La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/06/2012 | FRANCE | N°11NT02904

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 07 juin 2012, 11NT02904


Vu la requête, enregistrée le 9 novembre 2011, présentée pour M. Mounir X, demeurant ..., par Me Gouedo, avocat au barreau de Laval ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106802 du 6 octobre 2011 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Mayenne en date du 15 juin 2011 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ;


4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, Me Gouedo, qui renonce à ...

Vu la requête, enregistrée le 9 novembre 2011, présentée pour M. Mounir X, demeurant ..., par Me Gouedo, avocat au barreau de Laval ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106802 du 6 octobre 2011 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Mayenne en date du 15 juin 2011 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, Me Gouedo, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

...........................................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

Vu le protocole relatif à la gestion concertée des migrations entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République tunisienne signé à Tunis le 28 avril 2008 et publié par le décret n° 2009-905 du 24 juillet 2009 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 avril 2012 :

- le rapport de Mlle Wunderlich, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Specht, rapporteur public ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence. " ; qu'aux termes de l'article R. 611-1 du même code : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 775-4, alors en vigueur, inséré au chapitre V " Le contentieux des décisions relatives au séjour assorties d'une obligation de quitter le territoire français " de ce code par le décret n° 2006-1708 du 23 décembre 2006 : " Le président de la formation de jugement peut, dès l'enregistrement de la requête, faire usage du pouvoir prévu au premier alinéa de l'article R. 613-1 de fixer la date à laquelle l'instruction sera close. Il peut, par la même ordonnance, fixer la date et l'heure de l'audience au cours de laquelle l'affaire sera appelée. Dans ce cas, l'ordonnance tient lieu de l'avertissement prévu à l'article R. 711-2. " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 613-1 du même code : " Le président de la formation de jugement peut, par une ordonnance, fixer la date à partir de laquelle l'instruction sera close. Cette ordonnance n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. (...) " et qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 613-3 : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction. " ; qu'enfin, il est prévu à l'article R. 613-4 de ce code que : " Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. Cette décision est notifiée dans les mêmes formes que l'ordonnance de clôture. / La réouverture de l'instruction peut également résulter d'un jugement ou d'une mesure d'investigation ordonnant un supplément d'instruction. / Les mémoires qui auraient été produits pendant la période comprise entre la clôture et la réouverture de l'instruction sont communiqués aux parties. " ;

Considérant qu'il résulte de l'examen du dossier de première instance que la demande présentée pour M. X, tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Mayenne en date du 15 juin 2011 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois, a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Nantes le 13 juillet 2011 ; que, faisant usage des pouvoirs que lui conférait l'article R. 775-4 précité du code de justice administrative, le président de ce tribunal a, par ordonnance en date du 19 juillet 2011, d'une part, fixé la clôture de l'instruction au 25 août 2011 à 12h00, d'autre part, inscrit l'affaire au rôle de l'audience publique du 22 septembre 2011 à 9h30 ; que le mémoire en défense du préfet de la Mayenne, produit le 22 août 2011, a été communiqué au conseil du requérant le 24 août 2011, soit la veille de la clôture de l'instruction ; que le délai dont a ainsi disposé M. X pour prendre connaissance de ce mémoire et éventuellement y répondre n'a pas été suffisant pour que le principe du contradictoire soit regardé comme ayant été respecté à son égard ; que M. X est, par suite, fondé à soutenir que le jugement attaqué est intervenu au terme d'une procédure irrégulière et à en demander, pour ce motif, l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Mayenne en date du 15 juin 2011 :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-tunisien susvisé : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention "salarié". / Après trois ans de séjour régulier en France, les ressortissants tunisiens visés à l'alinéa précédent peuvent obtenir un titre de séjour de dix ans. Il est statué sur leur demande en tenant compte des conditions d'exercice de leurs activités professionnelles et de leurs moyens d'existence. Les dispositions du deuxième alinéa de l'article 1er sont applicables pour le renouvellement du titre de séjour après dix ans. / Les autres ressortissants tunisiens ne relevant pas de l'article 1er du présent Accord et titulaires d'un titre de séjour peuvent également obtenir un titre de séjour d'une durée de dix ans s'ils justifient d'une résidence régulière en France de trois années. Il est statué sur leur demande en tenant compte des moyens d'existence professionnels ou non, dont ils peuvent faire état et, le cas échéant, des justifications qu'ils peuvent invoquer à l'appui de leur demande. / Ces titres de séjour confèrent à leurs titulaires le droit d'exercer en France la profession de leur choix. Ils sont renouvelables de plein droit. " ; qu'aux termes de l'article 2 du protocole susvisé en date du 28 avril 2008 : " (...) 2.3. : Migration pour motifs professionnels (...) 2.3.3. Le titre de séjour portant la mention "salarié", prévu par le premier alinéa de l'article 3 de l'Accord du 17 mars 1988 modifié, est délivré à un ressortissant tunisien en vue de l'exercice, sur l'ensemble du territoire français, de l'un des métiers énumérés sur la liste figurant à l'Annexe I du présent Protocole, sur présentation d'un contrat de travail visé par l'autorité française compétente sans que soit prise en compte la situation de l'emploi. (...) " ; qu'aux termes de l'article 11 du même accord : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent Accord, dans les conditions prévues par sa législation. " ;

Considérant, par ailleurs, qu'aux termes de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. " ; que ces dispositions s'appliquent aux ressortissants tunisiens désireux d'obtenir le titre de séjour portant la mention "salarié" prévu par le premier alinéa de l'article 3 précité de l'accord du 17 mars 1988 modifié ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, ressortissant tunisien auquel la délivrance d'un visa de long séjour en qualité de travailleur a été refusée par décision du vice-consul de France à Tunis en date du 26 avril 2007, a sollicité le 13 mai 2011 du préfet de la Mayenne la délivrance du titre de séjour portant la mention "salarié" prévu à l'article 3 précité de l'accord franco-tunisien en se prévalant d'une promesse d'embauche en qualité de chef d'équipe du BTP ; qu'il est constant qu'il est entré le 17 mai 2010 sur le territoire muni de son passeport en cours de validité revêtu d'un visa touristique de 7 jours délivré le 13 mai 2010 par les autorités consulaires italiennes ; qu'il ne remplit dès lors pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance du titre de séjour portant la mention "salarié" en vertu de la combinaison des stipulations et dispositions précitées des articles 3 de l'accord franco-tunisien, 2.3.3. du protocole du 28 avril 2008 et L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'intéressé ne saurait, par suite, utilement soutenir qu'il n'appartenait pas au préfet de la Mayenne, lequel pouvait légalement refuser, au seul motif tiré du défaut de présentation d'un visa de long séjour, de lui délivrer le titre de séjour sollicité, de vérifier qu'il justifiait des qualifications professionnelles adaptées à l'emploi qu'il se proposait d'occuper, la direction départementale du travail et de l'emploi étant seule compétente pour ce faire lors de l'examen du contrat de travail, qu'il a justifié de ses compétences dans le domaine de la maçonnerie ou que les difficultés de recrutement de l'entreprise qui se propose de l'embaucher sont établies ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; que M. X, né en 1972, célibataire et sans enfant, fait valoir qu'il demeure chez sa soeur et son beau-frère, " avec lesquels il a des liens affectifs particuliers ", et qu'il n'a désormais plus d'emploi en Tunisie alors qu'une offre lui est faite en France ; que, que compte tenu, notamment, des conditions et de la durée de son séjour sur le territoire, l'intéressé, qui n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 38 ans, n'est pas fondé à soutenir qu'en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet de la Mayenne a méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de la Mayenne en date du 15 juin 2011 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions tendant à ce que la cour enjoigne au préfet de la Mayenne de lui délivrer un titre de séjour, ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au profit de l'avocat de M. X, bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes en date du 6 octobre 2011 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Nantes et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Mounir X et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise à Me Gouedo et au préfet de la Mayenne.

''

''

''

''

N° 11NT029042

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11NT02904
Date de la décision : 07/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MASSIAS
Rapporteur ?: Mme Anne-Catherine WUNDERLICH
Rapporteur public ?: Mme SPECHT
Avocat(s) : GOUEDO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-06-07;11nt02904 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award