Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 mai 1997, présentée par l'Association "Société pour l'étude et la protection de la nature en Bretagne" (SEPNB) ayant son siège social ..., représentée par son président en exercice ;
L'Association "Société pour l'étude et la protection de la nature en Bretagne" demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 924699 en date du 6 mars 1997 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération en date du 15 juin 1992 par laquelle le conseil municipal de Guidel a approuvé le plan d'occupation des sols révisé de la commune ;
2 ) d'annuler ladite délibération ;
3 ) de condamner la commune de Guidel à lui verser une somme de 3 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 1999 :
- le rapport de Mme THOLLIEZ, premier conseiller,
- les observations de Me X..., se substituant à Me PITTARD, avocat de la commune de Guidel,
- et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;
Sur les fins de non-recevoir opposées à la requête par la commune de Guidel :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 9 des statuts de l'Association "Société pour l'étude et la protection de la nature en Bretagne (SEPNB) : "le président représente l'association dans tous les actes de la vie civile. Il ordonnance les dépenses. Il peut donner délégation dans des conditions qui sont fixées par le règlement intérieur. En cas de représentation en justice, le président ne peut être remplacé que par un mandataire agissant en vertu d'une procuration spéciale ..." ; qu'aucune autre stipulation ne réserve à un autre organe le pouvoir de décider d'engager une action en justice au nom de la fédération ; qu'ainsi le président de l'association requérante avait qualité pour former, au nom de cette association, appel du jugement rendu le 6 mars 1997 par le Tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à l'annulation de la délibération en date du 15 juin 1992 du conseil municipal de Guidel approuvant le plan d'occupation des sols révisé de la commune ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'association était demanderesse en première instance ; que, dès lors, elle a intérêt à faire appel du jugement qui a rejeté sa demande ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les fins de non-recevoir opposées à la requête par la commune de Guidel doivent être rejetées ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant que l'Association dénommée "Société pour l'étude et la protection de la nature en Bretagne" a pour buts aux termes de ses statuts de "sauvegarder, dans les départements des Côtes du Nord, du Finistère, d'Ille-et-Vilaine, de Loire-Atlantique, du Morbihan et éventuellement dans les départements limitrophes, la faune et la flore naturelles en même temps que les milieux dont elles dépendent, lorsque leur conservation s'impose par suite d'un intérêt scientifique, écologique ou esthétique caractérisé ..." ; qu'eu égard aux conséquences prévisibles de la mise en oeuvre du plan d'occupation des sols révisé de Guidel sur l'environnement dans l'estuaire de la Laïta, cette association a intérêt à demander l'annulation de la délibération approuvant ce plan d'occupation des sols ; que, par suite, c'est à tort que, par le jugement en date du 6 mars 1997, le Tribunal administratif de Rennes a déclaré sa demande irrecevable ; que ledit jugement doit, dès lors, être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer sur la demande présentée par la SEPNB devant le Tribunal administratif de Rennes ;
Considérant, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le président de l'association avait qualité pour former, au nom de celle-ci, un recours pour excès de pouvoir contre la délibération attaquée ; que la demande de l'association devant le Tribunal administratif de Rennes était, par suite, recevable ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article L.146-4-II du code de l'urbanisme : "L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n 86-2 du 3 janvier 1986 précitée doit être justifiée et motivée, dans le plan d'occupation des sols, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l'urbanisation est conforme aux dispositions d'un schéma directeur ou d'un schéma d'aménagement régional ou compatible avec celles d'un schéma de mise en valeur de la mer ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le secteur de Kerbrest, situé à moins de 500 m de la mer, doit être regardé comme un espace proche du rivage au sens des dispositions du II de l'article L.146-4 susrappelées ; que le schéma directeur de la région de Lorient, approuvé en 1981, ne prévoit pas l'urbanisation de ce secteur qui surplombe la vallée de la Laïta, vallée que le schéma classe parmi les sites qui doivent être sauvegardés en raison de leur beauté ou de leur intérêt écologique ; que, dès lors, en prévoyant le classement du secteur de Kerbrest en zone Nab, destiné à l'habitat et aux activités compatibles avec l'habitat et dont l'aménagement est prévu à long terme, le plan d'occupation des sols révisé de la commune de Guidel ne peut être regardé comme conforme aux dispositions du schéma directeur de la région de Lorient ; que le plan d'occupation des sols ne justifiant pas de l'urbanisation future de la zone par des critères tenant à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités exigeant la proximité immédiate de l'eau, le classement du secteur de Kerbrest en zone Nab méconnaît, par suite, les dispositions de l'article L.146-4-II du code de l'urbanisme ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SEPNB est fondée à demander l'annulation de la délibération en date du 15 juin 1992 du conseil municipal de Guidel approuvant la révision du plan d'occupation des sols de la commune en tant qu'elle classe le secteur de Kerbrest en zone Nab du plan d'occupation des sols ;
Sur les conclusions de la SEPNB et de la commune de Guidel tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que la SEPNB qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la commune de Guidel la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des mêmes dispositions de condamner la commune de Guidel à payer à la SEPNB la somme de 3 000 F qu'elle demande au titre de ces frais ;
Article 1er : Le jugement en date du 6 mars 1997 du Tribunal administratif de Rennes est annulé.
Article 2 : La délibération en date du 15 juin 1992 par laquelle le conseil municipal de Guidel a approuvé la révision du plan d'occupation des sols de la commune est annulée en tant qu'elle classe le secteur de Kerbrest en zone Nab du plan d'occupation des sols.
Article 3 : La commune de Guidel versera à l'Association "Société pour l'étude et la protection de la nature en Bretagne" une somme de trois mille francs (3 000 F) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Association "Société pour l'étude et la protection de la nature en Bretagne", à la commune de Guidel et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.