Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 4 mai 1999, présentée pour la S.A. Natiocrédibail, dont le siège est ... (92823) Puteaux, représentée par son président-directeur général, par Me X..., avocat au barreau de Paris ;
La S.A. Natiocrédibail demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°s 96.1307-98.454 en date du 2 mars 1999 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes tendant à la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1995 et 1996 dans les rôles de la commune d'Arthenay (Loiret) ;
2°) de prononcer la réduction de ces impositions à concurrence des sommes respectives de 42 397 F et 34 940 F ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 10 000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
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C CNIJ n° 19-03-01-02
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juin 2003 :
- le rapport de M. JULLIÈRE, président,
- et les conclusions de Mme MAGNIER, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, pour demander la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1995 et 1996 dans les rôles de la commune d'Arthenay (Loiret), la S.A. Natiocrédibail, qui exerce une activité de messagerie, conteste la valeur locative attribuée à l'immeuble dont elle est propriétaire dans cette commune, lequel comprend des quais de chargement et de déchargement pour camions et des aires de stationnement et d'évolution pour ces véhicules, ainsi que des pièces à usage de bureau et diverses annexes ; que la société requérante ne conteste ni l'utilisation par l'administration de la méthode comparative prévue au 2° de l'article 1498 du code général des impôts pour le calcul de la valeur locative litigieuse, ni le choix du local pris comme terme de comparaison, situé hors de la commune d'Arthenay ; qu'elle critique en revanche, sans toutefois mettre en cause la répartition de la superficie réelle totale de l'immeuble à laquelle il a été procédé en vue du calcul de sa surface pondérée, les autres modalités selon lesquelles le service a déterminé cette surface pondérée ; que le litige porte également sur les ajustements qu'il y a lieu ou non de pratiquer en vertu des dispositions de l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts eu égard aux différences pouvant exister entre le terme de comparaison et l'immeuble à évaluer ;
Sur le calcul de la surface pondérée :
En ce qui concerne la pondération des surfaces des quais :
Considérant que les quais de chargement et de déchargement des camions constituaient l'usage principal du local à évaluer ; qu'en raison de cette seule circonstance, et alors même qu'elle a cru devoir ne pas adopter un coefficient supérieur à l'unité pour la pondération des surfaces à usage de bureau, c'est à bon droit que l'administration a, à l'occasion du calcul de surface pondérée auquel elle s'est livrée en vue de respecter la proportionnalité des valeurs locatives, appliqué aux surfaces des quais dont il s'agit le coefficient 1 ; que la requérante ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction 6 C-2332 du 15 décembre 1988 dès lors, en tout état de cause, que celle-ci ne mentionne des coefficients de pondération qu'à titre indicatif ;
En ce qui concerne le correctif de + 0,10 appliqué à la surface pondérée totale :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des explications fournies en appel par le ministre, qu'après avoir réalisé la pondération de la surface réelle totale de l'immeuble par application de divers coefficients à ses différentes parties, l'administration a, pour tenir compte d'un bon état d'entretien de la construction et d'une localisation favorisant sa desserte routière, affecté sa surface pondérée globale d'un coefficient de situation particulière de + 0,10 ; que, toutefois, l'application d'un tel coefficient, mentionné à l'article 324 R de l'annexe III au code général des impôts, ne peut résulter que des dispositions de l'article 324 P de la même annexe, lesquelles ne concernent que les locaux à usage d'habitation, l'article 324 AA de l'annexe précitée autorisant, s'agissant des locaux commerciaux évalués selon la méthode comparative, l'ajustement de la valeur locative unitaire du terme de comparaison en fonction des différences existant éventuellement entre celui-ci et l'immeuble à évaluer, du point de vue notamment de leur situation et de leur état d'entretien ; que, dès lors, la S.A. Natiocrédibail est fondée à soutenir que l'application du coefficient susmentionné de + 0,10 manque de base légale ;
Sur l'ajustement de la valeur locative unitaire de l'immeuble retenu comme terme de comparaison :
Considérant qu'en vertu de l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts, la valeur locative du terme de comparaison peut être ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre le type considéré et l'immeuble à évaluer, notamment du point de vue de la situation, de la nature de la construction, de son état d'entretien, de son aménagement, ainsi que de l'importance plus ou moins grande de ses dépendances bâties et non bâties si ces éléments n'ont pas été pris en considération lors de l'appréciation de la consistance ;
Considérant, d'une part, que le local à usage d'entrepôt auquel a été comparé l'immeuble de la requérante est un bâtiment construit en dur, dont les murs sont pleins ; que si les locaux à évaluer sont au contraire constitués d'un hangar sur structure métallique dont deux des façades comportent au total plus d'une centaine d'ouvertures permettant la mise à quai des camions, cette conception est parfaitement adaptée à l'activité de messagerie à laquelle le bâtiment est destiné ; que l'état d'entretien de l'immeuble à évaluer, construit en 1994, ne pouvait être que meilleur que celui du local de référence, édifié en 1978 ; que si la commune d'Arthenay où est situé l'immeuble à évaluer est moins peuplée que celle de Châteauneuf-sur-Loire (Loiret) dans laquelle le terme de comparaison a été choisi, cette circonstance ne constitue pas un désavantage au détriment des locaux de la requérante compte tenu de l'activité de messagerie pour laquelle ils sont spécialement conçus ; qu'eu égard à cet ensemble de circonstances, la société Natiocrédibail n'est pas fondée à revendiquer un ajustement en baisse de la valeur locative au m² du terme de comparaison en raison de différences entre son immeuble et celui-ci du point de vue de la nature des constructions, de leur état d'entretien et de la situation économique des deux communes ;
Considérant, d'autre part, que les conditions de desserte du local à évaluer, qui sont déterminantes eu égard à l'activité de transport routier constituant son unique destination, sont sensiblement plus favorables que celles du local de Châteauneuf-sur-Loire en raison d'un accès plus direct au réseau autoroutier permettant de gagner plus rapidement l'agglomération d'Orléans, dont les communes d'Arthenay et Châteauneuf-sur-Loire sont à des distances comparables, ainsi que la région parisienne ; que la majoration de 10 % pratiquée pour ce motif par le service se trouve ainsi justifiée nonobstant l'absence d'aérodrome à Arthenay alors qu'il en existe un à Châteauneuf-sur-Loire ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la S.A. Natiocrédibail est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté en totalité ses demandes ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de cet article s'opposent à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l'essentiel, soit condamné à verser à la S.A. Natiocrédibail la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er :
La valeur locative au 1er janvier 1970 de l'immeuble dont la S.A. Natiocrédibail est propriétaire à Arthenay sera déterminée en excluant l'application à la surface pondérée d'un coefficient correcteur de + 0,10.
Article 2 :
La S.A. Natiocrédibail est déchargée de la différence entre le montant des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1995 et 1996 et celui résultant de l'article 1er ci-dessus.
Article 3 :
Le jugement du Tribunal administratif d'Orléans en date du 2 mars 1999 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 :
Le surplus des conclusions de la requête de la S.A. Natiocrédibail est rejeté.
Article 5 :
Le présent arrêt sera notifié à la S.A. Natiocrédibail et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
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