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27/03/2007 | FRANCE | N°05NT01700

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 27 mars 2007, 05NT01700


Vu la requête, enregistrée le 21 octobre 2005, présentée pour la SA FLORY DEVELOPPEMENT, qui a son siège 4, rue du Mans, à Cholet (49300), par Me Moyne, avocat au barreau de Nantes ; la SA FLORY DEVELOPPEMENT demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n°s 00-3191 et 03-1705 en date du 13 juillet 2005 du Tribunal administratif de Nantes en tant qu'il a rejeté les conclusions de ses demandes tendant à la décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1994, 1995, 1996 et

1999, d'autre part, des cotisations supplémentaires de contributions for...

Vu la requête, enregistrée le 21 octobre 2005, présentée pour la SA FLORY DEVELOPPEMENT, qui a son siège 4, rue du Mans, à Cholet (49300), par Me Moyne, avocat au barreau de Nantes ; la SA FLORY DEVELOPPEMENT demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n°s 00-3191 et 03-1705 en date du 13 juillet 2005 du Tribunal administratif de Nantes en tant qu'il a rejeté les conclusions de ses demandes tendant à la décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1994, 1995, 1996 et 1999, d'autre part, des cotisations supplémentaires de contributions forfaitaires sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1999, à raison de la valorisation en stocks d'une fraction des frais de conception de ses modèles et de la remise en cause des crédits d'impôt-recherche déclarés et imputés par l'intéressée ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions susmentionnées ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mars 2007 :

- le rapport de M. Martin, rapporteur ;

- les observations de Me Moyne, avocat de la société FLORY DEVELOPPEMENT ;

- et les conclusions de M. Hervouet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SA Le Callonec Murier, qui exerçait l'activité de conception, fabrication et commercialisation de vêtements professionnels, dits vêtements d'image, à l'intérieur d'un groupe fiscalement intégré dont la SA FLORY DEVELOPPEMENT était la société mère, a fait l'objet de deux vérifications de comptabilité qui ont porté, en matière d'impôt sur les sociétés, sur les exercices clos en 1994, 1995, 1996, 1998 et 1999 ; qu'à l'issue de ces contrôles, des redressements lui ont été notifiés procédant notamment, d'une part, de l'intégration dans le prix de revient de ses produits et travaux en cours d'une fraction de ses dépenses consacrées à la conception de nouveaux modèles de vêtements ainsi que des honoraires qu'elle versait à des stylistes extérieurs, d'autre part, de la remise en cause de l'imputation sur ses cotisations d'impôt sur les sociétés dues au titre des exercices vérifiés de crédits d'impôt-recherche ; que la SA FLORY DEVELOPPEMENT a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 1994, 1995, 1996 et 1999 en conséquence desdits redressements ;

Sur la valorisation des stocks :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a expliqué de façon suffisamment précise, dans la première notification de redressements qu'il a adressée à la SA Le Callonec Murier, le 17 décembre 1997, le mode de calcul des redressements litigieux ainsi que les motifs du choix de ce mode de calcul ; que, dans la seconde notification datée du 14 décembre 2001, il a rappelé ce mode de calcul et indiqué pourquoi il en faisait à nouveau application ; qu'ainsi, quelle que soit la pertinence des motifs exposés par le vérificateur, la SA Le Callonec Murier a été mise à même de présenter des observations de façon entièrement utile sur ce mode de calcul ; que, par suite, le moyen tiré par la société requérante de ce que l'administration aurait méconnu sur ce point les dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales doit être écarté ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209-1 du même code : “1 (…) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises (…) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (…) 3. Pour l'application des 1 et 2, les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient. Les travaux en cours sont évalués au prix de revient” ; qu'aux termes de l'article 38 ter de l'annexe III audit code : “Le stock est constitué par l'ensemble des marchandises, des matières premières, des matières et fournitures consommables, des productions en cours, des produits intermédiaires, des produits finis, des produits résiduels et des emballages non destinés à être récupérés, qui sont la propriété de l'entreprise à la date de l'inventaire et dont la vente en l'état ou au terme d'un processus de production à venir ou en cours permet la réalisation du bénéfice de l'exploitation. Les productions en cours sont les biens ou les services en cours de formation au travers d'un processus de production (…)” ; qu'aux termes de l'article 38 nonies de la même annexe : “Les marchandises, matières premières, matières et fournitures consommables, emballages perdus, produits en stock et productions en cours au jour de l'inventaire sont évalués pour leur coût de revient. Le coût de revient est constitué : (…) pour (…) les productions en cours, par le coût d'achat des matières premières et fournitures consommées, augmentées de toutes les charges directes et indirectes de production à l'exclusion des frais financiers. Ces coûts sont fournis par la comptabilité analytique ou, à défaut, déterminés par des calculs ou des évaluations statistiques” ;

Considérant, en premier lieu, qu'il est constant qu'au cours des exercices vérifiés, une partie des travaux de conception et de dessin des modèles réalisés par la SA Le Callonec Murier au cours d'un exercice concernait des vêtements dont la fabrication industrielle et la commercialisation n'étaient réalisées qu'au cours de l'exercice suivant ; que cette partie de travaux devait être regardée comme entrant dans le processus de production desdits vêtements, au sens de l'article 38 ter précité de l'annexe III au code général des impôts ; que son coût de revient devait être intégré, au titre des productions en cours, au côté des matières premières, des marchandises, des produits intermédiaires et des produits finis, dans celle des stocks de l'entreprise à prendre en compte pour la détermination de son actif net ; que si certains modèles, compte tenu des perspectives de commercialisation, étaient abandonnés et ne donnaient finalement lieu à aucune production, ils étaient, indirectement, par leur seule présence, à l'origine de la réalisation industrielle des vêtements reproduisant les autres modèles ; que, par suite, les frais liés à leur conception présentaient le caractère de charges de production indirectes au sens des dispositions de l'article 38 nonies précité, et devaient être intégrés dans le coût de revient des productions en cours à la clôture de l'exercice ; qu'il n'est pas contesté par l'administration que la SA Le Callonec Murier était en droit de déduire immédiatement les dépenses en litige de ses résultats imposables, nonobstant la perception ultérieure des produits correspondants ; que les redressements en cause procèdent en effet de la seule valorisation de l'actif à concurrence du montant desdites dépenses ; que, dès lors, le moyen tiré par la société de ce qu'elle était en droit de déduire immédiatement ces dépenses, alors même qu'elles constituaient des charges différées, est sans portée utile pour la solution du litige ;

Considérant, en second lieu, que si la SA FLORY DEVELOPPEMENT soutient que le montant des redressements a été calculé par l'administration de façon arbitraire, il résulte de l'instruction que, compte tenu de la diversité des contrats passés par la SA Le Callonec Murier avec ses clients, dont la durée variait entre six mois et trois ans, et en l'absence de comptabilité analytique, le vérificateur était dans l'impossibilité de chiffrer avec précision, à la clôture de chaque exercice, le prix de revient des productions en cours à inclure dans les stocks ; qu'à partir des constatations qu'il avait pu faire dans l'entreprise, il a évalué ce prix de revient à deux douzièmes du montant total des dépenses engagées au cours d'une année par les services de la société affectés aux travaux d'étude et de mise au point des collections ; qu'il a calculé ce montant en prenant en compte les dépenses déclarées par la SA Le Callonec Murier au titre du crédit d'impôt-recherche, qu'il a regardées comme liées à l'élaboration des nouvelles collections, auxquelles il a ajouté les honoraires versés par l'entreprise à des stylistes extérieurs ; que la SA FLORY DEVELOPPEMENT ne fait état d'aucun élément permettant de déterminer les dépenses en cause avec une meilleure précision ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de ce que le montant des redressements n'a pas un caractère excessif ;

Sur le crédit d'impôt-recherche :

Considérant qu'aux termes du II de l'article 244 quater B du code général des impôts : “II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : (…) h. Les dépenses liées à l'élaboration de nouvelles collections exposées par les entreprises industrielles du secteur textile-habillement-cuir et définies comme suit : 1° Les salaires et charges sociales afférents aux stylistes et techniciens des bureaux de style directement et exclusivement chargés de la conception de nouveaux produits (…)” ;

Considérant qu'il appartient au juge de l'impôt de constater, au vu de l'instruction dont le litige qui lui est soumis a fait l'objet, qu'une entreprise remplit ou non les conditions lui permettant de se prévaloir de l'avantage fiscal institué par l'article 244 quater B du code général des impôts ;

Considérant que l'administration a remis en cause le crédit d'impôt-recherche dont la SA Le Callonec Murier avait bénéficié au titre des années litigieuses au motif que, compte tenu des spécificités de l'activité de la société et, en particulier, de l'absence de renouvellement de ses collections à intervalles réguliers et connus d'avance, elle n'entrait pas dans le champ d'application des dispositions précitées ;

Considérant que, comme il a été dit, la SA Le Callonec Murier était spécialisée dans la conception, la fabrication et la commercialisation de vêtements professionnels, dits vêtements d'image, destinés à être vendus à des entreprises ayant le désir de valoriser l'image donnée par leur personnel au travers de ses tenues vestimentaires ; qu'elle passait avec ces entreprises clientes des contrats, d'une durée comprise entre six mois et trois ans, par lesquels elle s'engageait à leur fournir une certaine quantité de vêtements correspondant à des modèles déterminés ; qu'à chaque société cliente correspondait ainsi une collection ; qu'afin de conserver ou d'élargir sa clientèle, la SA Le Callonec Murier était tenue d'élaborer de nouvelles collections tenant compte des évolutions et des tendances de la mode ; qu'il est constant qu'elle disposait à cette fin de stylistes et de modélistes ; que si le renouvellement de ses collections n'était pas régulier mais soumis aux aléas des reconductions de contrats et résultats d'appels d'offre, cette circonstance est sans incidence sur la solution du litige dès lors que, contrairement à ce que soutient l'administration, les dispositions précitées du h du II de l'article 244 quater B du code général des impôts ne conditionnent pas le bénéfice du crédit d'impôt-recherche au renouvellement des collections à intervalles réguliers et connus d'avance ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête relatifs à ce chef de redressement, la SA FLORY DEVELOPPEMENT est fondée à soutenir qu'elle était en droit de bénéficier du crédit d'impôt-recherche en application des dispositions précitées du h du II de l'article 244 quater B du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA FLORY DEVELOPPEMENT est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté la totalité de sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner l'Etat à payer à la SA FLORY DEVELOPPEMENT une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La SA FLORY DEVELOPPEMENT est déchargée des compléments d'impôt sur les sociétés et de contributions forfaitaires sur cet impôt auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1994, 1995, 1996 et 1999 à la suite de la remise en cause de son droit à bénéficier de crédits d'impôt-recherche.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Nantes en date du 13 juillet 2005 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la SA FLORY DEVELOPPEMENT est rejeté.

Article 4 : L'Etat versera à la SA FLORY DEVELOPPEMENT une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société FLORY DEVELOPPEMENT et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

N° 05NT01700

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 05NT01700
Date de la décision : 27/03/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LEMAI
Rapporteur ?: M. Luc MARTIN
Rapporteur public ?: M. HERVOUET
Avocat(s) : MOYNE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2007-03-27;05nt01700 ?
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