Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 2 avril 1999, présentée pour le Syndicat Interco C.F.D.T. du département d'Indre-et-Loire, représenté par son secrétaire en exercice, dont le siège est au Centre des Halles, place Gaston Pailhou à Tours (37059), par Me X..., avocat au barreau de Tours ;
Le Syndicat Interco C.F.D.T. du département d'Indre-et-Loire demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 98-1571 du 2 février 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande en annulation de la décision implicite du président du Conseil général d'Indre-et-Loire refusant de lui communiquer la totalité des contrats et actes d'engagement des femmes de ménages employées par le Département d'Indre-et-Loire, à l'exception de cinquante documents qui lui ont déjà été communiqués ;
2 ) d'annuler la décision implicite susvisée du président du Conseil général d'Indre-et-Loire ;
3 ) de condamner le Département d'Indre-et-Loire à lui verser une somme de 8 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu le décret n 88-465 du 28 avril 1988 relatif à la procédure d'accès aux documents administratifs ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 novembre 1999 :
- le rapport de M. MILLET, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme COËNT-BOCHARD, commissaire du gouvernement ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que, dans son mémoire en défense, enregistré le 17 mai 1999, le Département d'Indre-et-Loire soutient qu'il a communiqué à deux reprises au Syndicat Interco C.F.D.T. du département d'Indre-et-Loire quatre vingt seize arrêtés et neuf contrats d'engagement, soit au total cent cinq documents, les 15 octobre et 10 novembre 1998 ; qu'il a de nouveau produit ces pièces en un exemplaire au dossier de la présente instance, et le greffe de la Cour a informé l'avocat du syndicat, conformément à l'article R.141 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, que lesdites pièces étaient tenues à sa disposition ; que, dans le dernier état de ses conclusions présentées en appel, il ne conteste plus avoir reçu les cinquante cinq documents complémentaires, en plus des cinquante dont il a admis en première instance, avoir reçu communication, mais se borne à soutenir qu'il n'aurait pas reçu la totalité des documents communicables ;
Considérant qu'il doit être tenu pour établi que les cinquante cinq documents litigieux ont été communiqués au Syndicat Interco C.F.D.T. antérieurement au 5 janvier 1999, date de l'audience du Tribunal administratif ; que, par suite, c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Orléans n'a pas également prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la demande en tant qu'elles portaient sur le refus de communiquer ces cinquante cinq documents ; qu'il y a, dès lors, lieu d'annuler l'article 2 du jugement du Tribunal du 2 février 1999 en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande concernant le refus de communication de ces pièces et n'a pas prononcé un non-lieu à statuer à hauteur de ces cinquante cinq documents ;
Sur les conclusions dirigées contre le refus de communication des autres documents :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi susvisée n 78-753 du 17 juillet 1978 : "Sous réserve des dispositions de l'article 6, les documents administratifs sont de plein droit communicables aux personnes qui en font la demande, qu'ils émanent des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes, fussent-ils de droit privé, chargé de la gestion d'un service public", et qu'aux termes du second alinéa de l'article 7 de la même loi : "Lorsqu'il est saisi d'un recours contentieux contre un refus de communication, le juge administratif doit statuer dans le délai de six mois à compter de l'enregistrement de la requête" ; qu'aux termes de l'article 2 du décret susvisé n 88-465 du 28 avril 1988 : "Le silence gardé pendant plus d'un mois par l'autorité compétente, saisie d'une demande de communication de documents en application du titre 1er de la loi n 78-753 du 17 juillet 1978, vaut décision de refus. - En cas de refus exprès ou tacite, l'intéressé dispose d'un délai de deux mois à compter de la notification du refus ou de l'expiration du délai fixé au premier alinéa du présent article pour saisir la commission instituée à l'article 5 de la loi n 78-753 du 17 juillet 1978. - La saisine de la commission, dans les conditions prévues au deuxième alinéa du présent article, est obligatoire préalablement à tout recours contentieux. - La commission notifie, dans un délai d'un mois à compter de sa saisine, son avis à l'autorité compétente qui informe la commission, dans le mois qui suit la réception de cet avis, de la suite qu'elle entend donner à la demande. - Le silence gardé par l'autorité compétente pendant plus de deux mois à compter de la saisine de la commission par l'intéressé vaut décision de refus. - Le délai de recours contentieux est prorogé jusqu'à la notification à l'intéressé de la réponse de l'autorité compétente." ;
Considérant qu'il ressort des dispositions précitées que lorsqu'une demande de communication de documents administratifs a été rejetée par une décision explicite ou implicite de l'autorité administrative, ce refus ne peut être déféré directement au juge de l'excès de pouvoir ; que l'intéressé doit avoir au préalable saisi de ce refus, dans le délai du recours pour excès de pouvoir ayant couru contre cette décision, la commission prévue à l'article 5 de la loi, dite "commission d'accès aux documents administratifs" ; que, dans le cas où, au vu de l'avis exprimé par cette commission, l'autorité administrative compétente confirme son refus de communication, l'intéressé peut déférer cette décision au juge de l'excès de pouvoir jusqu'à l'expiration du délai de recours contentieux décompté à partir de la notification qui lui est faite d'une décision explicite de confirmation de refus de communication
Considérant, que le Syndicat Interco C.F.D.T. du département d'Indre-et-Loire soutient, qu'en réalité, il n'aurait pas reçu communication de toutes les pièces en possession du Département d'Indre-et-Loire concernant les femmes de ménage, lesquelles pourraient ainsi excéder cent cinq documents ; que si, contrairement d'ailleurs à ce qu'a jugé le Tribunal administratif, les contrats de travail et les décisions recrutant les employés ou femmes de ménage du Département même s'ils contiennent un ou plusieurs noms, ne présentent pas, à défaut de porter un jugement de valeur sur une personne physique nommément désignée, un caractère "nominatif" au sens des dispositions de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1978 et sont donc communicables, sous réserve de l'occultation préalable des éléments susceptibles de porter atteinte au secret de la vie privée des agents concernés, il ne ressort pas des pièces du dossier que ledit syndicat ait formulé une nouvelle demande au président du Conseil général d'Indre-et-Loire tendant à la communication des pièces manquantes, ni qu'il ait saisi à nouveau la commission d'accès aux documents administratifs, d'un refus du président du Conseil général de lui communiquer ces documents ; qu'ainsi, les conclusions relatives à la communication de ces documents sont irrecevables ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Syndicat Interco C.F.D.T. du département d'Indre-et-Loire n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Orléans a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel s'opposent à ce que le Département d'Indre-et-Loire qui, dans la présente instance, n'est pas la partie perdante, soit condamné à verser au Syndicat Interco C.F.D.T. du département d'Indre-et-Loire la somme qu'il demande au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens ;
Considérant, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le Syndicat Interco C.F.D.T. du département d'Indre-et-Loire à payer au Département d'Indre-et-Loire la somme qu'il demande au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 1er : L'article 2 du jugement du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Orléans du 2 février 1999 est annulé en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de la demande du Syndicat Interco C.F.D.T. du département d'Indre-et-Loire, sans prononcer un non-lieu à statuer à concurrence de cinquante cinq autres documents concernant les contrats et actes d'engagement des femmes de ménage du Département d'Indre-et-Loire communiqués avant l'audience audit syndicat.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande du Syndicat Interco C.F.D.T. du département d'Indre-et-Loire tendant à l'annu-lation de la décision implicite du président du Conseil général d'Indre-et-Loire de communiquer des contrats et actes d'engagement des femmes de ménage du Département d'Indre-et-Loire en tant qu'elles concernent les productions cinquante et un à cent cinq.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du Syndicat Interco C.F.D.T. du département d'Indre-et-Loire et les conclusions du Département d'Indre-et-Loire tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au Syndicat Interco C.F.D.T. du département d'Indre-et-Loire, au Département d'Indre-et-Loire et au Premier ministre.