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29/12/2006 | FRANCE | N°06NT01963

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Reconduite a la frontiere, 29 décembre 2006, 06NT01963


Vu la requête, enregistrée le 20 novembre 2006, présentée pour M. Feridun X, demeurant ..., par Me Olivier Renard, avocat au barreau de Nantes ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 06-4155 du 17 octobre 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Morbihan, en date du 12 octobre 2006, décidant sa reconduite à la frontière et fixant la Turquie comme pays à destination duquel l'intéressé devait être reconduit ;

2°) d'annuler cet

arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Morbihan de lui délivrer un titre de séjour ...

Vu la requête, enregistrée le 20 novembre 2006, présentée pour M. Feridun X, demeurant ..., par Me Olivier Renard, avocat au barreau de Nantes ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 06-4155 du 17 octobre 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Morbihan, en date du 12 octobre 2006, décidant sa reconduite à la frontière et fixant la Turquie comme pays à destination duquel l'intéressé devait être reconduit ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Morbihan de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 5 septembre 2005 par laquelle le président de la Cour a délégué Mme Perrot pour statuer sur les appels interjetés contre les jugements rendus par les présidents de tribunaux administratifs ou leurs délégués en matière de reconduite à la frontière ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 décembre 2006 :

- le rapport de Mme Perrot, magistrat délégué,

- les observations de Me Renard, avocat de M. X,

- et les conclusions de M. Mornet, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) - 3º Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (…) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité turque, est entré irrégulièrement en France le 27 mai 2006, qu'il a sollicité la qualité de réfugié, mais que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande, le 17 juillet 2006, pour tardiveté ; qu'il s'est maintenu plus d'un mois après la notification, le 2 août 2006, de la décision du préfet du Morbihan lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait, ainsi, dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Sur la légalité de la décision de reconduite à la frontière :

Considérant, en premier lieu, que, si l'obligation de motiver les mesures portant reconduite à la frontière d'un étranger, qui résulte de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, implique que ces décisions comportent l'énoncé des éléments de droit et de fait qui fondent la mise en oeuvre de la procédure d'éloignement, l'autorité administrative n'est pas tenue de préciser en quoi la situation particulière de l'intéressé ne fait pas obstacle à la mise en oeuvre de cette procédure ; qu'il ressort des mentions de l'arrêté de reconduite à la frontière du 12 octobre 2006, lequel comporte l'indication des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement, que le préfet du Morbihan a procédé à un examen préalable de la situation personnelle de M. X ; que, par suite, d'une part, l'arrêté contesté est suffisamment motivé, et, d'autre part, le moyen tiré de ce qu'il aurait été pris au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sous réserve du respect des dispositions de l'article 33 de la convention de Genève, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (…) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente ; qu'aux termes de l'article L. 742-3 de ce même code : L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit à s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Commission des recours des réfugiés. Il dispose d'un délai d'un mois à compter de la notification du refus de renouvellement ou du retrait de son autorisation de séjour pour quitter volontairement le territoire français ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 742-6 : L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-1 bénéficie du droit à se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement (…) ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office ;

Considérant que, si M. X fait valoir qu'il a présenté pendant sa rétention une nouvelle demande d'asile, et qu'une autorisation provisoire de séjour aurait dû lui être accordée, il ressort des pièces du dossier que cette demande a été traitée par le préfet selon la procédure prioritaire prévue par les dispositions susrapportées des articles L.741-4 et L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, laquelle procédure le dispensait d'admettre l'intéressé au séjour, et que, d'ailleurs, ladite demande a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 16 novembre 2006, levant ainsi tout obstacle à l'exécution de la mesure de reconduite à la frontière en litige, nonobstant la circonstance que M. X aurait saisi la Commission des recours des réfugiés d'un recours à l'encontre de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; qu'ainsi, M. X n'est pas fondé à soutenir que les dispositions des articles L.741-4, L. 742-3 et L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auraient été méconnues ;

Considérant, en troisième lieu, que, si M. X fait valoir que l'ensemble de sa famille, constituée de ses frères et d'une soeur, réside en France, et que ses parents sont décédés, qu'il n'a jamais troublé l'ordre public, que son casier judiciaire est vierge, et qu'il dispose d'une promesse d'embauche, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, entré en France le 27 mai 2006, est célibataire, sans enfant, et n'établit pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine ; qu'eu égard au caractère récent et aux conditions de son séjour sur le territoire français, l'arrêté contesté, qui n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation, n'a pas porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors, en prenant cet arrêté, le préfet du Morbihan n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que les circonstances que M. X disposerait d'une promesse d'embauche, qu'il ne porterait aucune atteinte à l'ordre public, et que son casier judiciaire serait vierge, sont sans incidence sur la légalité de la mesure contestée ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant que, si M. X fait valoir qu'il serait exposé à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine en raison de son origine kurde, de la situation générale en Turquie, et d'un mandat d'arrêt qui aurait été délivré à son encontre par le procureur de la république en chef de Bozova pour son engagement politique en faveur du parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), l'intéressé, dont la demande d'admission au statut de réfugié politique a d'ailleurs été rejetée par la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 16 novembre 2006 susévoquée, ne produit à l'appui de ses allégations aucun autre élément que la photocopie d'un mandat d'arrêt, en date du 2 octobre 2006, qui ne présente aucune garantie d'authenticité ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Morbihan de réexaminer sa situation doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Feridun X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Une copie sera transmise au préfet du Morbihan.

N° 06NT01963

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Reconduite a la frontiere
Numéro d'arrêt : 06NT01963
Date de la décision : 29/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme isabelle PERROT
Rapporteur public ?: M. MORNET
Avocat(s) : RENARD

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-12-29;06nt01963 ?
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