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23/06/2006 | FRANCE | N°06NT00902

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Reconduite a la frontiere, 23 juin 2006, 06NT00902


Vu la requête, enregistrée le 10 mai 2006, présentée pour M. Ibrahim X, demeurant ..., par Me Olivier Renard, avocat au barreau de Nantes ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 06-1397 du 10 avril 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du préfet du Morbihan, en date du 4 avril 2006, décidant sa reconduite à la frontière et fixant la Turquie comme pays à destination duquel l'intéressé devait être reconduit, d'autre part, de l'arrê

té du même jour décidant son maintien en rétention administrative pendant un ...

Vu la requête, enregistrée le 10 mai 2006, présentée pour M. Ibrahim X, demeurant ..., par Me Olivier Renard, avocat au barreau de Nantes ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 06-1397 du 10 avril 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du préfet du Morbihan, en date du 4 avril 2006, décidant sa reconduite à la frontière et fixant la Turquie comme pays à destination duquel l'intéressé devait être reconduit, d'autre part, de l'arrêté du même jour décidant son maintien en rétention administrative pendant un délai de quarante-huit heures ;

2°) d'annuler lesdits arrêtés ;

3°) d'enjoindre au préfet du Morbihan de réexaminer sa situation administrative, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner l'État à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 2 janvier 2006 par laquelle le président de la Cour a délégué M. d'Izarn de Villefort pour statuer sur les appels interjetés contre les jugements rendus par les présidents de tribunaux administratifs ou leurs délégués en matière de reconduite à la frontière ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 juin 2006 :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort, magistrat délégué,

- les observations de Me Vaultier substituant Me Renard, avocat de M. X,

- et les conclusions de M. Millet, commissaire du gouvernement ;

Sur l'arrêté de reconduite à la frontière et fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) - 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité turque, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification de la décision du préfet du Morbihan du 12 mai 2005 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait, ainsi, dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant que l'arrêté contesté relève que l'intéressé ne s'est pas conformé à l'invitation à quitter le territoire français du 12 mai 2005 et vise le 3° de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les différentes décisions de rejet de ses demandes d'admission au statut de réfugié dont il a fait l'objet ; que cet arrêté, qui comporte, dès lors, l'exposé des faits et des considérations de droit sur lequel il se fonde, est suffisamment motivé ; que la seule circonstance qu'il ne vise pas les nouvelles pièces produites par l'intéressé ne suffit pas à établir que le préfet du Morbihan n'aurait pas procédé à un examen de la situation individuelle de M. X au regard des risques qu'il courrait en cas de retour dans son pays d'origine ;

Considérant que, si M. X, entré en France en juillet 2001, fait valoir qu'il vit en France depuis presque cinq ans, qu'il a peu de liens avec ses parents restés en Turquie, qu'il compte de nombreux proches et amis sur le territoire national, qu'il dispose d'un logement dont, avec l'aide de sa famille, il s'acquitte des charges, ainsi que d'une promesse d'embauche, et qu'il n'a jamais troublé l'ordre public, il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et, notamment, de la durée et des conditions du séjour en France de l'intéressé, qui est célibataire et sans enfant, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du préfet du Morbihan, en date du 4 avril 2006, porte au droit de celui-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que le préfet n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que, si M. X, dont les demandes d'admission au statut de réfugié ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 6 mai 2003, puis le 2 février 2005, soutient que, ayant été un militant actif du parti communiste turc MLPK, il courrait des risques de traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays, la production d'avis de recherche émis en août et septembre 2000, d'un mandat d'inculpation, en date du 10 septembre 2000, et d'un mandat d'arrêt lancé contre lui le 12 novembre 2002 par le procureur général de Nurhak, dont l'authenticité n'est pas établie, ainsi que d'attestations de proches, ne suffisent pas à établir la réalité des risques allégués ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir qu'en fixant la Turquie comme pays à destination duquel il devait être reconduit, le préfet, qui ne s'est pas cru lié par les décisions de l'Office, aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur l'arrêté de maintien en rétention administrative :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, s'il établissait posséder un domicile fixe, ne disposait ni d'un passeport, ni de ressources ; que, dès lors, le préfet a pu légalement le placer en rétention administrative ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de réexaminer sa situation administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Ibrahim X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Une copie sera transmise au préfet du Morbihan.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Reconduite a la frontiere
Numéro d'arrêt : 06NT00902
Date de la décision : 23/06/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Philippe D IZARN de VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : RENARD

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-06-23;06nt00902 ?
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