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30/10/2002 | FRANCE | N°98NT02327

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ere chambre, 30 octobre 2002, 98NT02327


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 25 septembre 1998, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 96-317 du Tribunal administratif d'Orléans en date du 19 mai 1998 en tant qu'il a accordé à M. et Mme Gérard Y... la décharge partielle du complément d'impôt sur le revenu auquel ils ont été assujettis au titre de l'année 1992 dans les rôles de la commune de Saint-Prest (Eure-et-Loir) ;

2°) de rétablir M. et Mme Gérard Y... au rôle de l'impôt sur le r

evenu de l'année 1992 à raison des droits et pénalités dont ils ont ainsi été déchargés ...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 25 septembre 1998, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 96-317 du Tribunal administratif d'Orléans en date du 19 mai 1998 en tant qu'il a accordé à M. et Mme Gérard Y... la décharge partielle du complément d'impôt sur le revenu auquel ils ont été assujettis au titre de l'année 1992 dans les rôles de la commune de Saint-Prest (Eure-et-Loir) ;

2°) de rétablir M. et Mme Gérard Y... au rôle de l'impôt sur le revenu de l'année 1992 à raison des droits et pénalités dont ils ont ainsi été déchargés ;

……………………………………………………………………………………………….

C CNIJ n° 19-04-02-02

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience :

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 octobre 2002 :

- le rapport de M. JULLIÈRE, président,

- et les conclusions de Mme MAGNIER, commissaire du gouvernement ;

Sur le recours du ministre :

En ce qui concerne la recevabilité du recours :

Considérant qu'il est constant que la notification du jugement attaqué a été réceptionnée à la direction des services fiscaux d'Eure-et-Loir le 28 mai 1998 ; que les six feuillets composant le mémoire par lequel a été introduit le recours du ministre portent tous la mention de leur réception initiale en télécopie à la date du 25 septembre 1998 ; qu'ainsi, ce recours, qui a fait l'objet d'un envoi ultérieur par courrier, a été enregistré au greffe de la Cour dans le délai d'appel de quatre mois prévu à l'article R.200-18 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, les époux Y... ne sont pas fondés à soutenir que ledit recours serait irrecevable comme tardif ;

Au fond :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 du code général des impôts : “1. Le bénéfice ou revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut… sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu.” ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SCI des Epars, créée le 27 septembre 1990 et dont les époux Y... étaient les seuls associés, a acquis de M. Z... le 30 novembre 1990 un immeuble sis ..., dont le rez-de-chaussée était constitué d'un local commercial donné en location à la SARL des Etablissements NORMAND, qui exploitait un fonds de restaurant ; que, par un acte conclu le jour-même de cette acquisition, la SCI des Epars et la SARL des Etablissements NORMAND sont convenues de résilier le bail dont cette dernière était titulaire moyennant le versement d'une indemnité d'éviction de 680 000 F ; qu'une telle indemnité, versée à un locataire commerçant en vertu de la législation relative aux baux commerciaux, ne figure pas parmi les charges déductibles énumérées à l'article 31-I du code général des impôts ; qu'ayant été acquittée à l'occasion de l'acquisition de l'immeuble, cette indemnité présente, alors même qu'elle n'a pas été versée au vendeur et que l'immeuble a pu ensuite être donné en location dans son entier à un prix trente ou quarante fois supérieur au loyer payé par l'ancien locataire du rez-de-chaussée, le caractère d'un élément du coût d'acquisition dudit immeuble, dont ni les dispositions du 1 de l'article 13 du code général des impôts ni aucune autre disposition n'autorisent la déduction ; qu'ainsi, c'est à tort que le tribunal administratif a admis la déductibilité de l'indemnité litigieuse au motif qu'elle aurait été versée en vue de l'acquisition ou de la conservation du revenu au sens des dispositions de l'article 13-1 précité ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen invoqué par les époux Y... devant le tribunal, par lequel ceux-ci se prévalent de la doctrine administrative ;

Considérant que M. et Mme Y... ne sont pas en droit d'invoquer, sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, la documentation administrative 5D-2219 du 15 décembre 1989, laquelle, précisément, exclut, par les dispositions du dernier alinéa de son paragraphe 11, la déductibilité de l'indemnité d'éviction lorsqu'elle est “versée à l'occasion de l'acquisition de l'immeuble“ ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a accordé à M. et Mme Y... la décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel ils ont été assujettis au titre de l'année 1992 à concurrence de son montant résultant de la réintégration de l'indemnité litigieuse au résultat déclaré par la SCI des Epars pour l'exercice 1990, dont le déficit avait été imputé sur les revenus fonciers imposables au titre de l'année 1992 au nom des intéressés ;

Sur l'appel incident des époux Y... :

Considérant qu'aux termes de l'article 31 du code général des impôts : “I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : 1°Pour les propriétés urbaines : a) Les dépenses de réparation et d'entretien… b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement…” ; que doivent être regardés comme des travaux de construction ou de reconstruction, au sens des dispositions précitées, les travaux comportant la création de nouveaux locaux d'habitation, notamment dans les locaux auparavant affectés à un autre usage, ainsi que les travaux ayant pour effet d'apporter une modification importante au gros oeuvre de locaux d'habitation existants ou les travaux d'aménagement intérieur qui, par leur importance, équivalent à une reconstruction ; que doivent être regardés comme des travaux d'agrandissement, au sens des mêmes dispositions, les travaux ayant pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable de locaux existants ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les travaux effectués au cours de l'année 1991 par la SCI des Epars dans l'immeuble ancien et vétuste qu'elle a acquis en 1990 dans les conditions susdécrites ont comporté, notamment, la consolidation des murs extérieurs, la démolition des murs intérieurs, des cloisons et des conduits de cheminées sur les quatre niveaux du bâtiment, le renforcement des poutres supportant les planchers, la mise en place de piliers verticaux destinés à la consolidation de la structure de l'immeuble, la réfection partielle de la charpente et la reprise d'un mur pignon, la démolition de l'escalier d'accès aux combles et la pose d'un escalier métallique, l'installation d'une ouverture en toiture ; que ces travaux, qui ont ainsi affecté le gros oeuvre de manière importante et entraîné une redistribution totale de l'aménagement intérieur, doivent être regardés, à supposer même qu'ils aient été en partie rendus nécessaires par la conservation et la mise aux normes de l'immeuble, comme des travaux de reconstruction ; qu'en admettant même que, pris isolément, certains des travaux de menuiserie, d'électricité, plomberie, chauffage, sanitaire, revêtements de sols soient constitutifs, au sens des dispositions précitées, de travaux d'amélioration, déductibles lorsqu'ils sont effectués dans des locaux à usage d'habitation, ou même de réparation et d'entretien, déductibles sans condition d'affectation, ces travaux ne sont pas en l'espèce dissociables de l'opération globale de rénovation de l'immeuble ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, les dépenses ne peuvent être admises en déduction dans leur totalité ;

Considérant, il est vrai, que les époux Y... invoquent, sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, la réponse ministérielle faite le 19 août 1976 à M. X..., sénateur, et la documentation administrative 5D-2225 du 15 septembre 1993, selon lesquelles les dépenses d'amélioration visées à l'article 31-I-1°-b du code général des impôts peuvent être prises en compte pour la détermination des revenus fonciers imposables à la condition, notamment, d'être exposées sur un immeuble affecté à l'habitation lors de l'exécution des travaux ; que la référence à la position ainsi exprimée par l'administration est toutefois, en tout état de cause, inopérante eu égard à ce qui vient d'être dit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme Y... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par l'article 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté le surplus des conclusions de leur demande concernant la réintégration des dépenses de travaux susmentionnées au résultat de l'exercice 1991 de la SCI des Epars, dont ils ont imputé le déficit sur leurs revenus fonciers de l'année 1992 ;

DÉCIDE :

Article 1er :

M. et Mme Gérard Y... sont rétablis au rôle de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1992 à raison de l'intégralité des droits et pénalités qui leur ont été assignés.

Article 2 :

L'appel incident de M. et Mme Gérard Y... est rejeté.

Article 3 :

Le jugement du Tribunal administratif d'Orléans en date du 19 mai 1998 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 :

Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et à M. et Mme Y....

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 98NT02327
Date de la décision : 30/10/2002
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LEMAI
Rapporteur ?: M. JULLIERE
Rapporteur public ?: Mme MAGNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2002-10-30;98nt02327 ?
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