Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 23 août 1999, présentée par M. Benoît X, demeurant ... ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9834 en date du 6 mai 1999 du Tribunal administratif de Caen en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge en droits des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1993 ;
2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée ;
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C CNIJ n° 19-04-02-05-01
n° 19-04-02-05-02
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mai 2003 :
- le rapport de M. HERVOUET, premier conseiller,
- les observations de M. X,
- et les conclusions de Mme MAGNIER, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. Benoît X, agent général d'assurances pour le compte de la compagnie AXA, a fait l'objet en 1995 d'une vérification de comptabilité ayant porté notamment sur l'année 1993, au cours de laquelle il a cessé son activité à la suite d'une plainte déposée par la compagnie d'assurances pour détournement de primes ; que le service a considéré que ces détournements constituaient, à concurrence de 768 177 F, un revenu imposable dans la catégorie des bénéfices non commerciaux en application de l'article 92 du code général des impôts, et a assorti les cotisations mises à la charge de M. X de la majoration pour mauvaise foi prévue par l'article 1729 du même code ; que le service a également réintégré dans les revenus de l'intéressé les frais financiers correspondant à un emprunt contracté en vue de rembourser les sommes dues à la compagnie d'assurances, ainsi que des agios bancaires ; qu'en outre, les indemnités compensatrices dues par la compagnie AXA à M. X à l'occasion de sa cessation de fonction et non déclarées ont été imposées suivant le régime des plus-values ;
Sur la requête principale :
En ce qui concerne le principe de l'imposition dans la catégorie des bénéfices non commerciaux :
Considérant qu'aux termes de l'article 92 du code général des impôts : 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices (...) de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que les détournements de fonds auxquels s'est livré un contribuable à l'occasion de son activité professionnelle constituent une source de profits imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ;
Considérant qu'il est constant, ainsi qu'il l'a été dit, qu'au cours de l'année 1993, M. X s'est livré, à l'occasion de l'exercice de son activité d'agent général d'assurances, à des détournements de sommes dont il ne conteste pas le montant ; que le service des impôts était, par suite, fondé à regarder ces sommes, en application des dispositions précitées de l'article 92, comme une source de profits et à inclure le montant des détournements dans les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu de l'intéressé ; que la circonstance, qui aurait été prise en considération par le juge judiciaire dans la fixation de la condamnation pénale, qu'il ne se serait pas effectivement enrichi à la suite de ces détournements qui auraient pour origine un endettement excessif et la circonstance que l'administration a procédé depuis 1987 à plusieurs vérifications de comptabilité de son activité d'agent d'assurance sont sans influence sur le bien-fondé de cette imposition ;
En ce qui concerne le montant du bénéfice imposable :
Considérant que M. X soutient que les emprunts souscrits et dont le service refuse la déductibilité des intérêts l'ont été en vue d'assainir sa situation financière professionnelle et ont été virés sur des comptes professionnels débiteurs ; que les redressements ayant été notifiés dans le cadre de la procédure d'évaluation d'office, en vertu du 2° de l'article L.73 du livre des procédures fiscales, en raison du retard de déclaration de revenus professionnels, la charge de la preuve lui incombe en application des dispositions de l'article L.193 du même livre ; que, ne produisant aucun élément à l'appui de ses allégations, il ne peut être regardé comme établissant que les emprunts ont été virés sur ses comptes professionnels et que leur objet n'était pas de nature personnelle ; que, par suite, c'est à bon droit que le service a refusé de prendre en compte ces frais financiers pour la détermination du bénéfice imposable ;
En ce qui concerne l'imposition de l'indemnité compensatrice :
Considérant qu'aux termes de l'article 93 du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur : I. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession. Sous réserve des dispositions de l'article 151 sexies, il tient compte des gains ou des pertes provenant (...) de toutes indemnités reçues en contrepartie de la cessation de l'exercice de la profession ou du transfert d'une clientèle (...) ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment d'un courrier du 22 novembre 1994 émanant de la compagnie AXA, que, nonobstant la circonstance que la cessation de son activité a résulté d'une révocation, ladite compagnie était bien redevable à M. X, qui en a accepté le principe et le montant par une lettre en date du 25 novembre 1993, d'une indemnité compensatrice s'élevant à 831 185 F ; qu'une telle indemnité, servie en contrepartie du renoncement aux droits qu'il détenait sur son portefeuille, représente un gain imposable au sens de l'article 93 du code général des impôts ; que cette créance, qui était acquise en 1993, année de la cessation d'activité du requérant, est imposable au titre de ladite année dès lors que le requérant n'établit pas qu'elle avait alors, en totalité ou en partie, un caractère irrécouvrable ; que, par suite, la circonstance que cette indemnité ne lui a pas été effectivement versée en raison de la compensation que la compagnie AXA a entendu effectuer avec les sommes dont l'intéressé lui était redevable, est sans influence sur son imposition ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande concernant la décharge des droits ;
Sur le recours incident :
Considérant qu'en se bornant à faire état de l'importance des sommes détournées et de la conscience qu'avait M. X du fait que les primes encaissées étaient imposables, le ministre n'apporte pas, dans les circonstances de l'espèce, d'élément suffisant de nature à démontrer que l'intéressé a cherché à éluder l'impôt et ne peut, par suite, pas être regardé comme apportant la preuve de la mauvaise foi du contribuable ; que, dès lors, le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a prononcé la décharge des pénalités pour mauvaise foi auxquelles M. X a été assujetti ;
DÉCIDE :
Article 1er :
La requête de M. X et le recours incident du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sont rejetés.
Article 2 :
Le présent arrêt sera notifié à M. X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
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