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29/03/2006 | FRANCE | N°02NT01037

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ere chambre, 29 mars 2006, 02NT01037


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er juillet 2002, présentée pour la BANQUE HERVET, dont le siège est ..., par Me Y..., avocat au barreau de Paris ; la BANQUE HERVET demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 99.2874 en date du 26 mars 2002 du Tribunal administratif d'Orléans en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1989, 1990 et 1991 ;

2°) de prononcer la décharge des i

mpositions restant en litige ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme d...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er juillet 2002, présentée pour la BANQUE HERVET, dont le siège est ..., par Me Y..., avocat au barreau de Paris ; la BANQUE HERVET demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 99.2874 en date du 26 mars 2002 du Tribunal administratif d'Orléans en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1989, 1990 et 1991 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 mars 2006 :

- le rapport de M. Luc Martin, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Lalauze, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le GIE OLIVIA X... a, par voie de crédit-bail d'une durée de quinze ans, mis des rames de TGV Atlantique à la disposition de la SNCF contre paiement par celle-ci d'un loyer annuel ; que l'administration a procédé à une vérification de la comptabilité de ce GIE et remis en cause, d'une part, l'amortissement sur quinze ans des rames de TGV et, d'autre part, le choix du GIE de rattacher les loyers aux différents exercices selon un mode progressif ; qu'à raison de sa participation dans le GIE susmentionné, la BANQUE HERVET a été assujettie de ce double chef à des suppléments d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 1989, 1990 et 1991 ; qu'elle fait appel du jugement du Tribunal administratif d'Orléans en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande relatives au mode de rattachement des loyers ; que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie forme recours incident contre le même jugement en tant qu'il a accordé à la société requérante la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge à raison de la remise en cause de la durée d'amortissement des rames de TGV ;

Sur l'appel principal :

Considérant qu'aux termes du 2 bis de l'article 38 du code général des impôts : “... les produits correspondant à des créances sur la clientèle... sont rattachés à l'exercice au cours duquel intervient... l'achèvement des prestations pour les fournitures de services. Toutefois ces produits doivent être pris en compte : pour les prestations continues rémunérées notamment par des intérêts ou des loyers... au fur et à mesure de l'exécution…” ;

Considérant que la circonstance que la prestation fournie soit continue n'implique pas, par elle-même, qu'elle soit effectuée avec une intensité constante pendant toute la durée de son exécution et que sa rémunération doive par suite être rattachée de manière linéaire et prorata temporis aux exercices durant lesquels cette exécution se poursuit ; que lorsque les loyers stipulés dans un contrat de location sont inégaux de période en période, il y a lieu en principe de réputer que cette inégalité des loyers stipulés correspond à une inégalité dans la valeur de la prestation fournie ; qu'il en va cependant autrement s'il résulte de l'instruction que la répartition contractuelle des loyers ne rend pas compte correctement de la valeur de la prestation fournie, laquelle est fonction de l'obligation qui pèse sur le prestataire et de l'avantage économique retiré par le preneur ;

Considérant que le contrat conclu entre le GIE OLIVIA X... et la SNCF stipule que les loyers augmentent de 5 % par an ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que cette progression ne rend pas correctement compte de l'évolution de la valeur de la prestation compte-tenu de l'intensité croissante de l'utilisation des rames et de l'augmentation des recettes de l'exploitant, alors même que l'obligation pesant sur le GIE, consistant à louer un certain nombre de rames de TGV à la SNCF pendant toute la période en cause, est restée la même chaque année ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête relatifs à ce chef de redressement, la BANQUE HERVET est fondée à demander la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1989, 1990 et 1991 à raison de la remise en cause du mode de rattachement à ces exercices des loyers versés par la SNCF au GIE OLIVIA X... ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la BANQUE HERVET est fondée à soutenir que c'est à tort que par l'article 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

Sur le recours incident :

Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : “1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant… notamment : … 2°… les amortissements réellement effectués par l'entreprise, dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation…” ; qu'aux termes de l'article 39 C du même code : “L'amortissement des biens donnés en location est réparti sur la durée normale d'utilisation suivant des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat” ; qu'aux termes de l'article 30 de l'annexe II audit code, pris pour l'application des dispositions précitées : “Les biens donnés en location sont amortis sur leur durée normale d'utilisation, quelle que soit la durée de la location” ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, d'une part, depuis l'origine, les rames de TGV ont été amorties sur vingt ans, durée d'ailleurs proche de celle retenue pour l'amortissement de la plupart des rames utilisées par la SNCF ; que cette pratique doit être regardée comme un usage au sens des dispositions précitées du 2° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, auquel il convient de se référer, malgré les innovations techniques que comportent les rames de TGV Atlantique et qui ne suffisent pas à en faire des biens d'une nature différente des rames des précédents TGV ; que, d'autre part, et ainsi que l'admet d'ailleurs la BANQUE HERVET dans le dernier état de ses écritures, ni les conditions d'exploitation des rames de TGV Atlantique, ni les innovations techniques mentionnées ci-dessus ne constituent des circonstances particulières qui justifieraient de déroger à la durée d'amortissement de vingt ans correspondant à l'usage susmentionné ; que c'est par suite à tort que le Tribunal administratif d'Orléans a déchargé la BANQUE HERVET des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie à raison des amortissements pratiqués par le GIE OLIVIA X... sur une durée de quinze ans en se fondant sur le motif qu'eu égard aux innovations techniques que comportaient les rames de TGV Atlantique et au caractère encore mal défini de leur impact sur la durée d'utilisation de ce matériel, lesdites rames pouvaient être amorties sur une durée de quinze ans ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a déchargé la BANQUE HERVET des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées au titre des exercices clos en 1989, 1990 et 1991 à raison de la remise en cause de la durée d'amortissement des rames de TGV ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner l'Etat à verser à la BANQUE HERVET une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif d'Orléans en date du 26 mars 2002 est annulé.

Article 2 : La BANQUE HERVET est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1989, 1990 et 1991 à raison de la remise en cause du mode de rattachement à ces exercices des loyers versés par la SNCF au GIE OLIVIA X....

Article 3 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la BANQUE HERVET a été assujettie au titre des exercices clos en 1989, 1990, et 1991 à raison de la remise en cause de la durée d'amortissement des rames de TGV et dont elle a été déchargée par le jugement attaqué sont remises à sa charge.

Article 4 : L'Etat versera à la BANQUE HERVET une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la BANQUE HERVET et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

N° 02NT01037

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 02NT01037
Date de la décision : 29/03/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LEMAI
Rapporteur ?: M. Luc MARTIN
Rapporteur public ?: M. LALAUZE
Avocat(s) : HEMMET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-03-29;02nt01037 ?
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