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05/12/2014 | FRANCE | N°13NT01405

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 05 décembre 2014, 13NT01405


Vu la requête et le mémoire rectificatif, enregistrés les 17 mai et 17 juin 2013, présentés pour la SARL Samfi mobilier urbain et affichage, dont le siège est sis rue du Poirier à Carpiquet (14650), représentée par son gérant en exercice, par Me A... ; la SARL Samfi Mobilier urbain et affichage demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 janvier 2012 du maire de la commune de Colleville-Montgomery portant reconduction pour trois ans de la conventio

n de concession d'emplacement d'abribus et mobiliers urbains conclue...

Vu la requête et le mémoire rectificatif, enregistrés les 17 mai et 17 juin 2013, présentés pour la SARL Samfi mobilier urbain et affichage, dont le siège est sis rue du Poirier à Carpiquet (14650), représentée par son gérant en exercice, par Me A... ; la SARL Samfi Mobilier urbain et affichage demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 janvier 2012 du maire de la commune de Colleville-Montgomery portant reconduction pour trois ans de la convention de concession d'emplacement d'abribus et mobiliers urbains conclue avec la société Apic ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de mettre à la charge de la commune le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'une somme de 35 euros au titre de la contribution pour l'aide juridique ;

elle soutient que :

- la délibération du conseil municipal du 21 mars 2008 accordant au maire la possibilité de prendre les décisions prévues à l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales est trop générale et ne peut être regardée comme de nature à lui permettre de procéder à la passation d'un avenant à un contrat ;

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, il y a bien eu augmentation des marchés initiaux de plus de 5 %, leur renouvellement pour trois ans allongeant leur durée d'un tiers au-delà de la durée de douze ans initialement prévue ;

- les dispositions de l'article 20 du code des marchés publics ont été méconnues dès lors que l'avenant en litige bouleverse l'économie du marché attribué à la société Apic ; la décision du maire a pour effet de confier à cette société un nouveau marché en dehors de toute procédure de mise en concurrence ;

- si le contrat initial conclu avec la société Apic comporte une clause de reconduction, l'installation de deux nouveaux abribus n'était pas prévue et le changement de la nature de la structure des équipements équivaut à la fourniture d'une prestation différente ;

- la commune a expressément reconnu dans ses écritures de première instance que les nouvelles prestations sont d'un volume conséquent, ce qui démontre l'existence d'un bouleversement de l'économie du contrat ;

- les principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité des candidats et de transparence des procédures ont été méconnus ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 février 2014, présenté pour la commune de Colleville-Montgomery qui conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de la société requérante la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable en l'absence d'intérêt à agir de la société qui ne démontre pas avoir souhaité contracter avec la commune et ne peut être regardée comme un candidat évincé ;

- la demande de première instance, enregistrée le 8 juin 2012 après un recours gracieux formé le 30 mars 2012 était tardive, la décision affichée le 20 janvier 2012 ne pouvant être contestée que jusqu'au 20 mars 2012 ;

- le conseil municipal pouvait régulièrement déléguer au maire la totalité des missions définies à l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales ;

- le moyen tiré de l'incompétence du maire pour signer un avenant entraînant une augmentation de plus de 5 % du contrat initial est inopérant, la disposition de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales sur laquelle ce moyen est fondé ayant été abrogée par le 1° de l'article 10 de la loi n° 2009-179 du 17 février 2009 ;

- contrairement aux allégations de la SARL Samfi mobilier urbain et affichage l'économie générale du contrat n'a pas été bouleversée, la faculté de reconduction, qui constitue une contrepartie aux investissements réalisés par la société Apic, ayant été prévue par le contrat initial ;

- la société Apic n'a procédé à l'installation d'aucun nouveau mobilier et s'est bornée à remplacer ses propres installations, qui étaient vétustes, en exécution de son obligation d'entretien ;

- la commune est propriétaire des deux nouveaux mobiliers urbains et le courrier du 9 janvier 2012 n'accorde pas à la société Apic le droit de les exploiter ; de ce fait le montant initial du marché n'a pas augmenté de 25 % ;

Vu le courrier du 25 février 2014 adressé aux parties en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 mars 2014, présenté pour la société "Cadres blancs afficheurs" venant aux droits de la société Apic qui conclut au rejet de la requête de la SARL Samfi Mobilier urbain et affichage et demande que soit mise à sa charge la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- la demande de première instance était irrecevable pour défaut d'intérêt à agir et tardiveté ;

- la délibération du conseil municipal du 21 mars 2008 accordait au maire, sans ambigüité, la possibilité de prendre l'ensemble des décisions prévues à l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales ;

- contrairement aux allégations de la SARL Samfi mobilier urbain et affichage, le marché n'a pas été renouvelé pour une période supplémentaire de trois ans mais s'est poursuivi par l'effet de la clause de reconduction ; signé en application de cette clause, l'avenant ne bouleverse pas l'économie du contrat ;

- il n'est pas démontré que la prise en charge de deux mobiliers urbains supplémentaires appartenant à la commune entrainera une augmentation de la rémunération excédant 5 % du marché initial ou un bouleversement de l'économie du contrat ;

- la société Apic n'a pas installé de nouveaux mobiliers urbains ; le remplacement du mobilier en bois devenu vétuste par du mobilier métallique ne peut être regardé comme une prestation supplémentaire ;

Vu le mémoire, enregistré le 31 mars 2014, présenté pour la SARL Samfi mobilier urbain et affichage qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;

elle ajoute que :

- sa demande n'était pas tardive, l'affichage du courrier du maire du 9 janvier 2012 n'ayant pas eu pour effet d'assurer une information complète des tiers de nature à faire courir les délais de recours ;

- n'ayant pu se porter candidate à des prestations non prévues par le marché initial et soumises à l'obligation de mise en concurrence, elle a intérêt à agir ;

Vu l'ordonnance du 17 avril 2014 portant clôture immédiate de l'instruction en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 novembre 2014 :

- le rapport de M. Auger, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public ;

1. Considérant que par deux conventions d'une durée de douze ans signées le 1er juin 2004 entre le maire de Colleville-Montgomery (Calvados) et la société Apic aux droits de laquelle vient la société " Cadres blancs afficheurs ", celle-ci a été chargée de l'installation de huit mobiliers urbains d'informations municipales et de sept abribus dont elle est propriétaire, la rémunération de cette prestation provenant des bénéfices tirés de l'apposition de publicité ; que ces deux conventions ont été reconduites pour une durée de trois ans par une décision du maire du 9 janvier 2012 ; que la SARL Samfi mobilier urbain et affichage relève appel du jugement du 28 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales dans sa version en vigueur à la date où la décision contestée a été prise : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (...) 4° De prendre toute décision concernant la préparation, la passation, l'exécution et le règlement des marchés et des accords-cadres ainsi que toute décision concernant leurs avenants, lorsque les crédits sont inscrits au budget (...) " ; que par délibération du 21 mars 2008 le conseil municipal a accordé délégation générale au maire pour l'ensemble des matières prévues à l'article L. 2122-22 du code précité afin de faciliter l'administration municipale ; qu'ainsi le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision contestée doit être écarté comme manquant en fait ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 15 du code des marchés publics dans sa rédaction en vigueur à la date de signature des conventions du 1er juin 2004 : " Sans préjudice des articles 35, 68 et 71 définissant la durée maximale pour certains marchés, la durée d'un marché est fixée en tenant compte de la nature des prestations et de la nécessité d'une remise en concurrence périodique. / Un marché peut prévoir une ou plusieurs reconductions à condition que ses caractéristiques restent inchangées et que la mise en concurrence ait été réalisée en prenant en compte la durée totale du marché, période de reconduction comprise. (...) " ;

4. Considérant que, par sa décision du 9 janvier 2012, le maire de Colleville-Montgomery a reconduit les deux conventions conclues avec la société Apic le 1er juin 2004 sans en étendre l'objet à la prise en charge de deux abribus appartenant à la commune et au remplacement du matériel installé en 2004, lequel résulte d'une proposition du concessionnaire du 15 novembre 2011 que le courrier du maire se borne à rappeler ; qu'il suit de là que la société requérante ne se prévaut pas utilement de la fourniture de ces deux prestations pour soutenir que les modalités de la reconduction ont bouleversé l'économie du contrat ;

5. Considérant que la SARL Samfi mobilier urbain et affichage n'apporte aucun élément de nature à établir que la mise en concurrence ayant abouti à la conclusion des deux conventions du 1er juin 2004 n'a pas pris en compte la possibilité de reconduire les concessions pour une durée de trois ans ; qu'elle n'est dès lors pas fondée à soutenir que la reconduction du contrat en bouleverse l'économie ; que, pour le même motif, le moyen tiré de la méconnaissance des principes de liberté d'accès à la commande publique, de liberté de la concurrence, d'égalité des candidats et de transparence des procédures doit être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte des points 3 à 5 du présent arrêt que la commune a simplement pris la décision de poursuivre jusqu'en 2019 l'exécution des conventions conclues le 1er juin 2004 ; qu'une telle décision ne constituant pas un avenant à ces conventions, la société requérante ne se prévaut pas utilement de l'article 20 du code des marchés publics relatif au régime juridique de l'avenant ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance, que la SARL Samfi mobilier urbain et affichage n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Colleville-Montgomery, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SARL Samfi mobilier urbain et affichage demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à sa charge la somme de 35 euros demandée par la société requérante au titre de l'article R. 761-1 du même code ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la SARL Samfi mobilier urbain et affichage le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Colleville-Montgomery et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la SARL Samfi mobilier urbain et affichage la somme demandée par la société " Cadres blancs afficheurs ", venant aux droits de la société Apic, au titre des mêmes frais ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Samfi mobilier urbain et affichage est rejetée.

Article 2 : La SARL Samfi mobilier urbain et affichage versera une somme de 1 500 euros à la commune de Colleville-Montgomery au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la société " Cadres blancs afficheurs ", venant aux droits de la société Apic, présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Samfi mobilier urbain et affichage, à la commune de Colleville-Montgomery et à la société " Cadres blancs afficheurs ".

Délibéré après l'audience du 18 novembre 2014, à laquelle siégeaient :

- Mme Aubert, président de chambre,

- M.B..., faisant fonction de premier conseiller,

- M. Auger, premier conseiller.

Lu en audience publique le 5 décembre 2014.

Le rapporteur,

P. AUGERLe président,

S. AUBERT

Le greffier,

N. CORRAZE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT01405


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT01405
Date de la décision : 05/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme AUBERT
Rapporteur ?: M. Paul AUGER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : LAUNAY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-12-05;13nt01405 ?
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