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26/07/2012 | FRANCE | N°11NT02240

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 26 juillet 2012, 11NT02240


Vu la requête, enregistrée le 11 août 2011, présentée pour M. et Mme Thierry X, demeurant ..., par Me Guillot, avocat au barreau de Paris ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10-2904 en date du 24 juin 2011 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2007 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versemen

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Vu la requête, enregistrée le 11 août 2011, présentée pour M. et Mme Thierry X, demeurant ..., par Me Guillot, avocat au barreau de Paris ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10-2904 en date du 24 juin 2011 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2007 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 444,04 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...........................................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la construction et de l'habitation;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juillet 2012 :

- le rapport de M. Christien, président-assesseur ;

- et les conclusions de Mme Specht, rapporteur public ;

Considérant que M. et Mme X étaient propriétaires indivis d'un immeuble situé 66 rue Pierre Charron à Paris (75008) ; qu'au titre de l'année 2007, ils ont déclaré un déficit foncier d'un montant de 31 783 euros ; que l'administration a remis en cause, pour la détermination de leur revenu foncier, certaines des charges déduites au titre de l'année 2007 au motif qu'elles n'avaient pas été engagées en vue de l'acquisition ou de la conservation du revenu au sens des dispositions de l'article 13 du code général des impôts ; que M. et Mme X interjettent appel du jugement en date du 24 juin 2011 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2007 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que, par une décision du 20 décembre 2010, postérieure à l'introduction de la demande devant le tribunal administratif, l'administration a prononcé le dégrèvement des impositions contestées à concurrence de la somme de 393 euros en droits et de 44 euros en pénalités ; que, dans cette mesure, la demande des requérants était devenue sans objet ; qu'après avoir pris acte de ce dégrèvement partiel dans les motifs de son jugement, le tribunal administratif a omis, dans son dispositif, de constater qu'il n'y avait pas lieu de statuer dans cette mesure sur la demande ; que le jugement attaqué est, dans cette mesure, irrégulier ; qu'il y a lieu, par suite, de l'annuler en tant qu'il rejette les conclusions de la demande devenues sans objet, d'évoquer ces conclusions et de constater qu'elles sont devenues sans objet ;

Sur les impositions restant en litige :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; et qu'aux termes de l'article R. 57-1 dudit livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ;

Considérant que la proposition de rectification du 20 avril 2009 adressée à M. et Mme X, qui vise les dispositions applicables des articles 14, 29, 31 et du 3° du I de l'article 156 du code général des impôts, indique que l'administration envisage de réintégrer à leurs revenus fonciers de l'année 2007, à l'exception des taxes foncières, les charges qu'ils ont déduites, soit la somme de 89 289 euros, au motif que, le bien ayant été vendu en novembre 2007, elles n'ont pas été engagées en vue de l'acquisition ou de la conservation du revenu mais pour la réalisation d'un gain en capital ; que cette proposition de rectification répond ainsi aux exigences de motivation des articles L. 57 et R. 57 précités ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

Sur le terrain de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 13 du code général des impôts : " Le bénéfice ou revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut (...) sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu " ; qu'aux termes de l'article 28 dudit code : " Le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété " ; et qu'aux termes du I de l'article 31 du même code, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : 1° Pour les propriétés urbaines : a) Les dépenses de réparation et d'entretien effectivement supportés par le propriétaire (...) ; e) les frais de gestion fixés à 20 euros par local (...) " ;

S'agissant de l'indemnité d'éviction :

Considérant que ni l'indemnité versée, en cas de non-renouvellement du bail, au preneur d'un local commercial, ni les indemnités réparatrices de dommages de tous ordres subis par ces locataires du fait de leur éviction, n'entrent dans les charges de propriété énumérées par les dispositions du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts précité ; que, pour déterminer si de telles indemnités trouvent leur contrepartie dans un accroissement du capital immobilier du bailleur ou doivent être regardées comme des dépenses effectuées par lui en vue de l'acquisition ou de la conservation du revenu, au sens du 1 de l'article 13 du même code, ou si lesdites indemnités entrent, le cas échéant, dans l'une ou l'autre de ces catégories selon des proportions à fixer, il y a lieu de tenir compte des circonstances de l'espèce ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les propriétaires indivis de l'immeuble situé 66, rue Pierre Charron avaient, par acte en date du 15 décembre 2005, donné à bail commercial, pour une durée de neuf ans, à la société civile Char-Loc divers locaux situés dans cet immeuble, que celle-ci sous-louait à des tiers ; qu'ils ont décidé, le 30 juillet 2007, la résiliation anticipée du bail, avec effet rétroactif au 30 juin 2007, et versé à la société locataire une indemnité réparatrice du préjudice subi par celle-ci ; que si M. et Mme X soutiennent que l'éviction du locataire leur a permis de percevoir directement les loyers versés par les sous-locataires dont les montants étaient supérieurs, il résulte toutefois des termes même de la convention de résiliation en date du 30 juillet 2007 que la société civile Char-Loc a été informée, dès le 30 décembre 2006, par les propriétaires indivis de leur intention de vendre l'immeuble en cause ; que, par acte du 7 novembre 2007, les propriétaires indivis ont vendu leur immeuble ; que, dès lors, le versement de l'indemnité d'éviction à la société locataire n'a pas été effectué en vue de l'acquisition ou de la conservation du revenu au sens des dispositions précitées de l'article 13 du code général des impôts ; que c'est, par suite, à bon droit que l'administration a remis en cause la déduction de la somme de 11 875 euros à laquelle avaient procédé les requérants au titre de cette indemnité ;

S'agissant des frais de commercialité :

Considérant que M. et Mme X font valoir qu'une partie de l'immeuble en cause, qui était initialement affectée à l'habitation, étant louée irrégulièrement à la société Char-Loc en tant que bureaux commerciaux, les propriétaires indivis, afin de régulariser la situation et de se conformer aux dispositions des articles L. 631-7 et suivants du code de la construction et de l'habitation, ont acheté, le 13 septembre 2006, une commercialité sous la condition suspensive de l'obtention de l'autorisation préfectorale exigée par lesdits articles, d'affecter ces locaux à un autre usage que l'habitation ; qu'ils ont sollicité, le 22 décembre 2006, cette autorisation préfectorale qui leur a été accordée le 27 avril 2007 ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les propriétaires indivis ont informé le 30 décembre 2006 la société Char-Loc de leur intention de vendre l'immeuble ; que s'ils font valoir que cette opération a été réalisée en vue de la conservation de leur revenu, il résulte toutefois de la chronologie des faits qui vient d'être exposée et des termes de la convention du 30 juillet 2007 de résiliation du bail de la société Char-Loc selon laquelle " à la date du 30 décembre 2006, [les propriétaires indivis] ont informé la société Char-Loc de leur intention de vendre l'immeuble sis à Paris, rue Pierre Charron, numéro 66, sous réserve de l'obtention de l'accord de la préfecture de Paris pour transférer la commercialité des locaux situés à Paris, 19, avenue George V au profit de divers locaux de l'immeuble sis à Paris, rue Pierre Charron, numéro 66 ", que l'achat de la commercialité n'a été réalisé que dans le but de vendre ou de faciliter la vente de l'immeuble appartenant pour partie à M. et Mme X ; qu'ainsi la dépense correspondante ne peut être regardée comme déductible au sens des dispositions précitées de l'article 13 du code général des impôts ;

S'agissant des autres dépenses :

Considérant que si M. et Mme X ont déduit de leur revenu foncier une somme de 3 558 euros, ramenée à 2 630 euros par le dégrèvement partiel prononcé par l'administration en première instance, au titre des dépenses d'entretien et de réparation et une somme de 24 euros au titre des autres frais de gestion, il résulte de ce qui vient d'être dit que, dès lors qu'il est établi que l'intention des propriétaires indivis était de vendre l'immeuble en cause, ces charges ne peuvent pas être regardées comme ayant le caractère de dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu au sens des dispositions précitées de l'article 13 du code général des impôts et ne sont, par suite, pas déductibles du revenu foncier perçu par les époux X ;

Sur le terrain de la doctrine administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 80 B du même livre : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal " ;

Considérant, d'une part, que M. et Mme X ne sont pas fondés à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des documentations administratives 5 D-211 du 15 septembre 1993 et 5 D-2229 du 1er septembre 1993 ainsi que de l'instruction du 23 mars 2007 référencée 5 D-2-07 qui ne contiennent pas d'interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il vient d'être fait application ;

Considérant, d'autre part, que si M. et Mme X entendent se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, du dégrèvement partiel prononcé par l'administration en première instance, cette décision n'est pas motivée et ne peut, de ce fait, constituer une prise de position formelle de l'administration fiscale sur l'appréciation de leur situation au regard des dispositions du I de l'article 31 du code général des impôts ; qu'ils ne sont pas davantage fondés à se prévaloir de la position prise par l'administration à l'égard des autres propriétaires indivis de l'immeuble

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations restant en litige ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. et Mme X demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé en date du 24 juin 2011 du tribunal administratif d'Orléans est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. et Mme X tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2007 à concurrence de la somme de 437 euros.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer, à concurrence de la somme de 437 euros, sur les conclusions de la demande de M. et Mme X.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Thierry X et au ministre de l'économie et des finances.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11NT02240
Date de la décision : 26/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme MASSIAS
Rapporteur ?: M. Robert CHRISTIEN
Rapporteur public ?: Mme SPECHT
Avocat(s) : GUILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-07-26;11nt02240 ?
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