Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 février 1996, présentée pour M. et Mme X... demeurant ..., par la S.C.P. M. Y... et autres, avocat ;
M. et Mme X... demandent à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 92-3304 en date du 8 novembre 1995 du Tribunal administratif de Rennes en tant que ledit jugement a rejeté leurs conclusions tendant à ce que la ville de Quimper soit condamnée à leur verser, outre intérêts, la somme de 243 489 F en réparation du préjudice que leur a causé la décision en date du 18 mars 1991 du maire de Quimper les mettant en demeure d'arrêter l'activité de leur station de lavage de véhicules entre 22 h 00 et 7 h 00 ainsi que les dimanches et jours fériés ;
2 ) d'annuler ladite décision ;
3 ) de condamner la ville de Quimper à leur verser la somme de 243 489 F ;
4 ) de condamner la ville de Quimper à leur verser la somme de 10 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n 88-523 du 5 mai 1988 ;
Vu le code des communes ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mai 1998 :
- le rapport de M. MARGUERON, premier conseiller,
- les observations de M. et Mme X...,
- et les conclusions de Mme JACQUIER, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions indemnitaires :
Considérant que par une décision en date du 18 mars 1991, intervenue sur le fondement des dispositions du décret susvisé du 5 mai 1988 relatif aux règles propres à préserver la santé de l'homme contre les bruits de voisinage et de l'arrêté du 21 mars 1990 du préfet du Finistère complétant, ainsi que le prévoit l'article 2 du code de la santé publique, ledit décret, le maire de Quimper a mis en demeure M. et Mme X... de cesser immédiatement entre 22 heures et 7 heures l'activité de la station de lavage de véhicules qu'ils exploitaient et, à défaut de règlement avant le 31 mai suivant des problèmes de nuisances résultant de l'exploitation, de cesser également cette activité les dimanches et jours fériés ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.122-11 du code des communes, applicable en l'espèce : "Le maire est seul chargé de l'administration ; mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints ..." ;
Considérant que la décision du 18 mars 1991 a été signée par l'adjoint au maire de Quimper chargé de l'urbanisme et des travaux ; que si, par un arrêté de délégation du 29 mars 1989, le maire avait chargé cet adjoint, notamment, "de la coordination dans les domaines du stationnement, de la voirie et de l'environnement", cette délégation, qui n'était pas définie avec une précision suffisante et qui, au surplus, ne portait pas sur des matières entrant dans le champ d'application du décret précité du 5 mai 1988, ne pouvait, ainsi que le font valoir M. et Mme X..., lui conférer compétence pour signer la décision en cause ;
Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que le fonctionnement de la station de lavage exploitée par M. et Mme X... était à l'origine, pour le voisinage, de nuisances sonores de la nature et de l'importance de celles visées par le décret du 5 mai 1988 et l'arrêté préfectoral du 21 mars 1990 ; que les restrictions de fonctionnement prescrites dans la mise en demeure adressée aux intéressés et qui, contrairement à ce que soutiennent ceux-ci, n'avaient un caractère ni général, ni absolu, n'excédaient pas ce qui était strictement nécessaire à la préservation de la tranquillité publique ; que la circonstance que la station de lavage avait été réalisée conformément au permis de construire délivré pour sa réalisation, au titre de la législation de l'urbanisme, est sans incidence sur la légalité de ces mesures de restrictions de fonctionnement, prises sur le fondement d'une législation distincte ; qu'il n'est pas établi par les éléments du dossier que ces mêmes mesures auraient été édictées dans un but autre que cette préservation ;
Considérant que, dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation du préjudice résultant de l'illégalité, tenant à l'incompétence de son signataire, dont est entachée la décision du 18 mars 1991 en condamnant la ville de Quimper à verser à M. et Mme X... une indemnité de 10 000 F, y compris tous intérêts échus au jour du présent arrêt ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a entièrement rejeté leurs conclusions tendant à la condamnation de la ville de Quimper à leur verser une indemnité ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant que les conclusions de M. et Mme X... tendant à l'annulation de la décision du 18 mars 1991 du maire de Quimper constituent une demande nouvelle, irrecevable en appel, et doivent, par suite, être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant que la ville de Quimper succombe dans la présente instance; que sa demande tendant à ce que M. et Mme X... soient condamnés à lui verser une somme au titre des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel doit, en conséquence, être rejetée ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, en application des mêmes dispositions, de condamner la ville de Quimper à payer à M. et Mme X... la somme de 6 000 F ;
Article 1er : Le jugement en date du 8 novembre 1995 du Tribunal administratif de Rennes est annulé.
Article 2 : La ville de Quimper est condamnée à verser à M. et Mme X... une somme de dix mille francs (10 000 F).
Article 3 : La ville de Quimper versera à M. et Mme X... une somme de six mille francs (6 000 F) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X... ensemble les conclusions de la ville de Quimper tendant au bénéfice de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetés.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme X..., à la ville de Quimper et au ministre de l'intérieur.