La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/07/2013 | FRANCE | N°11NT00806

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 05 juillet 2013, 11NT00806


Vu la requête, enregistrée le 11 mars 2011, présentée pour l'association Bréal Autrement, dont le siège est 2, place de la Madeleine à Bréal-sous-Montfort (35310), par Me Moray, avocat au barreau de Paris ; l'association Bréal Autrement demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 08-4496 du 31 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de recettes exécutoire n° 266 du 23 juillet 2008 émis par le maire de Bréal-sous-Montfort afin de recouvrer la somme de 321,48 euros correspondant à la réalisa

tion de 1 786 photocopies de documents pour l'association ;

2°) d'annuler...

Vu la requête, enregistrée le 11 mars 2011, présentée pour l'association Bréal Autrement, dont le siège est 2, place de la Madeleine à Bréal-sous-Montfort (35310), par Me Moray, avocat au barreau de Paris ; l'association Bréal Autrement demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 08-4496 du 31 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de recettes exécutoire n° 266 du 23 juillet 2008 émis par le maire de Bréal-sous-Montfort afin de recouvrer la somme de 321,48 euros correspondant à la réalisation de 1 786 photocopies de documents pour l'association ;

2°) d'annuler ledit titre exécutoire ;

3°) d'annuler les délibérations du 3 octobre 2002 et du 10 décembre 2009 ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Bréal-sous-Montfort une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement attaqué a méconnu les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que le sens des conclusions a été modifié sans explication, sa mise en ligne tardive et que ses demandes ont été rejetées au fond sans explication ; sa demande tendant à la communication des conclusions avant l'audience est restée sans réponse ;

- la délibération du 10 décembre 2009 n'a pas explicitement autorisé le maire à défendre

la commune dans la présente instance ; ladite délibération est entachée d'irrégularité dès lors qu'elle n'a pas été précédée d'une note de synthèse explicative permettant une information préalable des élus ;

- le titre de recettes contesté concerne une prestation réalisée à la suite d'une commande reçu à la mairie le 14 novembre 2007 qui a d'abord donné lieu à un titre de recette rejeté par le comptable ;

- en 2007, aucune délibération n'a été publiée au recueil des actes administratifs de la commune pour déterminer le tarif des photocopies ; la délibération du 5 octobre 2006 produite n'a pas été publiée et ne prévoit pas de prix en ce qui concerne les photocopies des documents administratifs mais se borne à prévoir un prix de photocopie recto de 0,056 euros pour les associations ;

- en l'absence de délibération régulièrement publiée, le maire ne pouvait recevoir le prix de photocopies de documents administratifs ;

- la délibération de 2002 visée dans le titre de recettes n'a jamais été publiée et ne traite pas du prix des photocopies des documents administratifs ;

- le tribunal ne pouvait faire référence à une délibération du 28 mai 2008 fixant à 0,18 centimes d'euros le prix d'une photocopie d'un document administratif pour justifier le titre de recette dès lors que le fait générateur remonte à 2007 ;

- la délibération du 28 mai 2008 n'est pas opposable à l'association dès lors qu'elle n'a pas été portée à la connaissance des habitants de la commune dans le recueil des actes administratifs ;

- le maire ne justifie pas de la réalité des 1 786 photocopies dont il réclame le paiement ; la remise matérielle des photocopies n'a pas été faite contre décharge ;

- à défaut de prix régulièrement établi par une délibération du conseil municipal, le maire ne peut décider arbitrairement du prix de la prestation ; le prix de 0,18 centimes par photocopie excède le coût réel de la prestation au sens de l'article 35 du décret du 30 décembre 2005 ;

- le législateur a instauré un régime spécial pour les photocopies des documents administratifs aux fins de faciliter l'accès à l'information publique ; il a instauré une discrimination positive en faveur des demandeurs puisque le coût réel ne peut tenir compte des charges de personnel ; le maire a appliqué un tarif discriminatoire à l'association et a méconnu le principe de l'égalité des citoyens devant les charges publiques ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 31 mai 2011, présenté pour la commune de Bréal-sous-Montfort, par Me Lahalle, avocat au barreau de Rennes, tendant au rejet de la requête et au paiement par l'association Bréal Autrement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- seul le sens des conclusions doit être transmis aux parties et non les conclusions dans leur intégralité ;

- le rapporteur public a mis en ligne une première fois le sens de ses conclusions le 1er novembre 2010, préalablement à l'audience qui devait se tenir le 4 novembre 2010 ; finalement, le tribunal envisageant de soulever deux moyens d'office, a décidé de reporter l'audience au 2 décembre 2010 ; les débats ont été rouverts et les parties ont présenté de nouveaux mémoires ; dans ces conditions le rapporteur public pouvait, sans que la procédure juridictionnelle soit viciée, modifier le sens de ses conclusions et en informer les parties, ainsi qu'il l'a fait, le 30 novembre 2010 ; le sens des conclusions ayant été mis en ligne deux jours avant l'audience, les parties pouvaient en débattre ; de plus, les parties avaient la possibilité de présenter une note en délibéré postérieurement au prononcé des conclusions du rapporteur public lors de l'audience ;

- contrairement à ce qu'affirme la requérante, le maire était habilité à défendre la commune dans cette affaire ; le numéro et l'objet de la requête sont repris dans la délibération ; l'association Bréal Autrement est l'association de l'opposition dont M. B... est le leader ; les conseillers municipaux étaient parfaitement informés de l'objet de la délibération et des liens entre l'association et M. B... ;

- contrairement à ce que soutient la requérante, la délibération du 3 décembre 2009 a été précédée d'une note de synthèse explicative ;

- la commune doit être regardée comme apportant la preuve du bien-fondé du titre exécutoire dès lors que, par un courrier du 6 novembre 2007, la présidente de l'association a demandé la communication des trois derniers comptes administratifs et comptes de gestion de la commune, ce qui représente un nombre important de photocopies ;

- contrairement à ce qu'affirme l'association, elle a eu communication du coût des photocopies ; en tout état de cause, le Conseil d'Etat a fixé le principe selon lequel si le demandeur ne manifeste pas le refus de prendre en charge les frais associés aux photocopies, l'autorité compétente est dans l'obligation de les délivrer ;

- l'association ne peut bénéficier du tarif prévu par la délibération du 5 octobre 2006 qui concerne les associations auxquelles un photocopieur est mis à disposition et non les photocopies réalisées par le personnel municipal ; le tarif applicable est de 0,18 euros tel que fixé par l'arrêté ministériel du 1er octobre 2001 et repris par la délibération du 28 mai 2008 ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 juin 2011, présenté pour l'association Bréal Autrement tendant aux mêmes fins que la requête et portant la somme demandée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à 3 500 euros ;

L'association soutient en outre que la commune, à qui incombe la charge de la preuve, n'a pas produit de décompte contradictoire ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2011, présenté pour la commune de Bréal-sous-Montfort, tendant aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 décembre 2011, présenté pour l'association Bréal

Autrement tendant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens et demandant en outre à la cour, à titre subsidiaire, d'annuler la délibération du 28 mai 2008 en ce qu'elle a fixé le prix de 0,18 centimes pour la photocopie des documents administratifs ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 janvier 2012, présenté pour la commune de Bréal-sous-Montfort, tendant aux mêmes fins que dans ses précédentes écritures par les mêmes moyens ;

La commune soutient en outre que les conclusions dirigées contre la délibération du 28 mai 2008 sont irrecevables dès lors qu'il s'agit de conclusions nouvelles en appel et qu'elles sont tardives, la délibération du 28 mai 2008 ayant été affichée et transmise à la préfecture le 4 juin 2008 ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 février 2012, présenté pour l'association Bréal Autrement, tendant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu l'ordonnance en date du 11 septembre 2012 fixant la clôture d'instruction au 1er octobre 2012, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;

Vu le décret n° 2005-1755 du 30 décembre 2005, relatif à la liberté d'accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques, pris pour l'application de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;

Vu l'arrêté du Premier ministre du 1er octobre 2001 relatif aux conditions de fixation et de détermination du montant des frais de copie d'un document administratif ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 juin 2013 :

- le rapport de Mme Tiger, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Martin, rapporteur public ;

- et les observations de MeA..., substituant Me Lahalle, représentant la commune de Breal sous Montfort ;

1. Considérant que l'association Bréal Autrement relève appel du jugement du 31 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de recettes émis le 23 juillet 2008 par le maire de Bréal-sous-Montfort pour le recouvrement de la somme de 321,48 euros correspondant aux frais exposés pour la réalisation de 1 786 photocopies de documents administratifs réalisées pour l'association ;

Sur le bien-fondé du titre de recettes contesté :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 35 du décret n° 2005-1755 du 30 décembre 2005 : " A l'occasion de la délivrance du document, des frais correspondant au coût de reproduction et, le cas échéant, d'envoi de celui-ci peuvent être mis à la charge du demandeur. / Pour le calcul de ces frais sont pris en compte, à l'exclusion des charges de personnel résultant du temps consacré à la recherche, à la reproduction et à l'envoi du document, le coût du support fourni au demandeur, le coût d'amortissement et de fonctionnement du matériel utilisé pour la reproduction du document ainsi que le coût d'affranchissement selon les modalités d'envoi postal choisies par le demandeur. / Les frais autres que le coût de l'envoi postal sont établis dans des conditions fixées par arrêté conjoint du Premier ministre et du ministre du budget. Ils ne peuvent excéder des montants définis dans les mêmes conditions./ L'intéressé est avisé du montant total des frais à acquitter dont le paiement préalable peut être exigé. " ; qu'aux termes de l'article 2 de l'arrêté du Premier ministre du 1er octobre 2001 relatif aux conditions de fixation et de détermination du montant des frais de copie d'un document administratif : " Lorsque les copies de documents sont délivrées sur les supports papier et électronique cités ci-dessous, les frais mentionnés à l'article 2 du décret du 6 juin 2001 susvisé, autres que le coût d'envoi postal, ne peuvent excéder les montants suivants : 0,18 Euro par page de format A 4 en impression noir et blanc ; 1,83 Euro pour une disquette ; 2,75 Euro pour un cédérom. " et qu'il résulte de l'article 1er de ce même arrêté que l'autorité administrative est tenue de prendre une décision fixant le montant des frais mis à la charge de la personne demandant la reproduction d'un document administratif ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement. Pour les décisions individuelles, cette transmission intervient dans un délai de quinze jours à compter de leur signature. " ;

4. Considérant, en premier lieu, que si le titre de recettes du 23 juillet 2008 vise le décret du 6 juin 2001, d'ailleurs abrogé par le décret du 30 décembre 2005 susvisé, l'arrêté du Premier ministre du 1er octobre 2001 ainsi que la délibération du conseil municipal de Bréal-sous-Montfort du 3 octobre 2002, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette dernière, qui n'a au demeurant pas été produite, aurait fait l'objet d'une publication au recueil des actes administratifs de la commune ou d'un affichage ; que, dès lors, cette délibération ne peut constituer la base légale de la créance pour le recouvrement de laquelle a été émis le titre de recettes contesté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que le fait générateur de la créance en cause est né au cours de l'exercice 2007, en raison de la demande du 6 novembre 2007 du président de l'association Bréal Autrement tendant à obtenir une copie des comptes administratifs et des comptes de gestion de la commune relatifs aux exercices 2004, 2005 et 2006 ; qu'ainsi, la délibération réglementaire du conseil municipal de Bréal-sous-Montfort du 28 mai 2008 déterminant les tarifs des photocopies délivrés par la commune aux administrés et aux associations au cours de l'exercice 2008 ne peut rétroactivement fonder le titre de recettes contesté ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la

régularité du jugement attaqué, que l'association Bréal Autrement est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de recettes émis le 23 juillet 2008 par le maire de la commune de Bréal-sous-Montfort ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la l'association Bréal Autrement, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement, à la commune de Bréal-sous-Montfort de la somme demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge cette dernière la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la l'association Bréal Autrement et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 08-4496 du 31 décembre 2010 du tribunal administratif de Rennes et le titre de recettes n° 266 émis le 23 juillet 2008 par le maire de la commune de Bréal-sous-Montfort sont annulés.

Article 2 : La commune de Bréal-sous-Montfort versera à l'association Bréal Autrement une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Bréal-sous-Montfort au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Bréal Autrement et à la commune de Bréal-sous-Montfort.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Tiger, premier conseiller,

- M. Gauthier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 juillet 2013.

Le rapporteur,

N. TIGER Le président,

L. LAINÉ

Le greffier,

N. CORRAZE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 11NT00806


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT00806
Date de la décision : 05/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Nathalie TIGER
Rapporteur public ?: M. MARTIN
Avocat(s) : MORAY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-07-05;11nt00806 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award