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15/07/2005 | FRANCE | N°05NT00739

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Reconduite a la frontiere, 15 juillet 2005, 05NT00739


Vu, I, sous le n° 05NT00739, la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 mai 2005, présentée par le préfet du Cher ;

Le préfet du Cher demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-01164 du 11 avril 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Orléans a annulé son arrêté du 29 mars 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. Makuri X, et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Makuri X devant le Tribunal administratif

d'Orléans ;

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Vu, II, sous le n° 05NT00766, la r...

Vu, I, sous le n° 05NT00739, la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 mai 2005, présentée par le préfet du Cher ;

Le préfet du Cher demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-01164 du 11 avril 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Orléans a annulé son arrêté du 29 mars 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. Makuri X, et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Makuri X devant le Tribunal administratif d'Orléans ;

…………………………………………..………………………………………………………….

Vu, II, sous le n° 05NT00766, la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 mai 2005, présentée par le préfet du Cher ;

Le préfet du Cher demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-01163 du 11 avril 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Orléans a annulé son arrêté du 31 mars 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. Mopéro X et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Mopéro X devant le Tribunal administratif d'Orléans ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 26 janvier 2005 par laquelle le président de la Cour a délégué M. Dronneau pour statuer sur les appels interjetés contre les jugements rendus par les présidents de tribunaux administratifs ou leurs délégués en matière de reconduite à la frontière ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er juillet 2005 :

- le rapport de M. Dronneau, magistrat délégué,

- les observations de Me Gueho, avocat de MM. Makuri X et X... X,

- et les conclusions de M. Mornet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées du préfet du Cher présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;

Sur la légalité des arrêtés de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 6° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé ; qu'aux termes de l'article 8 de la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile modifiée : Lorsqu'un étranger, se trouvant à l'intérieur du territoire français, demande à bénéficier de l'asile, l'examen de sa demande d'admission au séjour relève du préfet compétent et, à Paris, du préfet de police … Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : 4º La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente … ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les demandes d'admission au statut de réfugié présentées par M. Makuri X et par son frère M. Mopéro X, tous deux de nationalité congolaise, ont été rejetées le 30 mars 2004 par des décisions distinctes de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmées le 7 janvier 2005 par la Commission des recours des réfugiés ; que les intéressés se sont maintenus sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 10 février 2005, des décisions du préfet du Cher du 28 janvier 2005 les invitant à quitter le territoire et prévoyant que des arrêtés de reconduite à la frontière seraient pris à leur encontre en cas d'inexécution de cette injonction ; que, dans ces conditions, les demandes de réexamen de leur situation au regard de l'asile, sollicitées auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par courrier du 16 février 2005, qui ont d'ailleurs été rejetées le 17 mars 2005 au motif que les nouveaux documents produits n'avaient pas le caractère de faits nouveaux, pouvaient être regardées comme ayant manifestement pour seul objet de faire échec, dans un but dilatoire, à une mesure d'éloignement imminente au sens des dispositions précitées ; que, par ailleurs, le secrétaire général de la préfecture était compétent pour signer lesdites décisions ; qu'en conséquence, les décisions du 22 février 2005 par lesquelles le préfet du Cher a refusé à M. Makuri X et à M. Mopéro X la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour ne sont pas entachées d'illégalité ; qu'ainsi, le préfet du Cher a pu, légalement, ordonner la reconduite à la frontière des intéressés sans méconnaître les dispositions précitées ; qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Cher est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Orléans s'est fondé sur le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour pour annuler ses arrêtés en date du 29 mars 2005 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Makuri X et de M. Mopéro X ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Makuri X et par M. Mopéro X devant le Tribunal administratif d'Orléans et devant la Cour ;

Sur la légalité des décisions fixant le pays de renvoi :

Considérant que M. Makuri X et M. Mopéro X font valoir qu'ils ont été arrêtés, puis torturés à plusieurs reprises par les autorités de la République démocratique du Congo, d'une part, en 1998 en raison de leur soutien présumé à la rébellion alors qu'ils avaient été contraints, en qualité de boulangers, de fournir du pain aux forces rebelles et, d'autre part, en novembre 2003, pour leur participation active au sein du Mouvement des Jeunes pour le Développement du Congo ; que, s'ils ont été arrêtés le 10 novembre 2003 et sont parvenus à s'évader le 12 novembre 2003 , ils ont faits l'objet, le 21 novembre 2003, d'avis officiels de recherche dont l'authenticité n'est pas sérieusement contestable, avant de parvenir à quitter leur pays ; qu'ainsi, il est établi par les pièces du dossier qu'en raison de leur engagement politique, les intéressés pourraient être exposés à des risques de traitements inhumains et dégradants au sens des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans leur pays, nonobstant la circonstance que leurs demandes d'admission au statut de réfugié aient été rejetées ; que, dans ces conditions, le préfet du Cher n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Orléans a annulé les arrêtés du 29 mars 2005 ordonnant leur éloignement à destination de la République démocratique du Congo ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Cher est seulement fondé à demander l'annulation des jugements attaqués du 11 avril 2005 en tant qu'ils ont annulé les arrêtés du 29 mars 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. Makuri X et de M. Mopéro X ;

Sur les conclusions à fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet du Cher réexamine les demandes de titre de séjour de MM. Makuri X et X... X ; que, par suite, les conclusions des intéressés présentées à cette fin ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991, l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner, dans les conditions prévues de l'article 75, la partie tenue aux dépens à payer une somme au titre des frais que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide ; que MM. Makuri X et X... X ont obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, leur avocat, Me Gueho, peut se prévaloir des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Gueho renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de condamner celui-ci à lui payer à ce titre une somme de 1500 € ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les jugements du 11 avril 2005 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Orléans sont annulés en tant qu'ils annulent les arrêtés du préfet du Cher en date du 29 mars 2005, ordonnant la reconduite à la frontière de MM. Makuri X et X... X.

Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes du préfet du Cher est rejeté.

Article 3 : L'Etat versera, en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, une somme de mille cinq cents euros (1 500 euros) à Me Gueho, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au préfet du Cher, à M. Makuri X, à M. Mopéro X, à Me Gueho et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

N° 05NT00739 et N° 05NT00766

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Reconduite a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05NT00739
Date de la décision : 15/07/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Michel DRONNEAU
Rapporteur public ?: M. MORNET
Avocat(s) : GUEHO

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2005-07-15;05nt00739 ?
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