Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2007, présentée pour M. Goran X, demeurant ..., par Me Khalifa Adjas, avocat au barreau de Paris ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 07-4186 du 23 novembre 2007 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Orléans a, d'une part, rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet d'Indre-et-Loire, en date du 19 novembre 2007, ordonnant sa reconduite à la frontière et, d'autre part, transmis au tribunal, pour qu'il y soit statué, ses conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de séjour qui aurait été prise simultanément par le même préfet ;
2°) d'annuler ledit arrêté et ladite décision ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Indre-et-Loire de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros à compter de la demande initiale du requérant ;
4°) de condamner l'État à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la décision du 3 septembre 2007 par laquelle le président de la Cour a délégué M. Looten pour statuer sur les appels interjetés contre les jugements rendus par les présidents de tribunaux administratifs ou leurs délégués en matière de reconduite à la frontière ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 2000-231 du 12 avril 2000, modifiée, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
Vu la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration ;
Vu le décret n° 2006-1708 du 23 décembre 2006 modifiant la partie réglementaire du code de justice administrative ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mars 2008 :
- le rapport de M. Looten, magistrat délégué ;
- et les conclusions de M. Geffray, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'il ressort des mentions mêmes de l'arrêté contesté, en date du 19 novembre 2007, que, par cet arrêté, le préfet d'Indre-et-Loire s'est borné à ordonner la reconduite à la frontière de M. X, sans statuer sur une quelconque demande de titre de séjour qui lui aurait été présentée par l'intéressé ; que, dès lors, le moyen soulevé par le requérant et tiré de ce qu'il devait être statué simultanément sur la légalité des décisions de reconduite à la frontière et de refus de titre de séjour qui seraient contenues dans ledit arrêté du 19 novembre 2007 est inopérant ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes du II de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa , à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité serbe, est entré en France, le 15 juin 2002, et s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa sans être titulaire d'un titre de séjour ; qu'il entrait, ainsi, dans le champ d'application de la disposition précitée ;
En ce qui concerne la légalité externe :
Considérant que, si le requérant soutient que la motivation de l'arrêté contesté est stéréotypée, ledit arrêté, qui comporte l'exposé des faits et des considérations de droit sur lesquels il se fonde, est suffisamment motivé ; que le préfet n'était pas tenu de préciser en quoi la situation particulière de l'intéressé ne faisait pas obstacle au prononcé de la mesure d'éloignement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi nº 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...) - Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : - (...) 3º Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière ; qu'il résulte de l'ensemble des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatives à la reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière, et notamment des articles L. 511-1 à L. 511-4 et L. 512-1 à L. 512-4, qui ouvrent un recours suspensif devant le juge administratif, organisent les garanties dont bénéficie l'étranger pour pouvoir exercer utilement ledit recours et fixent les délais dans lesquels ces recours doivent être présentés et jugés, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des arrêtés de reconduite à la frontière et, ainsi, exclure l'application des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 selon lesquelles les décisions qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé a été mis à même de présenter des observations écrites ou orales ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté préfet d'Indre-et-Loire décidant la reconduite à la frontière de M. X serait illégal faute d'avoir été précédé du recueil des observations de l'intéressé doit être écarté ;
Considérant que le moyen tiré du défaut de consultation de la commission du titre de séjour est inopérant à l'encontre d'un arrêté ne portant pas refus de délivrance d'un titre de séjour ;
En ce qui concerne la légalité interne :
Considérant que, si à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X fait valoir qu'il réside en France depuis juin 2002, que son épouse l'y a rejoint en février 2003, que le couple a trois filles, la dernière étant née en France et les deux aînées étant scolarisées, il ressort des pièces du dossier, d'une part, que son épouse, de même nationalité, est elle-même en situation irrégulière, d'autre part, qu'il ne démontre pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 30 ans, et que, dans ces conditions, sa vie familiale peut se poursuivre en Serbie ; que, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de la durée et des conditions de son séjour en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été prise ; qu'en le prenant, le préfet n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale » ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que M. X et son épouse sont en situation irrégulière en France ; que rien ne s'oppose à ce que les enfants de M. X, âgés de 10, 7 et 3 ans, repartent avec leurs parents, les aînées pouvant poursuivre leur scolarité en Serbie ; que, dès lors, en prenant l'arrêté contesté, le préfet d'Indre-et-Loire n'a pas méconnu les stipulations susmentionnées de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L.513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant à l'encontre de l'arrêté contesté du 19 novembre 2007, qui ne fixe pas le pays de destination ;
Sur la légalité de la décision de refus de séjour :
Considérant qu'il ressort des mentions mêmes de l'arrêté contesté, en date du 19 novembre 2007, que, par cet arrêté, le préfet d'Indre-et-Loire ordonnait seulement la reconduite à la frontière de M. X, sans statuer sur une quelconque demande de titre de séjour qui lui aurait été présentée par l'intéressé ; que, dès lors, les conclusions présentées par le requérant tendant à l'annulation de la décision de refus de séjour qui serait contenue dans l'arrêté contesté du 19 novembre 2007 sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin de régularisation de la situation administrative de l'intéressé :
Considérant que le présent arrêt, qui rejette la demande de M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint sous astreinte au préfet d'Indre-et-Loire de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Goran X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. Une copie sera transmise au préfet d'Indre-et-Loire.
N° 07NT03727
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