts ; qu'à la suite du contrôle sur pièces de son dossier fiscal, le service lui a notifié des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu de 18 207 euros en droits, majorées de 10 %, et de l'intérêt de retard, soit 21 485 euros au titre de l'année 2007, et de 26 437 euros en droits au titre de l'année 2008 ; qu'après le rejet de ses deux réclamations du 18 octobre 2011 et du 9 janvier 2013, M. A...a saisi le tribunal administratif de Rennes de deux demandes tendant à la décharge des suppléments d'imposition auxquels il a été assujetti ; que le ministre des finances et des comptes publics relève appel du jugement du 19 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Rennes a fait droit à ces demandes après les avoir jointes ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. / Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française " ; qu'aux termes de l'article 4 B du même code : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : / a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; (...) " ; que, pour l'application de ces dispositions, telles qu'éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 29 décembre 1976 dont elles sont issues, le foyer d'un contribuable célibataire s'entend du lieu où il habite normalement et a le centre de sa vie personnelle, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles ; que le lieu du séjour principal de ce contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l'hypothèse où il ne dispose pas de foyer en France ;
3. Considérant que M. A...soutient avoir établi son foyer en Angola où, au cours des années d'imposition en litige, il vivait en concubinage avec une ressortissante angolaise et était inscrit au registre des Français établis hors de France ainsi que l'atteste la carte de résident qui lui a été délivrée par l'ambassade de France ; que, toutefois, l'attestation de concubinage qu'il produit, établie le 12 mars 2010, ne précise pas l'adresse de celle qui aurait été alors sa compagne et n'est assortie d'aucun autre élément justificatif permettant d'établir que M.A... avait le centre de sa vie personnelle en Angola, où il travaillait sur des plates-formes pétrolières ; que s'il ne résulte pas de l'instruction que le requérant avait conservé une habitation personnelle en France et si les éléments du dossier ne permettent pas de déterminer la fréquence et la durée de ses séjours en France, il est constant qu'il a conservé une adresse postale et une domiciliation fiscale et administrative dans les Côtes-d'Armor, au domicile de son ex-épouse, à laquelle le domicile conjugal avait été attribué par un jugement de divorce du 17 août 2006 et qu'il a bénéficié de soins médicaux en France à plusieurs reprises ; qu'en outre, il y possédait plusieurs comptes bancaires, un véhicule et un terrain sur lequel il a fait édifier une habitation qui a été achevée en avril 2009 ; que, dans ces conditions, M. A...doit être regardé comme ayant eu son foyer en France ; que, dès lors, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que son domicile fiscal ne pouvait pas être fixé en France au sens l'article 4 B du code général des impôts, au cours des années 2007 et 2008 ;
4. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens présentés par M. A...tant en appel qu'en première instance ;
Sur le domicile fiscal :
5. Considérant que le paragraphe 4 de l'instruction 5B-24-77 du 26 juillet 1977 et les paragraphes 6 et 10 de l'instruction 5B-1121 du 1er septembre 1999 ne donnent pas de l'article 4 B du code général des impôts une interprétation différente de celle dont il vient d'être fait application ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
6. Considérant qu'aux termes de l'article 81 A du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " I. - Les personnes domiciliées en France au sens de l'article 4 B qui exercent une activité salariée et sont envoyées par un employeur dans un Etat autre que la France et que celui du lieu d'établissement de cet employeur peuvent bénéficier d'une exonération d'impôt sur le revenu à raison des salaires perçus en rémunération de l'activité exercée dans l'Etat où elles sont envoyées. / L'employeur doit être établi en France ou dans un autre Etat membre de la Communauté européenne, ou dans un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale. / (...) " ;
7. Considérant, d'une part, que les revenus déclarés au titre de l'année 2007 et, au titre de l'année 2008, pour la période allant du 1er janvier 2008 au 4 mars 2008, provenaient de l'activité exercée par M. A...en qualité de salarié de la société Gesmar CH SA, laquelle avait son siège en Suisse ; que s'il résulte de l'attestation du 5 août 2011 établie par cette société qu'il exerçait son activité " pour le compte " de la société Franship Offshore Lux SA, dont le siège est situé au Luxembourg, les autres attestations délivrées par la même société les 7 mai 2009 et 23 janvier 2014 mentionnent qu'il a exercé son activité " pour le compte " de la société Gesmar-CH SA elle-même du 1er janvier 2007 au 4 mars 2008 ; que le requérant n'apporte aucun élément de nature à établir que c'est la société luxembourgeoise, avec laquelle il n'était lié par aucun contrat de travail, qui l'aurait envoyé en Angola et non la société suisse qui l'avait recruté et le rémunérait ; qu'il suit de là qu'il a été employé en Angola par une société ayant son siège en Suisse ; que la Suisse n'était ni membre de la Communauté européenne, ni partie à l'accord sur l'Espace économique européen ; que, dès lors, M. A...n'est pas fondé à demander le bénéfice de l'exonération prévue par l'article 81 A du code général des impôts sur le terrain de la loi fiscale ;
8. Considérant d'autre part, que si M. A...demande également, sur le fondement de l'article 81 A du code général des impôts, l'exonération des revenus qu'il a perçus du 5 mars au 31 décembre 2008, période au cours de laquelle il était employé en qualité de travailleur indépendant par la société Stapem Offshore SA, ce moyen n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ; qu'il doit, dès lors et en tout état de cause, être écarté ;
En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :
9. Considérant que M. A...se prévaut, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe n° 35 de l'instruction 5B-24-77 du 26 juillet 1977, du paragraphe n° 19 de la documentation administrative 5B-1122 du 1er septembre 1999 et du paragraphe n° 2 de la documentation administrative 5F-1312 du 20 juin 1998 ; que ces commentaires administratifs de la loi s'appliquent au contribuable dont l'employeur effectif est établi en France ; qu'ainsi qu'il est dit au point 7 la société Gesmar CH SA qui l'a employé en qualité de salarié n'a pas son siège social en France ; que la société Stapem Offshore SA l'a recruté en qualité de travailleur indépendant et non de salarié ; que, dès lors, sa situation ne relève pas des instructions dont il se prévaut ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre des finances et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a prononcé la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. A...a été assujetti au titre des années 2007 et 2008 ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées les conclusions du requérant présentées au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes du 19 novembre 2014 est annulé.
Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. A...a été assujetti au titre des années 2007 et 2008 sont remises à sa charge en droits et pénalités.
Article 3 : Les conclusions de M. A...présentées au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 17 novembre 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Aubert, président de chambre,
- M. Delesalle, premier conseiller,
- Mme Chollet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er décembre 2016.
Le rapporteur,
H. DelesalleLe président,
S. Aubert
Le greffier,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT00766