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18/10/2007 | FRANCE | N°06NT01548

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 18 octobre 2007, 06NT01548


Vu, I, sous le n° 06NT01548, la requête, enregistrée le 17 août 2006, présentée pour Mme Aline X, demeurant ..., par Me Thouroude, avocat au barreau de Caen ; Mme Aline X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 03-1745 du 15 juin 2006 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a condamné le centre hospitalier général de Lannion à lui payer la somme de 12 000 euros en réparation du préjudice résultant de l'intervention du 18 mai 2000, en tant que cette somme est insuffisante ;

2°) de condamner le centre hospitalier général de Lannion à lui payer l

a somme de 62 625,85 euros en réparation de ce préjudice, avec intérêts à compt...

Vu, I, sous le n° 06NT01548, la requête, enregistrée le 17 août 2006, présentée pour Mme Aline X, demeurant ..., par Me Thouroude, avocat au barreau de Caen ; Mme Aline X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 03-1745 du 15 juin 2006 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a condamné le centre hospitalier général de Lannion à lui payer la somme de 12 000 euros en réparation du préjudice résultant de l'intervention du 18 mai 2000, en tant que cette somme est insuffisante ;

2°) de condamner le centre hospitalier général de Lannion à lui payer la somme de 62 625,85 euros en réparation de ce préjudice, avec intérêts à compter de la demande d'indemnité ;

3°) de condamner le centre hospitalier général de Lannion à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu, II, sous le n° 06NT01549, la requête et le mémoire, enregistrés les 18 août et 25 septembre 2006, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION, dont le siège est BP 248 à Lannion (22203), représenté par son directeur en exercice, par Me Le Prado, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 03-1745 du 15 juin 2006 par lequel le Tribunal administratif de Rennes l'a condamné à payer à Mme Aline X la somme de 12 000 euros en réparation du préjudice résultant de l'intervention du 18 mai 2000 ;

2°) de rejeter la demande de Mme X devant le Tribunal administratif de Rennes ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de la sécurité sociale, notamment son article L. 376-1 modifié par l'article 25 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 septembre 2007 :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort, rapporteur ;

- les observations de Me Demailly, substituant Me Le Prado, avocat du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION ;

- et les conclusions de M. Millet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées nos 06NT01548 et 06NT01549 sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) des Côtes-d'Armor :

Considérant que, dans son mémoire enregistré au greffe du Tribunal administratif de Rennes le 1er juillet 2003, la CPAM des Côtes-d'Armor a expressément conclu à la condamnation de Mme X à lui rembourser les prestations exposées à l'occasion de son hospitalisation au CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION ; que si la caisse prétend que c'est par suite d'une erreur matérielle qu'elle demandait la condamnation de son assurée et non pas du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION, cette erreur lui est entièrement imputable alors qu'elle avait la possibilité de la rectifier en première instance ; que les conclusions de la caisse dirigées contre le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION constituent une demande nouvelle présentée en appel ; qu'elles ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

Sur la régularité du jugement du Tribunal administratif de Rennes :

Considérant, en premier lieu, que si le montant des conclusions indemnitaires de Mme X visé par le jugement attaqué est de 62 625,85 F (9 547,25 euros) alors que la demande de la requérante les chiffrait en réalité à 62 625,85 euros, le montant de l'indemnité que le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION a été condamné à lui payer par le Tribunal administratif de Rennes est de 12 000 euros ; qu'ainsi, cette erreur matérielle est sans conséquence sur la régularité du jugement rendu ;

Considérant, en deuxième lieu, que Mme X soutenait devant le tribunal que la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION était engagée à son égard sur le fondement, notamment d'un défaut d'information quant aux risques résultant d'une intervention qui serait effectuée dans le cadre de la coelioscopie à visée exploratrice et de l'absence de consentement de la requérante pour effectuer l'exérèse des foyers d'endométriose ; qu'elle fait valoir qu'en prononçant la condamnation de cet établissement au seul motif que celui-ci avait commis deux maladresses fautives dans l'exécution des interventions des 18 et 21 mai 2000, les premiers juges ont omis de statuer sur l'ensemble de ses conclusions ; que, toutefois, dès lors que ce fondement de responsabilité était de nature à ouvrir droit à lui seul à l'indemnisation des dommages subis par Mme X, ils n'étaient pas tenus d'examiner les autres fondements soulevés par Mme X dans sa demande ; qu'ils n'ont donc entaché le jugement d'aucune irrégularité sur ce point ;

Considérant, enfin, qu'en se référant à l'instruction, notamment au rapport d'expertise et en relevant que Mme X avait été victime d'une maladresse fautive du chirurgien commise à l'occasion d'une opération couramment pratiquée, le Tribunal administratif de Rennes a suffisamment motivé son jugement ; que ce moyen doit être écarté ;

Sur la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION :

Considérant que Mme X a été admise le 18 mai 2000 au CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION pour des douleurs pelviennes ; qu'une coelioscopie a été réalisée le lendemain matin au cours de laquelle ont été effectuées l'ablation d'un kyste de l'ovaire droit et l'exérèse de deux foyers d'endométriose ; qu'une péritonite ayant été diagnostiquée le 21 mai suivant, une nouvelle intervention a eu lieu ce jour par laparotomie ; qu'il a été constaté à cette occasion une plaie de 3 centimètres de long sur la face antérieure du haut rectum qui a été suturée ; qu'enfin, une troisième intervention s'est révélée nécessaire le 25 mai 2000 en raison d'une occlusion intestinale causée par le retournement et l'adhérence du grand épiploon sur la partie gauche du colon ; que ces complications ont justifié l'hospitalisation de la patiente jusqu'au 24 juin 2000 ; qu'une colostomie a été mise en place jusqu'au 24 novembre 2000 ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés du Tribunal administratif de Rennes, que la perforation de la face antérieure du rectum subie par Mme X est intervenue, non pas au décours de l'électro-coagulation qui a suivi l'exérèse de l'un des foyers d'endométriose dont la présence avait été constatée au cours de la coelioscopie pratiquée le 19 mai 2000 au CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION, mais lors de l'introduction de l'un des trocarts nécessaires à la mise en oeuvre d'une coelioscopie ; que la survenance de cette plaie, alors qu'aucune difficulté opératoire ou anatomique n'est mentionnée dans le compte rendu de l'intervention, a pour origine une maladresse dans l'exécution de la manoeuvre d'introduction d'un trocart, constitutive, dans les circonstances de l'espèce, d'une faute médicale de nature à engager la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION ;

Considérant, en outre, nonobstant les termes nuancés employés sur ce point par l'expert, qu'il résulte également de l'instruction que le retournement et l'adhérence du grand épiploon susmentionnés proviennent d'une négligence dans le rangement de cet organe au moment de l'intervention du 21 mai 2000 ; que, dès lors, le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION n'est pas fondé à soutenir que ces faits ne constitueraient pas une nouvelle faute médicale ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes l'a condamné à payer à Mme X la somme de 12 000 euros en réparation du préjudice résultant de l'intervention du 18 mai 2000 ;

Sur le préjudice :

Considérant que Mme X ne conteste pas le montant de 2 625,85 euros alloué par le Tribunal administratif de Rennes au titre de la perte de revenus qu'elle a subie ;

Considérant qu'en évaluant à 6 000 euros le préjudice de Mme X résultant des souffrances physiques endurées, fixées par l'expert à 3,5 sur une échelle de 7 et du préjudice esthétique fixé à 2 sur la même échelle, les premiers juges en ont fait une évaluation insuffisante ; que ces deux chefs de préjudice doivent être réparés par les sommes, respectivement, de 6 000 euros et de 3 000 euros ; que de même, résultant des fautes commises par le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION, les troubles dans les conditions d'existence de l'intéressée, qui a supporté deux opérations chirurgicales qui ne sont pas la conséquence directe de l'affection dont elle souhaitait être soignée ainsi qu'une colostomie et n'a pu travailler jusqu'au 31 janvier 2001, justifient l'allocation d'une somme de 9 000 euros au lieu de 3 374,14 euros comme l'a estimé le Tribunal administratif de Rennes ; qu'en revanche, il résulte des propres pièces produites par Mme X qu'elle a été licenciée pour cause économique par suite de la fermeture d'un magasin exploité par son employeur ; qu'elle n'établit pas que son indisponibilité consécutive aux complications liées à son hospitalisation, aurait été à l'origine de son licenciement ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a limité à 12 000 euros la somme que le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION a été condamné à lui payer en réparation du préjudice subi ; que cette somme doit être portée à 20 625,85 euros ;

Sur les intérêts :

Considérant que Mme X a droit aux intérêts de la somme de 20 625,85 euros à compter du 6 février 2003, date de la réception par le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION de sa demande d'indemnité ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance par rapport à la CPAM des Côtes-d'Armor, soit condamné à payer à cette dernière la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION à payer à Mme X une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 12 000 euros (douze mille euros), que le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION a été condamné à payer à Mme X par l'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Rennes du 15 juin 2006 est portée à 20 625,85 euros (vingt mille six cent vingt-cinq euros et quatre-vingt-cinq centimes). Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 6 février 2003.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Rennes du 15 juin 2006 est réformé en ce qu'il est contraire à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : La requête du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION, le surplus des conclusions de la requête de Mme X et les conclusions de la CPAM des Côtes-d'Armor sont rejetés.

Article 4 : Le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION versera à Mme X une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Aline X, au CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE LANNION, à la CPAM des Côtes-d'Armor et au ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 06NT01548
Date de la décision : 18/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LOOTEN
Rapporteur ?: M. Philippe D IZARN de VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : HERVE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2007-10-18;06nt01548 ?
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