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03/03/2006 | FRANCE | N°05NT01951

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Reconduite a la frontiere, 03 mars 2006, 05NT01951


Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2005, présentée pour M. Kahraman X, demeurant ..., par Me Marie-Françoise Blot de La Iglesia, avocat au barreau de Saint-Brieuc ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-5058 du 19 décembre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Côtes-d'Armor, en date du 16 décembre 2005, décidant sa reconduite à la frontière et fixant la Turquie comme pays à destination duquel l'intéressé devait êtr

e reconduit ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser...

Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2005, présentée pour M. Kahraman X, demeurant ..., par Me Marie-Françoise Blot de La Iglesia, avocat au barreau de Saint-Brieuc ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-5058 du 19 décembre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Côtes-d'Armor, en date du 16 décembre 2005, décidant sa reconduite à la frontière et fixant la Turquie comme pays à destination duquel l'intéressé devait être reconduit ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 5 septembre 2005 par laquelle le président de la Cour a délégué Mme Perrot pour statuer sur les appels interjetés contre les jugements rendus par les présidents de tribunaux administratifs ou leurs délégués en matière de reconduite à la frontière ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 février 2006 :

- le rapport de Mme Perrot, magistrat délégué,

- et les conclusions de M. Mornet, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) - 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité turque, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 14 août 2004, de la décision du préfet de Meurthe-et-Moselle du 12 août 2004 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait, ainsi, dans le champ d'application de la disposition précitée ;

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Sur la légalité externe :

Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi nº 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...) - Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : - (...) 3º Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière ; qu'il résulte de l'ensemble des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatives à la reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière, et notamment des articles L.511-1 à L.511-3 et L.512-1 à L.512-5, qui ouvrent un recours suspensif devant le juge administratif, organisent les garanties dont bénéficie l'étranger pour pouvoir exercer utilement ledit recours et fixent les délais dans lesquels ces recours doivent être présentés et jugés, que le législateur a, ainsi, entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des arrêtés de reconduite à la frontière et, par suite, exclure l'application des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, dont M. X Y peut, dès lors, utilement se prévaloir pour soutenir que l'arrêté du préfet des Côtes-d'Armor, qui a procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé et a suffisamment motivé sa décision, serait intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière ;

Sur la légalité interne :

Considérant que, si M. X, entré en France en mars 2003, fait valoir, d'une part, qu'à la date de l'arrêté contesté, il vivait maritalement avec une ressortissante française, enceinte de ses oeuvres, avec laquelle il projetait de se marier et, d'autre part, que la plupart des membres de sa famille, admis au statut de réfugié en raison de leurs origines kurdes, résident en France où ils sont tous bien intégrés et exercent une activité professionnelle, il ressort des pièces du dossier que la vie maritale alléguée est récente et que l'intéressé n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, compte tenu des circonstances de l'espèce, notamment de la durée et des conditions de séjour de M. X en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du 16 décembre 2005 n'a pas porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris ; que, par suite, en prenant cet arrêté, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle de l'intéressé ;

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant que, si M. X soutient qu'il courrait des risques pour sa vie en cas de retour en Turquie, l'intéressé, dont la demande d'admission au statut de réfugié a d'ailleurs été rejetée, le 13 octobre 2003, par une décision du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides confirmée le 19 juillet 2004 par la Commission des recours des réfugiés, n'apporte aucune précision, ni aucun élément, de nature à établir la réalité des menaces auxquelles il serait exposé ; que la circonstance que plusieurs membres de sa famille aient obtenu l'asile politique, à la supposer établie, est sans influence sur la légalité de la décision litigieuse ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que cette décision aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L.513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Kahraman X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Une copie sera transmise au préfet des Côtes-d'Armor.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Reconduite a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05NT01951
Date de la décision : 03/03/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme isabelle PERROT
Rapporteur public ?: M. MORNET
Avocat(s) : BLOT DE LA IGLESIA

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-03-03;05nt01951 ?
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