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23/12/2015 | FRANCE | N°13NT03490

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 23 décembre 2015, 13NT03490


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le département du Loiret et la SMACL Assurances ont demandé au tribunal administratif d'Orléans :

- de condamner solidairement la société Inéo, la société AC Ingénierie, à laquelle s'est substituée la société Bâtiments Energies Assistance, la société Socotec et la société CR Architecture au paiement de la somme de 357 667,95 euros dont 296 386 euros à la SMACL Assurances, avec intérêts au taux légal ct capitalisation des intérêts, en réparation des désordres affectant le collège Ro

bert Schumann à Amilly à la suite de l'incendie qui s'est déclaré le 10 décembre 2007 ;

- de m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le département du Loiret et la SMACL Assurances ont demandé au tribunal administratif d'Orléans :

- de condamner solidairement la société Inéo, la société AC Ingénierie, à laquelle s'est substituée la société Bâtiments Energies Assistance, la société Socotec et la société CR Architecture au paiement de la somme de 357 667,95 euros dont 296 386 euros à la SMACL Assurances, avec intérêts au taux légal ct capitalisation des intérêts, en réparation des désordres affectant le collège Robert Schumann à Amilly à la suite de l'incendie qui s'est déclaré le 10 décembre 2007 ;

- de mettre les dépens de l'instance, liquidés à la somme de 24 485,28 euros par ordonnance du président du tribunal du 6 août 2012, à la charge de ces sociétés.

Par un jugement n° 1300312 du 7 novembre 2013, le tribunal administratif d'Orléans :

1°) a condamné solidairement les sociétés Inéo, Bâtiments Energies Assistance, Socotec et CR Architecture à verser :

- au département du Loiret la somme de 17 883,94 euros TTC,

- à la SMACL Assurances la somme de 71 533,76 euros TTC,

avec intérêts aux taux légal à compter du 31 janvier 2013 ;

2°) a réparti la charge définitive des frais d'expertise, d'un montant de 24 485,28 euros TTC, entre le département du Loiret à hauteur de 18 363,96 euros TTC et les sociétés mises en cause à hauteur de 6 121,32 euros TTC, somme portant intérêts à compter du 31 janvier 2013 ;

3°) statuant sur les appels en garantie, a :

- condamné les sociétés CR Architecture et Bâtiments Energies Assistance, d'une part, et la société Socotec, d'autre part, à garantir la société Inéo Centre à hauteur respectivement de 50 % et de 25 % des condamnations prononcées aux articles 1, 2 et 3 du jugement ;

- condamné les sociétés CR Architecture et Bâtiments Energies Assistance, d'une part, et la société Inéo Centre, d'autre part, à garantir la société Socotec à hauteur respectivement de 50 % et de 25% des condamnations prononcées aux articles 1, 2 et 3 du jugement ;

- condamné les sociétés Inéo Centre et Socotec à garantir la société Bâtiments Energies Assistance à hauteur chacune de 25 % des condamnations prononcées aux articles 1, 2 et 3 du jugement ;

- rejeté l'appel en garantie présenté par la société Bâtiments Energies Assistance contre la société CR Architecture.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 décembre 2013 et le 22 mai 2015, le département du Loiret et la SMACL Assurances, représentés par MeF..., demandent à la cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 7 novembre 2013 ;

2°) de condamner solidairement la société Inéo, la société Bâtiments Energies Assistance, la société Socotec et la société CR Architecture au paiement, à titre principal, des sommes de 296 386 euros TTC à la SMACL Assurances et 61 281,96 euros TTC au département du Loiret, avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts, à titre subsidiaire, des sommes respectives de 290 458,28 euros et 60 056,31 euros ;

3°) de mettre à la charge des sociétés mises en cause la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le sinistre n'a pas d'autre cause que la mise en place d'une armoire électrique non protégée contre l'humidité compte tenu du lieu où elle était implantée, qui met en jeu la responsabilité des constructeurs et de la maîtrise d'oeuvre dans l'ensemble de ses missions et dégage toute responsabilité du maître d'ouvrage ;

- la persistance de l'humidité dans le temps n'est pas imputable au département, ou en tout cas pas à lui seul ni même à titre principal.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 29 septembre et le 9 décembre 2014, la société Inéo Centre, représentée par MeI..., conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident :

- à titre principal, à la réformation du jugement en ce qu'il a imputé les désordres à la société Inéo Centre ;

- à titre subsidiaire, à ce que sa responsabilité soit déclarée de principe, et à ce qu'elle soit garantie de toute condamnation, solidairement, par les sociétés CR Architecture, AC ingénierie et Socotec et par le département du Loiret ;

- à titre plus subsidiaire, à la confirmation du jugement ;

3°) à ce que soit mise à la charge du département du Loiret et de la SMACL Assurances la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- aucune faute ne lui est imputable, dès lors que l'emplacement de l'armoire technique n'a pas été changé et que l'armoire installée était conforme aux stipulations de son CCTP ;

- sa responsabilité ne saurait en tout état de cause qu'être de principe ;

- elle n'est pas à l'origine de l'implantation de l'armoire ni de la réalisation de son enveloppe ;

- elle doit être garantie de toute condamnation par les autres intervenants.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 septembre 2014, la société Socotec, représentée par MeC..., conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident :

- à titre principal, à la réformation du jugement en ce qu'il a imputé les désordres à la société Socotec ;

- à titre plus subsidiaire, à la confirmation du jugement ;

- à ce qu'elle soit garantie de toute condamnation, solidairement, par les sociétés CR Architecture, AC ingénierie et Inéo Centre ;

3°) à ce que soit mise à la charge du département du Loiret et de la SMACL Assurances la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- compte tenu de sa mission de contrôleur technique, limitée à l'émission d'avis, sa responsabilité décennale ne saurait être engagée ;

- en application de l'article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation, le contrôleur technique ne supporte la réparation des dommages qu'à concurrence de la part de responsabilité susceptible d'être mise à sa charge dans les limites de sa mission ;

- la faute du département à ne pas avoir assuré une maintenance satisfaisante de l'installation est à l'origine des désordres à titre principal.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 1er octobre 2014 et le 19 mai 2015, la société Bâtiments Energies Assistance, représentée par MeG..., conclut, dans le dernier état de ses écritures :

1°) au rejet de la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident :

- au rejet de toute demande dirigée à son encontre par le département du Loiret et la SMACL Assurances, et par les autres constructeurs ;

- à la condamnation solidaire des sociétés Inéo Centre, CR Architecture et Socotec à la garantir de toute condamnation ;

- en tout état de cause, à ce que le montant du préjudice soit limité à la somme de 289 979,46 euros HT ;

3°) à ce que soit mise à la charge du département du Loiret, ainsi que de tout succombant, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les fautes commises par le département sont exonératoires de la responsabilité des constructeurs : l'inaction du maître d'ouvrage, qui connaissait les risques, est seule à l'origine du sinistre ;

- en tout cas sa responsabilité ne serait que de principe ; les autres constructeurs mis en cause devraient la garantir de toute condamnation ;

- le montant de la réparation ne doit pas inclure la TVA ; en outre le coût de déplacement de l'armoire ne constitue pas un préjudice réparable.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 22 octobre 2014 et le 8 octobre 2015, la société CR Architecture, représentée par MeE..., conclut :

1°) au rejet de la requête et à la réformation du jugement seulement en ce qu'il l'a condamnée à garantir les sociétés Inéo Centre, Bâtiments Energies Assistance et Socotec ;

2°) par la voie de l'appel incident :

- à titre principal, au rejet de toutes les demandes présentées par les requérants à son encontre ;

- à titre subsidiaire, à ce que les fautes du département du Loiret exonèrent les constructeurs à hauteur de 75 % du montant d'un préjudice qui sera limité à 289 979,46 euros HT, et à ce que les sociétés Inéo Centre, Bâtiments Energies Assistance et Socotec, la garantissent de toute condamnation ;

3°) à ce que soit mise à la charge du département du Loiret et de la SMACL Assurances la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle n'a joué aucun rôle dans la définition du lot " électricité " ; aucune faute ne saurait lui être imputée ;

- les fautes du département sont exonératoires, au moins à hauteur de 75 % ;

- en tout cas, elle devra être garantie par les autres constructeurs mis en cause ;

- le montant des condamnations devra être calculé hors taxe.

Par ordonnance du 28 septembre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 12 octobre 2015 à 12 heures.

Un mémoire présenté pour la société Inéo Centre a été enregistré le 27 octobre 2015 postérieurement à la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code civil ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Madelaine,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,

- et les observations de MeF..., représentant le département du Loiret et la SMACL Assurances, de MeD..., représentant la société CR Architecture, de Me H..., représentant la société Bâtiments Energies Assistance, et de MeA..., représentant la société Socotec.

1. Considérant que le département du Loiret a engagé des travaux de reconstruction du collège Robert Schumann à Amilly dont il a confié la maîtrise d'oeuvre à un groupement composé du cabinet d'architectes Constantini et Regembal (CR Architecture) et de la société AC Ingénierie Ile de France, aux droits de laquelle vient la société Bâtiments Energies Assistance, bureau d'études techniques ; que la société Inéo était titulaire du lot 11 " électricité " et la société Socotec avait en charge le contrôle technique, dans le cadre d'une mission de type L relative à la solidité des ouvrages et à la sécurité des personnes ; qu'un incendie s'est déclaré le 10 décembre 2007 dans le bâtiment de la restauration scolaire, qui a endommagé la zone de réception, les réserves sèches, la salle de " déboitage ", la " légumerie ", la salle de préparation froide, le local vaisselle, les chambres froides et la salle de restauration ; que des dommages ont également été causés aux faux-plafonds ainsi qu'à la charpente et à la couverture de l'ouvrage ; que le département du Loiret a recherché la responsabilité solidaire du cabinet CR Architecture et des sociétés Inéo, Bâtiments Energies Assistance et Socotec, sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs ; que le département ainsi que la SMACL Assurances, en tant qu'elle est subrogée dans les droits de ce dernier, relèvent appel du jugement du 7 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a limité la part de responsabilité des constructeurs mis en cause à 25 % du montant des préjudices constatés ; que, par la voie de l'appel incident, le cabinet CR Architecture et les sociétés Inéo, Bâtiments Energies Assistance et Socotec demandent leur mise hors de cause, à tout le moins une limitation de leur part de responsabilité et une réduction du montant des indemnités allouées ; que, par la voie de l'appel provoqué, les intimés contestent le partage de responsabilité prononcé par les premiers juges dans le cadre d'appels en garantie croisés ;

Sur l'appel principal et les appels incidents :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans ;

3. Considérant que la réception des travaux du collège d'Amilly, scindés en deux tranches, a été prononcée les 10 novembre 2005 et 14 mars 2006 ; que les procès-verbaux de réception ne comportaient aucune réserve relative aux éléments de l'ouvrage mis en cause dans le présent litige ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, qu'un incendie s'est déclaré le 10 décembre 2007 dans l'armoire électrique desservant le bâtiment de la restauration scolaire ; que les désordres consécutifs à cet incendie ont mis en cause la sécurité des usagers et du personnel et ont rendu l'ouvrage impropre à sa destination ; que l'absence d'électricité a également rendu impossible la confection des repas sur place et l'utilisation de la salle de restaurant ;

5. Considérant que les investigations de l'expert ont mis en évidence que l'armoire électrique était située dans un placard technique, fermé en partie supérieure par une plaque de placoplâtre ; que ce placard technique était dépourvu de porte étanche, sans toit et sans mise en place de presse-étoupe pour assurer l'étanchéité des passages de câbles ; qu'il était de surcroît situé dans l'espace " laverie " du bâtiment ; qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que l'incendie a été déclenché par la formation d'un arc électrique lié à la présence d'humidité dans l'armoire technique ; que cette humidité provenait de la condensation de l'air sursaturé sortant des machines à laver la vaisselle situées dans l'environnement immédiat de l'installation électrique ;

6. Considérant, d'une part, que l'implantation de l'armoire électrique ne correspond pas à celle qui était initialement envisagée, dans la circulation centrale de la cuisine au rez-de-chaussée, conformément aux stipulations du cahier des clauses techniques particulières ; qu'il ressort des pièces versées aux débats que le changement est intervenu à la demande du cuisiniste, sans que le cabinet CR Architecture, informé de cette modification, la société Bâtiments Energies Assistance et la société Inéo, chargée du lot électricité, qui ne pouvaient ignorer les risques liés au nouvel emplacement, aient émis la moindre réserve ; qu'en outre, alors qu'était exigé pour toute installation électrique réalisée dans l'espace " laverie " un indice de protection IP 25, le placard qui protégeait l'armoire électrique ne bénéficiait que d'une protection très inférieure et très insuffisante contre les risques créés par l'atmosphère ambiante imprégnée de très forte humidité ; que les constructeurs mis en cause, notamment la société Inéo dont l'article 1.06 du CCTP de son lot précisait qu'elle devait vérifier que les stipulations des pièces de son lot étaient conformes aux règles de sa profession et qu'elle devait prendre connaissance de la totalité des pièces écrites et plans constituant le dossier de consultation des entreprises afin, notamment, de déceler les incompatibilités entre les différents ouvrages, ne sauraient échapper à leur responsabilité en arguant de la faute éventuellement commise par la société chargée du lot menuiserie dans la réalisation des portes du placard ;

7. Considérant, d'autre part, que si le bureau de contrôle Socotec a vérifié la conformité du cahier des clauses techniques particulières du lot " électricité " aux normes applicables en matière de sécurité, et préconisé pour toutes les installations électriques mises en place dans la " laverie " un indice d'étanchéité IP 25, il résulte toutefois de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que la société n'a pas relevé, lors de ses contrôles sur site et lors du contrôle final, que l'implantation de l'armoire électrique ne correspondait pas aux spécifications du CCTP et que cet équipement ne possédait pas l'indice d'étanchéité IP 25 ;

8. Mais considérant que le maître d'ouvrage et l'exploitant de la cantine ont rapidement décelé les problèmes de condensation dans le placard technique abritant l'armoire à l'origine du sinistre et en ont averti le cabinet d'architecture ; que, si la société Inéo a tenté sans succès d'organiser une réunion sur ces risques le 17 novembre 2006, aucune suite n'a été donnée ; qu'en dépit de la persistance des phénomènes de condensation dont les conséquences potentiellement dramatiques ne pouvaient échapper à un maître d'ouvrage doté, comme en l'espèce, de services techniques compétents, aucune action n'a été entreprise pour faire cesser ces phénomènes ; que, devant l'inertie des constructeurs, le département n'a pas fait appel à une entreprise spécialisée susceptible d'établir un diagnostic et de préconiser des mesures de nature à faire cesser le danger ; qu'il a eu recours à des interventions totalement inadaptées, telles que l'ouverture des portes du placard pendant les périodes au cours desquelles la laverie n'était pas en activité et le recours à un sèche-cheveux pour assécher les pièces de l'installation électrique affectées par l'humidité ; que, dans ces conditions, l'inaction du maître d'ouvrage devant les risques prévisibles d'incendie du fait de l'implantation de l'ouvrage et de son humidification constatée est de nature à exonérer la responsabilité des constructeurs ; que les premiers juges ont fait une juste appréciation de cette cause exonératoire de responsabilité en la fixant à 75 % ;

9. Considérant, en second lieu, que le rapport d'expertise, qui n'est pas contesté sur ce point, a évalué le montant des préjudices subis par le département du Loiret à la somme de 289 979,46 euros HT comprenant les travaux d'urgence pour 31 706,21 euros HT, les travaux de réparation pour 193 256,47 euros HT, les honoraires de maîtrise d'oeuvre de ces travaux pour 48 665,47 euros HT, les dépenses et frais divers de repas pour 7 204,80 euros HT, la perte de denrées alimentaires pour 7 637,31 euros HT et les frais divers pour 1 509,20 euros HT ; qu'il convient d'ajouter à ces chefs de préjudices, le coût de déplacement de l'armoire électrique, nécessaire pour mettre fin aux risques, soit la somme de 9 268,88 euros HT et les honoraires de maîtrise d'oeuvre correspondant, soit 1 390,33 euros HT ; que les préjudices réparables s'établissent ainsi au montant total de 300 638,67 euros HT ;

10. Considérant que le montant du préjudice dont le maître de l'ouvrage est fondé à demander réparation aux constructeurs en raison des désordres affectant l'immeuble qu'ils ont réalisé correspond aux frais qu'il doit engager pour les travaux de réfection ; que ces frais comprennent, en règle générale, la taxe sur la valeur ajoutée, élément indissociable du coût des travaux et des dépenses qu'il a dû engager pour faire face aux conséquences des dommages subis, à moins que le maître de l'ouvrage ne relève d'un régime fiscal qui lui permet normalement de déduire tout ou partie de cette taxe de celle dont il est redevable à raison de ses propres opérations ; que les collectivités territoriales bénéficient ainsi d'une présomption de non-assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée ; que, par suite, il appartenait aux intimés, qui n'y pourvoient pas, d'apporter des éléments de nature à écarter cette présomption en ce qui concerne le département du Loiret ; que l'indemnisation doit, dès lors, comprendre la TVA aux taux applicables aux différents préjudices réparés ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est par une juste évaluation des préjudices subis que les premiers juges ont fixé leur montant à la somme de 357 667,95 euros TTC, et, compte tenu du partage de responsabilité, condamné solidairement le cabinet CR Architecture et les sociétés Inéo, Bâtiments Energies Assistance et Socotec au paiement d'une somme de 89 416,97 euros ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que tant l'appel principal présenté par le département du Loiret et la SMACL Assurances que les appels incidents présentés par le cabinet CR Architecture et les sociétés Inéo, Bâtiments Energies Assistance et Socotec doivent être rejetés ;

Sur les appels provoqués :

13. Considérant que la recevabilité d'un appel provoqué est subordonnée à l'admission de l'appel principal et à l'aggravation de la situation de l'auteur de ces conclusions ; qu'il résulte de ce qui précède que l'appel principal est rejeté et que la situation du cabinet CR Architecture et des sociétés Inéo, Bâtiments Energies Assistance et Socotec n'est pas aggravée par le présent arrêt ; qu'il s'ensuit que leurs conclusions présentées par la voie de l'appel provoqué, en vue de remettre en cause la répartition finale de la réparation, ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise sur ce fondement à la charge des défendeurs qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante ; que les conclusions présentées à ce titre par le département du Loiret et la SMACL Assurances doivent, dès lors, être rejetées ;

15. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département du Loiret et de la SMACL Assurances, pris conjointement, le versement au cabinet CR Architecture et aux sociétés Inéo, Bâtiments Energies Assistance et Socotec de la somme de 1 000 euros chacun au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du département du Loiret et de la SMACL Assurances est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du cabinet CR Architecture et des sociétés Inéo, Bâtiments Energies Assistance et Socotec, présentées par voie d'appel incident ou provoqué sont rejetées.

Article 3 : Le département du Loiret et la SMACL Assurances, prises conjointement, verseront au cabinet CR Architecture et aux sociétés Inéo, Bâtiments Energies Assistance et Socotec la somme de 1 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au département du Loiret, à la SMACL Assurances, au cabinet CR Architecture, à la société Bâtiments Energies Assistance, à la société Inéo Centre et à la société Socotec.

Délibéré après l'audience du 22 décembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- M. Madelaine, faisant fonction de premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 décembre 2015.

Le rapporteur,

B. MADELAINE Le président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. B...

La République mande et ordonne au préfet du Loiret en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT03490


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT03490
Date de la décision : 23/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Bernard MADELAINE
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SELARL CASADEI-JUNG et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-12-23;13nt03490 ?
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