Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 18 septembre 2002, présentée pour la société VOILLET FRERES, dont le siège est ..., par Me Lacroix, avocat au barreau de Nantes ; la société VOILLET FRERES demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9801074 en date du 17 juillet 2002 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1994 et des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 7 600 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 août 2005 :
- le rapport de Mme Gélard, rapporteur ;
- les observations de Me Lacroix, avocat de la société VOILLET FRERES ;
- et les conclusions de M. Lalauze, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant que la société VOILLET FRERES donnait en location à la Société nantaise d'abattage (SENA) des locaux pour l'exercice de son activité moyennant le reversement de la taxe foncière sur les propriétés bâties afférente à ces bâtiments ; que celle-ci s'élevait à 735 934 F au titre de l'année 1993 ; que la société VOILLET FRERES était cependant redevable à la SENA d'une somme d'environ 1 000 000 F au titre des prestations de service réalisées pour son compte ; que pour éteindre une partie de cette dette, elle a procédé à sa compensation par la créance susmentionnée détenue sur la société SENA ; que dans le cadre du redressement judiciaire de la société SENA, le commissaire à l'exécution du plan de cession a refusé la compensation opérée par la société VOILLET FRERES ; qu'elle a alors inscrit en comptabilité une provision de 735 934 F correspondant au montant de la somme qu'elle risquait de devoir payer au commissaire à l'exécution du plan de cession de la société SENA ; qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité, l'administration a toutefois remis en cause cette provision en estimant qu'elle ne remplissait pas les conditions visées à l'article 39-1-5° du code général des impôts ; que dans le cadre de l'examen de la réclamation préalable déposée par la société VOILLET FRERES après la mise en recouvrement de l'imposition résultant de ce redressement, l'administration a procédé à une substitution de base légale en se fondant cette fois sur l'article 38-2 du code général des impôts ; que la société VOILLET FRERES soutient qu'elle a été ainsi privée de la faculté de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires d'une question de fait relevant de sa compétence ;
Considérant que si l'administration peut, à tout moment de la procédure, invoquer un nouveau motif de droit propre à justifier l'imposition, une telle substitution de base légale ne saurait avoir pour effet de priver le contribuable de la faculté, prévue par les articles L.59 et L.59 A du livre des procédures fiscales, de demander la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, lorsque celle-ci est compétente pour connaître du différend ;
Considérant que la base légale initialement retenue par l'administration pour fonder le redressement ne soulevait aucune question de fait susceptible d'être soumise à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, ainsi qu'elle l'a d'ailleurs constaté dans sa séance du 27 juin 1997 ; que la nouvelle base légale retenue par l'administration résulte de l'interprétation des écritures comptables de la société au regard des dispositions de l'article 38-2 du code général des impôts ; que le différend né de cette interprétation ne pose aucune question de fait relevant de la compétence de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, par suite, la société VOILLET FRERES n'est pas fondée à soutenir qu'en raison de la substitution de base légale opérée par l'administration, elle a été privée de la faculté de saisir utilement la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;
Sur le bien fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 38-2 du code général des impôts : Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excèdent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiées. ; qu'il résulte de l'instruction, que lorsqu'elle a pris la décision d'inscrire en comptabilité une provision correspondant au risque de paiement d'une somme au liquidateur de la société SENA en conséquence du rejet par celui-ci de la compensation précédemment effectuée la société requérante n'a pas repris à l'actif de son bilan la créance qu'elle détenait sur la société SENA avant la mise en oeuvre de la compensation ; qu'ainsi, c'est à bon droit que l'administration a considéré qu'en procédant à une augmentation de son passif sans inscrire à son actif la contrepartie nécessaire la société requérante a minoré son actif net rentrant dans sa base d'imposition telle que définie par les dispositions précitées de l'article 38-2 à concurrence du montant de la provision ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société VOILLET FRERES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à la société VOILLET FRERES la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société VOILLET FRERES est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société VOILLET FRERES et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
N° 02NT01524
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