Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 28 mai 1996, présentée pour :
- M. Yvon X..., demeurant ...,
- et pour l'association "55 SA : Pour le maintien du droit au service actif", dont le siège est "AS Peyrets", à Espanes (31450),
par Me Y..., avocat au barreau de Toulouse ;
Les requérants demandent à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 94-1824 du 26 mars 1996 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté la demande de M. X... tendant à l'annulation de la décision du directeur départemental de La Poste du Calvados du 21 avril 1994 rejetant sa demande d'admission à la retraite dès l'âge de cinquante cinq ans en application de l'article 20 de la loi de finances rectificative du 27 décembre 1975, et sa demande de renvoi devant l'administration pour liquidation de ses droits à pension ;
2 ) d'annuler la décision susvisée du 21 avril 1991 et de renvoyer M. X... devant l'administration pour liquidation de ses droits à pension ;
3 ) de condamner l'Etat à verser à M. X... une somme de 20 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu la loi de finances rectificative n 75-1242 du 27 décembre 1975, et notamment l'article 20 ;
Vu la loi n 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications ;
Vu le décret n 76-8 du 6 janvier 1976 modifiant le tableau des emplois classés dans la catégorie B annexé au décret n 54-832 du 13 août 1954 portant règlement d'administration publique pour la codification de lois et de règlements d'administration publique relatifs aux pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu le décret n 90-636 du 13 juillet 1990 fixant la date prévue à l'article 20 de la loi de finances rectificative pour 1975 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 1999 :
- le rapport de Mme LISSOWSKI, premier conseiller,
- et les conclusions de M. MILLET, commissaire du gouvernement ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L.24, I, du code des pensions civiles et militaires de retraite : "La jouissance de la pension civile est immédiate : - 1 pour les fonctionnaires civils radiés des cadres par limite d'âge ainsi que pour ceux qui ont atteint, à la date de la radiation des cadres, l'âge de soixante ans ou s'ils ont accompli au moins quinze ans de services actifs ou de la catégorie B, l'âge de cinquante cinq ans. Sont rangés dans la catégorie B les emplois présentant un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles. La nomenclature en est établie par décrets en Conseil d'Etat ..." ; qu'il résulte de ces dispositions que seuls peuvent être regardés comme faisant partie de la catégorie B les services actifs ou ceux effectués au titre d'un emploi inclus dans l'une des nomenclatures établies par l'un des décrets prévus par ce texte ;
Considérant que le décret susvisé du 6 janvier 1976, modifiant le tableau des emplois classés dans la catégorie B annexé au code des pensions civiles et militaires de retraite, a rangé dans la catégorie B, avec effet au 1er janvier 1975, les services effectués par les personnels de La Poste nommément désignés, employés à temps complet pendant des périodes continues de trois mois au moins, soit dans les centres de tri, soit, au service du tri, dans les recettes centralisatrices et dans les centres de chèques postaux ; que seuls les services accomplis dans ces emplois depuis l'entrée en vigueur de ce décret peuvent être pris en compte pour le calcul des quinze années de service exigées par l'article L.24 précité ;
Considérant qu'il ressort des affirmations non contestées de La Poste qu'au 1er novembre 1994, date par lui retenue pour bénéficier d'une pension de retraite, M. X..., agent de maîtrise de La Poste, ne justifiait pas de quinze ans de services actifs ou classés en catégorie B, effectués dans un service du tri postal à compter du 1er janvier 1975, l'intéressé n'ayant accompli que six mois et quatorze jours dans un tel service ; que M. X... ne saurait, dès lors, prétendre au bénéfice d'une pension à jouissance immédiate à l'âge de cinquante cinq ans en application de l'article L.24 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 20 de la loi de finances rectificative n 75-1242 du 27 décembre 1975 : "Pendant la période de modernisation des services du tri et jusqu'à une date qui sera fixée par décret, et dans la limite d'un contingent fixé annuellement par arrêté du secrétaire d'Etat aux postes et télécommunications, du ministre de l'économie et des finances et du ministre chargé de la fonction publique, les fonctionnaires des postes et télécommunications exerçant leurs fonctions dans les centres de tri ou au service du tri dans les recettes centralisatrices et les centres de chèques postaux dans un emploi classé en catégorie B ou active du point de vue de la retraite pourront, sur leur demande, être admis à la retraite dès l'âge de cinquante cinq ans avec le bénéfice d'une pension à jouissance immédiate, s'ils ont accompli quinze années de services effectifs dans les fonctions susmentionnées ou dans un emploi classé dans la catégorie B ou active du point de vue de la retraite. Ne seront pris en compte pour les services de tri que ceux effectués à temps complet pendant des périodes continues de trois mois au moins" ; qu'aux termes de l'article 1 du décret susvisé du 13 juillet 1990 : "la date prévue à l'article 20 de la loi de finances rectificative est fixée au 1er janvier 1992" ;
Considérant que le législateur ayant expressément habilité le pouvoir réglementaire à fixer cette date, les requérants ne sauraient soutenir que le décret du 13 juillet 1990 empiéterait sur le domaine réservé à la loi ; qu'il ne résulte pas des dispositions de l'article 20 précité de la loi de finances rectificative pour 1975 que la date à fixer devait nécessairement coïncider avec celle correspondant à la fin de la période de modernisation des services de tri ; que le décret du 13 juillet 1990, compte tenu de son objet, ne saurait en lui-même ni entraîner une rupture de l'égalité entre fonctionnaires d'un même corps, ni porter atteinte à des droits acquis dès lors qu'il a mis fin au régime dérogatoire conformément aux dispositions législatives susrappelées ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à invoquer, par voie d'excep-tion, l'illégalité dudit décret ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les dispositions de l'article 20 de la loi du 27 décembre 1975 n'étaient plus applicables lorsque M. X... a formé sa demande d'admission à la retraite à l'âge de cinquante cinq ans, cette demande ayant été présentée après la date du 1er janvier 1992 ; qu'il suit de là, que l'intéressé ne peut se prévaloir desdites dispositions pour justifier ses prétentions ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... et l'association "55 SA : Pour le maintien du droit au service actif" ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté la demande d'annulation de la décision du directeur départemental de La Poste du Calvados du 21 avril 1994 refusant de lui accorder une pension à jouissance immédiate à l'âge de cinquante cinq ans ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer aux requérants la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. Yvon X... et de l'association "55 SA : Pour le maintien du droit au service actif" est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Yvon X..., à l'association "55 SA : Pour le maintien du droit au service actif", à La Poste, au Service des pensions de La Poste et de France Télécom et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.