Vu l'arrêt avant dire droit du 22 avril 2011 par lequel la cour de céans, à la requête de la société AB Trans tendant à l'annulation du jugement n° 06-2534 du 15 octobre 2009 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser les sommes, assorties des intérêts au taux légal à compter de l'introduction de sa demande de première instance, de :
- 918 752 euros au titre des pertes financières subies dans le cadre de l'exécution d'un marché de transport de farines animales au cours de l'année 2003 et, subsidiairement, 862 000 euros au titre du manque à gagner pour la même période ;
- 2 652 233 euros au titre du manque à gagner subi pour la période du 1er janvier 2004 au 1er janvier 2006 ;
- 100 000 euros au titre des préjudices complémentaires, social, d'image et financier ;
- a, après avoir retenu le principe de responsabilité de l'Etat à raison de l'absence de mise en oeuvre effective de 80 % des bons de commande émis pour la période de juin à décembre 2003, ordonné une expertise afin de déterminer le montant de la marge nette dont la société AB Trans a été privée du fait de la non exécution desdits bons de commande à cette hauteur ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le décret n° 2002-1273 du 18 octobre 2002, relatif aux mesures d'aides financières
aux entreprises intervenant dans la destruction de certains déchets et sous-produits des industries des viandes et des produits de la mer et d'eau douce ;
Vu le décret n° 2003-1363 du 30 décembre 2003, modifiant le décret du 18 octobre 2002 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2013 :
- le rapport de M. Madelaine, faisant fonctions de premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Martin, rapporteur public ;
1. Considérant que, sur le fondement des dispositions de l'article 3 du décret n° 2002-1273 du 18 octobre 2002 susvisé, le préfet de la région Bretagne a attribué, le 7 mai 2003, à la société AB Trans un marché public à bons de commande d'une durée de trois ans en vue du transport de treize lots de farines animales produites en Bretagne et destinées à des sites de stockage à Gand en Belgique et à Rogerville en Seine-Maritime, ou à tout autre site en France ou en Belgique, et lui a notifié, au début du mois de juin 2003, les actes d'engagement ainsi que des bons de commande concernant les lots 1 à 4 et 9 à 13 ; que si lesdits bons de commande prévoyaient le transport de 45 000 tonnes de farines de juin à décembre 2003, d'une part, la société AB Trans n'a été appelée à transporter qu'environ 20 % des quantités de farines animales mentionnées dans les bons de commande qui lui avaient été remis en juin 2003, et, d'autre part, par décision du 31 décembre 2003, le préfet a mis fin au marché, avec effet au 1er janvier 2004 au motif qu'à compter du 31 décembre 2003 le régime de soutien public à l'élimination des farines animales était supprimé pour toutes les farines de la catégorie 3 dites " bas risque ", en vertu du décret n° 2003-1363 du 30 décembre 2003 modifiant le décret précité du 18 octobre 2002 ; que, par un arrêt avant dire droit du 22 avril 2011, la cour de céans a jugé que " la commande de prestations d'un volume très supérieur à celles que le cocontractant de l'administration a effectivement été appelé à réaliser traduit un comportement fautif de nature à engager l'entière responsabilité de l'Etat " et que la société AB Trans " est fondée à demander l'indemnisation de la marge nette dont elle a été privée du fait de l'absence de mise en oeuvre effective à hauteur de 80 % des bons de commande émis pour la période de juin à décembre 2003 " et, estimant qu'elle ne disposait pas des éléments permettant d'apprécier cette marge nette, a ordonné sur ce seul point une expertise comptable complémentaire de celle déjà ordonnée par les premiers juges ; que la cour a écarté le surplus des conclusions de la requérante ; qu'enfin le pourvoi de la société AB Trans et le pourvoi incident du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt contre cet arrêt du 22 avril 2011 ont été rejetés par la décision du Conseil d'Etat du 19 décembre 2012 susvisée ;
2. Considérant qu'il résulte de ce qui a été jugé par l'arrêt de la cour du 22 avril 2011 et la décision du Conseil d'Etat du 19 décembre 2012 que l'indemnisation du préjudice de la société AB Trans doit être limitée à la seule marge nette dont ladite société a été privée sur les prestations de transport de farines animales qui lui ont été commandées par les bons susmentionnés et qui n'ont finalement pas été exécutées ;
3. Considérant que l'expert a évalué à 8 % la marge nette bénéficiaire perdue, sur la
base du chiffre d'affaires prévu pour les 9 lots notifiés entre juin et décembre 2003 dont ont été déduits les coûts direct variables et les coûts directs fixes, ce dont il résulte que l'indemnisation due par l'Etat à la société requérante, pour la part non exécutée des prestations commandées, doit être fixée à la somme de 115 000 euros ; que si la société AB Trans soutient que le montant de cette marge devrait être porté à 125 164 euros, il ressort du rapport de son propre expert comptable, qu'elle produit, que ce dernier montant correspond à la marge nette pour l'ensemble de l'année 2003 sans tenir compte de la part effectivement exécutée des bons de commande et qu'ainsi ce rapport, qui par ailleurs ne peut utilement fonder d'autres chefs de demande déjà écartés par la cour, ne peut être regardé comme contestant pertinemment le montant de la marge nette retenue par l'expert ;
4. Considérant qu'en outre, la société AB Trans a droit aux intérêts au taux légal sur l'indemnité susmentionnée de 115 000 euros à compter du 6 juin 2006, date de l'enregistrement de sa demande devant le tribunal administratif ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de condamner l'Etat à verser à la société AB Trans la somme de 115 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 juin 2006 ;
Sur les frais d'expertise :
6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative les dépens " sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties " ; qu'il résulte du présent arrêt que tant les frais de l'expertise ordonnée par les premiers juges, liquidés à la somme de 12 792,42 euros TTC par ordonnance du président du tribunal administratif de Rennes, que les frais de l'expertise ordonnée par l'arrêt avant dire droit susvisé du 22 avril 2011, liquidés à la somme de 6 194,92 euros TTC par ordonnance du président de la cour de céans, doivent être mis à la charge de l'Etat (ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt) ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société AB Trans et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'Etat versera à la société AB Trans la somme de 115 000 euros (cent quinze mille euros), augmentée des intérêts aux taux légal à compter du 6 juin 2006.
Article 2 : Les frais de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif de Rennes, liquidés à la somme de 12 792,42 euros TTC, et les frais de l'expertise ordonnée par la cour, liquidés à la somme de 6 194,92 euros TTC, sont mis à la charge de l'Etat.
Article 3 : Le jugement n° 06-2534 du tribunal administratif de Rennes du 15 octobre 2009 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à la société AB Trans une somme de 2 000 euros (deux mille euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la société AB Trans est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société AB Trans et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.
Une copie en sera adressée au préfet d'Ille-et-Vilaine, préfet de la région Bretagne.
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N° 09NT02732