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16/09/2005 | FRANCE | N°05NT01176

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Reconduite a la frontiere, 16 septembre 2005, 05NT01176


Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2005, présentée par le préfet de la Loire-Atlantique ; le préfet de la Loire-Atlantique demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-3331 du 30 juin 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 25 juin 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. Ilir X et fixant l'Albanie comme pays à destination duquel l'intéressé devait être reconduit ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Nantes ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décisio...

Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2005, présentée par le préfet de la Loire-Atlantique ; le préfet de la Loire-Atlantique demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-3331 du 30 juin 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 25 juin 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. Ilir X et fixant l'Albanie comme pays à destination duquel l'intéressé devait être reconduit ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Nantes ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 26 janvier 2005 par laquelle le président de la Cour a délégué M. Martin pour statuer sur les appels interjetés contre les jugements rendus par les présidents de tribunaux administratifs ou leurs délégués en matière de reconduite à la frontière ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 septembre 2005 :

- le rapport de M. Martin, magistrat délégué,

- les observations de Me Boezec, avocat de M. X,

- et les conclusions de M. Mornet, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : l'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité albanaise, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 30 septembre 2004, de la décision du 28 septembre 2004 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 ;1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que M. X et son épouse sont en situation irrégulière en France et que rien ne s'oppose à ce que les intéressés emmènent avec eux leurs deux filles en Albanie ; que la seule circonstance que ces enfants soient nées en France, que l'aînée soit scolarisée à l'école maternelle et y soit bien intégrée, ne suffit pas à établir que l'arrêté ordonnant la reconduite de M. X porterait une atteinte à leur intérêt supérieur au sens des stipulations précitées de l'article 3 ;1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté susmentionné du préfet de la Loire-Atlantique, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur ce que cet arrêté méconnaissait les stipulations de l'article 3 ;1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Nantes et la Cour administrative d'appel ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X est entré en France avec son épouse, enceinte de sept mois, en juillet 2001 ; que de leur union sont nées en France deux filles, l'aînée en 2001, et la cadette en 2003 ; qu'alors que l'intéressé avait obtenu une carte de séjour temporaire pour raison de santé, il a travaillé dans une entreprise de travaux publics pour subvenir aux besoins de sa famille ; que son employeur a promis de l'embaucher en cas de régularisation de sa situation ; qu'il suit avec assiduité des cours pour parfaire sa pratique de la langue française ; que sa fille aînée, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, est scolarisée à l'école maternelle ; que le soutien, tant de l'employeur de M. X et de ses collègues, que des voisins, de l'institutrice et des parents des élèves fréquentant la classe de sa fille, atteste les réels efforts d'intégration de M. X et de sa famille ; que, dans ces conditions, et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le préfet de la Loire-Atlantique, en ordonnant la reconduite à la frontière de M. X, a commis une erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Loire-Atlantique n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 25 juin 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. X ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner l'Etat à payer à M. X la somme de 1 500 euros qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Loire-Atlantique est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. X une somme de mille cinq cents euros (1 500 euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au préfet de la Loire-Atlantique, à M. Ilir X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

N° 05NT01176

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Reconduite a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05NT01176
Date de la décision : 16/09/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Laurent MARTIN
Rapporteur public ?: M. MORNET
Avocat(s) : BOEZEC

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2005-09-16;05nt01176 ?
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