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09/03/2000 | FRANCE | N°97NT00275

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3e chambre, 09 mars 2000, 97NT00275


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 24 février 1997, présentée pour la commune de Marsac-sur-Don, représentée par son maire, par Me X..., avocat au barreau de Nantes ;
La commune de Marsac-sur-Don demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 92-2432 du 19 décembre 1996 par lequel le Tribunal administratif de Nantes l'a déclarée responsable des conséquences dommageables de l'accident de la circulation dont a été victime, le 11 février 1989, M. Claude Y... dans l'exercice de ses fonctions de maire, et a évalué à 150 000 F le montant de son préjudice ;


2 ) de condamner M. Y... à lui verser une somme de 3 000 F au titre de...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 24 février 1997, présentée pour la commune de Marsac-sur-Don, représentée par son maire, par Me X..., avocat au barreau de Nantes ;
La commune de Marsac-sur-Don demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 92-2432 du 19 décembre 1996 par lequel le Tribunal administratif de Nantes l'a déclarée responsable des conséquences dommageables de l'accident de la circulation dont a été victime, le 11 février 1989, M. Claude Y... dans l'exercice de ses fonctions de maire, et a évalué à 150 000 F le montant de son préjudice ;
2 ) de condamner M. Y... à lui verser une somme de 3 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des assurances ;
Vu le code des communes et le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 février 2000 :
- le rapport de M. LAINE, premier conseiller,
- les observations de Me BARDOUL, avocat de M. Claude Y...,
- les observations de Me CHUPIN, substituant Me BOUCHET, avocat de la société "Les Assurances du Crédit-Mutuel IARD",
- et les conclusions de Mme COËNT-BOCHARD, commissaire du gouvernement ;

Considérant que sur recours de M. Claude Y..., et de sa compagnie d'assurances, la société "Les Assurances du Crédit-Mutuel IARD", le Tribunal de grande instance de Nantes a, par jugement du 1er octobre 1991, sursis à statuer "jusqu'à la décision de la juridiction administrative sur la responsabilité de la commune", à la suite de l'accident dont a été victime l'intéressé le 11 février 1989 alors qu'il revenait d'une réunion relative aux problèmes d'électrification à laquelle il avait assisté en sa qualité de maire de Marsac-sur-Don (Loire-Atlantique) ; que saisi en conséquence par M. Y... d'une demande tendant à ce que soit reconnue la responsabilité de la commune de Marsac-sur-Don et évaluées les conséquences dommageables de l'accident, le Tribunal administratif de Nantes, par son jugement du 19 décembre 1996, a déclaré la commune entièrement responsable, évalué le dommage subi par M. Y... à la somme de 150 000 F, toutes causes confondues, et rejeté le surplus des conclusions de M. Y... et de la Caisse primaire d'assurance maladie (C.P.A.M.) de Nantes, mise en cause ;
Sur l'intervention en défense de la société "Les Assurances du Crédit-Mutuel IARD" :
Considérant que la société "Les Assurances du Crédit-Mutuel IARD", subrogée dans les droits de son assuré, ne se prévaut pas d'un droit distinct de celui de M. Y... ; que, par suite, son intervention n'est pas recevable ;
Sur les conclusions de la commune de Marsac-sur-Don tendant à l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Nantes :
Considérant qu'aux termes de l'article L.122-17 du code des communes, alors en vigueur : "Les communes sont responsables des dommages résultant des accidents subis par les maires, les adjoints et les présidents de délégation spéciale dans l'exercice de leurs fonctions" ;
Considérant qu'il est constant que l'accident subi par M. Y... le 11 février 1989, alors qu'il revenait d'une réunion intéressant certains problèmes de renforcement du réseau d'électricité, est intervenu dans l'exercice de ses fonctions de maire ; que, par suite, en application des dispositions précitées, la commune est responsable à son égard des préjudices résultant pour lui de cet accident ; que si cette dernière prétend que M. Y... n'aurait pas maîtrisé la vitesse de son véhicule, sans d'ailleurs apporter aucune précision, ni aucune justification à l'appui de cette allégation, il ne résulte pas de l'instruction qu'un fait quelconque imputable à la victime et de nature à dégager ou atténuer la responsabilité de la commune puisse être relevé en l'espèce ; qu'il suit de là, que la commune de Marsac-sur-Don n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif l'a déclarée entièrement responsable de l'accident subi par M. Y... ;
Sur les conclusions d'appel incident présentées respectivement par M. Y... et la C.P.A.M. de Nantes :
Considérant, en premier lieu, que dans le cadre de leurs appels incidents respectifs, M. Y... et la C.P.A.M. de Nantes se bornent à reprendre et développer leurs conclusions à fin de condamnation de la commune de Marsac-sur-Don à leur verser certaines sommes, sans contester l'irrecevabilité opposée sur ce point par le Tribunal administratif ; que ces conclusions ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

Considérant, en second lieu, que lesdites conclusions d'appel incident peuvent être regardées comme tendant également à ce que la Cour se prononce sur l'étendue de la responsabilité de la commune de Marsac-sur-Don dans le cadre de la question préjudicielle renvoyée par le jugement du Tribunal de grande instance de Nantes du 1er octobre 1991 ; qu'à cette occasion, M. Y... ne peut aucunement se prévaloir de l'autorité de la chose jugée par un arrêt de la Cour d'appel de Rennes du 16 octobre 1996 dans le litige l'opposant à la société "Les Assurances du Crédit-Mutuel IARD", concernant les sommes dues par application du contrat d'assurance le liant à cette société, en l'absence d'identité de cause, d'objet et de parties entre les deux litiges ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'après avoir subi une incapacité temporaire totale de cinq mois et des souffrances physiques moyennes, M. Y... demeure atteint d'une incapacité permanente partielle de 12 % en raison des séquelles de son accident sur les plans orthopédique et neuro-psychique, et connaît des troubles significatifs dans ses conditions d'existence ; que si, au titre des incapacités susmentionnées, il ne peut prétendre à l'indemnisation d'une quelconque perte de revenus en l'absence d'activité professionnelle exercée au moment de l'accident, il sera fait, toutefois, une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence qu'il subit à raison de son préjudice corporel propre en l'évaluant à la somme de 50 000 F ; que pour ce même chef de préjudice, la C.P.A.M. de Nantes a exposé, au titre des frais médicaux, para-médicaux et d'hospitalisation de la victime, des débours s'élevant à 61 186,48 F, dont la commune de Marsac-sur-Don doit également supporter la charge ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, qu'en raison de l'impossibilité pendant plusieurs mois de reprendre une activité professionnelle à l'issue de l'accident, M. Y... a perdu l'emploi d'ingénieur commercial qu'il devait occuper à partir du 1er mars 1989 ; que, compte tenu notamment du salaire qu'il devait percevoir, il sera fait une juste appréciation de l'indemnisation de ce chef de préjudice en l'évaluant à la somme de 250 000 F ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la réparation, de l'ensemble des conséquences dommageables de l'accident du 11 février 1989 incombant à la commune de Marsac-sur-Don s'élève au total à 300 000 F en ce qui concerne le préjudice de M. Y..., et à 61 186,48 F en ce qui concerne les sommes dues à la C.P.A.M. de Nantes ; que dans cette mesure, M. Y... et la C.P.A.M. de Nantes sont, dès lors, fondés à soutenir que le Tribunal administratif a fait une évaluation insuffisante du montant de la réparation devant être prise en charge par la commune de Marsac-sur-Don ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant, en premier lieu, que la société "Les Assurances du Crédit-Mutuel IARD", intervenant en défense, n'étant pas partie à la présente instance, les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à la condamnation de la commune de Marsac-sur-Don à lui payer la somme que ladite compagnie d'assurances demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que M. Y..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la commune de Marsac-sur-Don la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de condamner la commune de Marsac-sur-Don à payer, d'une part, à M. Y... une somme de 6 000 F au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens, d'autre part, à la C.P.A.M. de Nantes la somme de 5 000 F que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'intervention de la société "Les Assurances du Crédit-Mutuel IARD" n'est pas admise.
Article 2 : La requête de la commune de Marsac-sur-Don est rejetée.
Article 3 : La commune de Marsac-sur-Don est déclarée responsable des conséquences dommageables de l'accident dont a été victime M. Claude Y.... Le montant du préjudice global subi par celui-ci et dont la commune de Marsac-sur-Don lui doit réparation s'élève à la somme de trois cent mille francs (300 000 F). Le montant des débours exposés pour son compte par la Caisse primaire d'assurance maladie de Nantes, et dont la commune de Marsac-sur-Don doit réparation à celle-ci s'élève à la somme de soixante et un mille cent quatre vingt six francs et quarante huit centimes (61 186,48 F).
Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 19 décembre 1996 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : La commune de Marsac-sur-Don versera à M. Claude Y... une somme de six mille francs (6 000 F) et à la Caisse primaire d'assurance maladie de Nantes une somme de cinq mille francs (5 000 F) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 6 : Le surplus des conclusions d'appel incident de M. Claude Y... et de la Caisse primaire d'assurance maladie de Nantes ainsi que les conclusions propres de la société "Les Assurances du Crédit-Mutuel IARD" sont rejetés.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Marsac-sur-Don, aux héritiers de M. Claude Y..., à la Caisse primaire d'assurance maladie de Nantes, à la société "Les Assurances du Crédit-Mutuel IARD", à la société Groupama Pays de la Loire et au ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 97NT00275
Date de la décision : 09/03/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMPETENCE - COMPETENCES CONCURRENTES DES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - CONTENTIEUX DE L'INTERPRETATION - CAS OU UNE QUESTION PREJUDICIELLE S'IMPOSE.

PROCEDURE - DIVERSES SORTES DE RECOURS - RECOURS EN INTERPRETATION - RECEVABILITE.

PROCEDURE - INCIDENTS - INTERVENTION - RECEVABILITE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - RESPONSABILITE REGIE PAR DES TEXTES SPECIAUX.


Références :

Code des communes L122-17
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. LAINE
Rapporteur public ?: Mme COËNT-BOCHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2000-03-09;97nt00275 ?
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