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18/06/2003 | FRANCE | N°00NT00064

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ere chambre, 18 juin 2003, 00NT00064


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 19 janvier 2000, présentée pour la société CALIM, qui a son siège ..., par Me Y..., avocat au barreau de Rennes ;

La société CALIM demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 95.299-95.300 du Tribunal administratif de Rennes en date du 4 novembre 1999 qui a rejeté ses demandes tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1988 à 1990 et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la pé

riode du 1er juin 1986 au 30 mai 1989 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions con...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 19 janvier 2000, présentée pour la société CALIM, qui a son siège ..., par Me Y..., avocat au barreau de Rennes ;

La société CALIM demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 95.299-95.300 du Tribunal administratif de Rennes en date du 4 novembre 1999 qui a rejeté ses demandes tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1988 à 1990 et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er juin 1986 au 30 mai 1989 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

B CNIJ n° 19-06-02-07

n° 19-04-01-04-03

n° 19-06-02-08-01

n° 19-01-01-03

3°) de décider qu'il sera sursis à l'exécution du jugement ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 15 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 99-1173 du 30 décembre 1999 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mai 2003 :

- le rapport de M. ISAÏA, président,

- les observations de M. X..., gérant de la société CALIM,

- et les conclusions de Mme MAGNIER, commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par une décision postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux des Côtes d'Armor a prononcé le dégrèvement, à concurrence d'une somme de 2 702 euros, des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés à la société CALIM pour la période correspondant aux années 1987 à 1990 ; que les conclusions de la requête de la société CALIM relatives à cette imposition sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant que la société CALIM soutient que les avis de mise en recouvrement en date du 29 février et du 31 août 1992 sont insuffisamment motivés en tant qu'ils se réfèrent pour les éléments de calcul des sommes réclamées aux seules notifications de redressement du 20 décembre 1990 et du 29 mars 1991 alors qu'à la suite de ses observations certains chefs de redressement ont été abandonnés ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R.256-1 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : L'avis de mise en recouvrement individuel prévu à l'article L.256 comporte : (...) 2° Les éléments du calcul et le montant des droits et des pénalités, indemnités ou intérêts de retard, qui constituent la créance. Toutefois, les éléments du calcul peuvent être remplacés par le renvoi au document sur lequel ils figurent lorsque ce document a été établi ou signé par le contribuable ou son mandataire ou lui a été notifié antérieurement... ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 25 de la loi de finances rectificative pour 1999 en date du 30 décembre 1999 susvisée : II. B -Sont réputés réguliers, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les avis de mise en recouvrement émis à la suite de notification de redressement effectués avant le 1er janvier 2000 en tant qu'ils seraient contestés par le moyen tiré de ce qu'ils se réfèreraient, pour ce qui concerne les informations mentionnées à l'article R.256-1 du livre des procédures fiscales, à la seule notification de redressement ;

Considérant qu'en vertu de ces dernières dispositions, qui présentent un caractère interprétatif, et dans la mesure où les avis de mise en recouvrement des rappels de taxe sur la valeur ajoutée contestés par la requérante ont été émis avant le 1er janvier 2000, et n'ont fait l'objet d'aucune décision de justice passée en force de chose jugée, les avis de mise en recouvrement adressés à la société CALIM doivent être réputés réguliers ; que, par ailleurs, la requérante ne saurait invoquer utilement les stipulations de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, qui ne visent que les procès portant sur des droits et obligations de caractère civil et des accusations pénales ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

Considérant que les suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels la société CALIM a été assujettie au titre des années 1987, 1988 et 1989 et qui sont seuls contestés devant la Cour ont été établis suivant une procédure d'imposition d'office ; que, dès lors, la charge de la preuve incombe au contribuable, en application des dispositions de l'article L.193 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en premier lieu, que si la société CALIM soutient pour la première fois en appel que la somme de 70 000 F qui lui a été versée en espèces, au cours de l'exercice clos en 1987, correspond à un prêt qui lui aurait été consenti par M. et Mme Z..., elle n'établit pas, par les documents qu'elle produit, la réalité du prêt allégué ; qu'ainsi, en l'absence de justification de l'origine de la somme dont il s'agit, c'est à bon droit que le vérificateur l'a regardée comme une recette imposable et l'a prise en compte pour la détermination de l'impôt sur les sociétés ;

Considérant, en deuxième lieu, que la société CALIM conteste la prise en compte, au titre de ses recettes, de sommes qui lui ont été versées par la Chambre de commerce et d'industrie de Clermont-Ferrand ; que, si elle soutient que ces sommes correspondent à des prestations assurées par M. X..., son gérant, dans le cadre de son activité individuelle de conseil en formation, il résulte de l'instruction que ce dernier ne les avait pas déclarées au titre de cette activité individuelle, que la Chambre de commerce les avait versées à la société CALIM en tant que bénéficiaire, que les factures établies par cette société ne faisaient pas mention d'un encaissement pour ordre et qu'à aucun moment il n'a été fait état de l'existence d'un mandat du gérant donnant pouvoir à la société d'encaisser ces honoraires pour son compte ; que, dans ces conditions, la société requérante, qui n'apporte pas la preuve de ses allégations, n'est pas fondée à contester la réintégration des sommes dont il s'agit dans ses recettes ;

Considérant, en troisième lieu, que la société requérante ne justifie pas plus en appel qu'en première instance qu'elle a effectivement comptabilisé les amortissements avant l'expiration du délai de déclaration des résultats de l'année dont ils sont retranchés ; que, par suite, elle n'est pas fondée à contester leur réintégration dans ses résultats imposables au titre des années en litige ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'instruction que les dépenses de réfection du comptoir du bar, faites au cours de l'exercice clos en 1987, ont eu pour effet de prolonger d'une manière notable la durée d'utilisation de cet équipement ; qu'il en est de même des dépenses effectuées au cours de l'exercice clos en 1989 pour la mise en conformité d'un tableau électrique dans les locaux de Saint-Quay-Portrieux ; que celles exposées au cours de l'exercice clos en 1988 pour la réparation d'un lave-vaisselle, dont l'administration soutient sans être contredite qu'il était entièrement amorti et hors d'état de fonctionnement, ont entraîné une augmentation de la valeur d'actif de ce bien ; que si les locaux de Saint-Brieuc étaient pris en location, les clauses du bail stipulaient que les améliorations resteraient la propriété du locataire pendant toute la durée du bail ; qu'en raison de leur importance et de leur nature, les travaux réalisés au cours de l'exercice clos en 1989 dans ces locaux, que les clauses du bail n'imposaient pas au locataire, ont entraîné une augmentation de la valeur de l'actif corporel de l'entreprise ; que, dans les conditions susindiquées, les dépenses correspondant aux différents travaux qui viennent d'être évoqués ne présentaient pas un caractère déductible au sens des dispositions du 1°) du 1 de l'article 39 du code général des impôts ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration les a réintégrées dans les résultats imposables de la société requérante ;

Considérant, enfin, que pour contester les impositions litigieuses, la société CALIM ne saurait utilement invoquer sur le fondement des dispositions de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, des instructions administratives qui se bornent à énoncer de simples recommandations à l'usage du service et qui par conséquent ne valent pas interprétation d'un texte fiscal au sens de ces dispositions ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant qu'aux termes de l'article 266 du code général des impôts : 1. La base d'imposition est constituée : a. Pour les livraisons de biens et les prestations de services, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de la livraison ou de la prestation... ;

Considérant que, lorsqu'un prestataire de services exploite un établissement où est en usage la pratique selon laquelle le service est compris dans les factures établies par l'entreprise, le montant du pourboire versé au personnel constitue, pour les clients, une somme déboursée en contrepartie de la prestation de services qu'ils reçoivent ; que, par suite, lesdites sommes doivent être comprises dans la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée, en tant qu'élément constitutif du prix demandé aux clients, en application des dispositions précitées du code général des impôts ; qu'ainsi, au regard de la loi fiscale, les pourboires versés au personnel par la société CALIM, qui exploite un bar à Saint-Quay-Portrieux (Côtes d'Armor) sont imposables à la taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant, il est vrai, que la société requérante se prévaut de l'interprétation résultant d'une instruction n° 3-B-4-76 du 31 décembre 1976, selon laquelle l'administration admet, par mesure de tolérance, que les pourboires ne sont pas retenus dans la base imposable à la taxe sur la valeur ajoutée à la quadruple condition que le client soit préalablement informé du caractère de pourboire du prélèvement et de son pourcentage, que les pourboires soient intégralement répartis entre les membres du personnel en contact direct avec la clientèle, que le reversement soit justifié par la tenue d'un registre spécial émargé par les bénéficiaires et que le montant des sommes effectivement perçues par les membres du personnel rémunérés au pourboire soit mentionné dans la déclaration annuelle des salaires ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que la masse des pourboires était répartie entre tout le personnel, y compris celui qui n'était pas en contact direct avec la clientèle et que le registre spécial, dès lors qu'il ne mentionnait pas le détail des recettes journalières, ne distinguait pas le montant des pourboires dans la rémunération totale attribuée et ne retraçait pas, pour un même mois, les variations de ce montant entre les différents salariés, ne remplissait pas sa fonction de suivi du versement effectif des sommes dont il s'agit ; que, par suite, et en tout état de cause, la société requérante ne satisfaisait pas aux conditions posées par l'instruction administrative susindiquée et ne peut donc utilement s'en prévaloir sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ;

Considérant que la société CALIM, s'agissant également des pourboires, fait aussi valoir qu'à l'occasion d'un précédent contrôle, le vérificateur, en spécifiant dans la notification de redressement qu'il lui a adressée que remplissant les conditions prévues par les instructions elle était dispensée d'acquitter la taxe sur la valeur ajoutée sur ce service, aurait formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ; que, toutefois, en agissant ainsi le vérificateur s'est borné à examiner la situation de fait du contribuable au regard de la doctrine administrative, laquelle ne saurait constituer un texte fiscal au sens des dispositions de l'article L.80 B du livre des procédures fiscales ; que, par suite, le moyen tiré de l'existence d'une telle prise de position doit être rejeté ;

Considérant, par ailleurs, que comme il a été dit ci-dessus, la somme de 70 000 F et celles correspondant aux prestations de formation constituaient bien des recettes de la société CALIM ; que, par suite, c'est à bon droit que lesdites sommes ont été comprises dans la base imposable à la taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, s'agissant des impositions restant en litige, la société CALIM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la société CALIM la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er :

A concurrence de la somme de 2 702 euros (deux mille sept cent deux euros), en ce qui concerne les droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés à la société CALIM pour la période correspondant aux années 1987 à 1990, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société CALIM.

Article 2 :

Le surplus des conclusions de la requête de la société CALIM est rejeté.

Article 3 :

Le présent arrêt sera notifié à la société CALIM et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 00NT00064
Date de la décision : 18/06/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. ISAIA
Rapporteur public ?: Mme MAGNIER
Avocat(s) : BERTHELOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2003-06-18;00nt00064 ?
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