Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 12 août 1996, présentée pour Mme Pierrette X..., demeurant ..., par Me Y..., avocat au barreau de Caen ;
Mme X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 94928-94929 du 18 juin 1996 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté le surplus de ses demandes en décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie au titre des années 1985, 1986 et 1987 et des droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 1985 au 31 décembre 1987 ;
2 ) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3 ) de condamner l'administration aux entiers dépens et de lui accorder une indemnité de 30 000 F en remboursement des frais irrépétibles engagés pour les besoins de l'instance juridictionnelle, comprenant notamment le remboursement des honoraires d'avocat et du timbre fiscal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 avril 1999 :
- le rapport de M. ISAÏA, premier conseiller,
- et les conclusions de M. AUBERT, commissaire du gouvernement ;
Sur la contestation du forfait déterminé pour 1985 :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a constaté que le forfait de bénéfices industriels et commerciaux et de taxe sur le chiffre d'affaires assigné à Mme X... pour la période 1984-1985 avait été fixé sur la base d'une déclaration n 951 de l'année 1984 comportant des renseignements inexacts ; que la comptabilité du contribuable ne comportait pas de justificatifs de recettes ni de livre d'achats ; que Mme X... n'a pas souscrit la déclaration n 951 au titre de l'année 1985, malgré une mise en demeure ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit qu'en vertu de l'article L.8 du livre des procédures fiscales, le forfait relatif à l'année 1985 a été déclaré caduc et que, par application des dispositions de l'article L.5 du même livre, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires du Calvados a fixé un nouveau forfait en matière de bénéfices industriels et commerciaux et en matière de taxe sur la valeur ajoutée correspondant à un chiffre d'affaires de 511 649 F TTC ; qu'en vertu des articles L.191 et R.191-1 du livre des procédures fiscales, la charge de fournir tous éléments de nature à permettre d'apprécier l'importance des opérations et du bénéfice que l'entreprise peut produire normalement, compte tenu de sa situation propre, incombe au contribuable ;
Considérant, en deuxième lieu, que si Mme X..., qui exploite à Cabourg un bar brasserie à l'enseigne "L'Aquarium", soutient que la méthode de reconstitution appliquée aux résultats de l'année 1985 serait excessivement sommaire, il ne résulte pas de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas allégué que le vérificateur pouvait pour pallier les lacunes de la comptabilité et l'absence des tarifs pratiqués au cours de cette année, recourir à une méthode autre que celle consistant à extrapoler sur 1985 les données recueillies dans l'entreprise lors de la vérification de comptabilité en 1988 ; que la requérante n'établit pas que les conditions de son exploitation auraient varié dans des proportions interdisant cette extrapolation, alors que par ailleurs il résulte de l'instruction que lors de la fixation du forfait la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires a corrigé certains des éléments de calcul retenus par le vérificateur afin de tenir compte d'une légère modification des conditions d'exploitation entre 1985 et 1988 ;
Considérant, enfin, que compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus Mme X... ne peut apporter par sa comptabilité la preuve qui lui incombe ; que si elle soutient qu'elle fournissait gratuitement et journellement les pains au chocolat à la clientèle du club de plage voisin dont son mari était le directeur, que le pourcentage de 6 % pour pertes et offerts retenu par la commission départementale des impôts est nettement insuffisant, que le prix de vente de la bière était inférieur à celui pris en compte pour la reconstitution et que les doses d'apéritifs et d'alcools forts servis aux clients étaient au contraire plus importantes, elle n'assortit pas ces allégations et les calculs très détaillés qui les accompagnent de factures, tarifs et menus, bulletins de salaires de son personnel ou tout autre élément de nature extra-comptable qui pourraient justifier de leur caractère probant ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... n'établit pas, comme elle en a la charge, que le forfait fixé pour l'année 1985 tant en matière de bénéfice que de chiffre d'affaires aurait un caractère exagéré ; qu'en revanche, l'administration doit être regardée comme établissant que le seuil limite du forfait était dépassé au titre de cette même année ;
Sur les procédures d'imposition d'office appliquées au titre des années 1986 et 1987 :
Considérant, d'une part, que contrairement à ce que soutient Mme X..., lorsqu'à la suite d'un contrôle fiscal l'administration constate le dépassement pour la seconde année consécutive, des chiffres limites du forfait, aucune disposition législative ou réglementaire ne l'oblige à informer le contribuable de ce dépassement préalablement à l'envoi d'une mise en demeure de produire la déclaration relative au régime réel d'imposition ;
Considérant, d'autre part, qu'il est constant que le chiffre d'affaires réalisé par Mme X... au cours de l'année 1986 dépassait pour la deuxième année consécutive les limites du forfait ;
Considérant que, dans ces conditions et à défaut de souscription par Mme X... des déclarations relatives au régime réel d'imposition, c'est à bon droit que l'administration a fait application des procédures dévaluation d'office et de taxation d'office prévues par les articles L.73 et L.66 du livre des procédures fiscales ;
Sur le bien-fondé des impositions établies au titre des années 1986 et 1987 :
Considérant que les impositions dont il s'agit ayant été établies par voie d'imposition d'office, il appartient à Mme X..., en application des dispositions des articles L.193 et R.193-1 du livre des procédures fiscales, d'apporter la preuve du caractère exagéré des évaluations de l'administration ;
Considérant que les moyens soulevés par Mme X... à l'égard de ces impositions, rédigés dans des termes identiques à ceux articulés à l'encontre des impositions établies au titre de l'année 1985, doivent, par les mêmes motifs que précédemment, être écartés ; que si la requérante allègue que son exploitation a subi des pertes plus importantes que celles admises par le vérificateur et que certains achats n'étaient pas destinés à son activité commerciale, elle ne l'établit pas ; que la méthode de reconstitution qu'elle propose conduit à des résultats inférieurs aux montants déclarés ou portés sur le livre des recettes ; qu'ainsi, elle n'établit pas le caractère exagéré des impositions en litige ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté le surplus de ses demandes ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à Mme X... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de Mme X... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.