Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 mars 1997, présentée pour Mme Aïcha X..., demeurant ... par Me Y..., avocat ;
Mme X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 95-257 du 13 janvier 1997 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, des décisions du 10 février 1993 et du 19 juillet 1994 par lesquelles le ministre chargé des naturalisations a déclaré irrecevable sa demande de naturalisation et, d'autre part, de la décision du 25 mai 1994 par laquelle le préfet des Yvelines a refusé d'enregistrer les pièces déposées le 10 mai 1994 en vue de la constitution d'un nouveau dossier ;
2 ) d'annuler lesdites décisions pour excès de pouvoir ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, notamment son article R.27 ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 février 1998 :
- le rapport de Mme STEFANSKI, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme JACQUIER, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision du préfet des Yvelines en date du 25 mai 1994 :
Considérant que la décision du 25 mai 1994 par laquelle le préfet des Yvelines s'est opposé à ce que Mme X... présente une nouvelle demande de naturalisation, a été retirée par une décision du 28 novembre 1996 postérieure à l'introduction de la demande devant le tribunal administratif ; que les conclusions tendant à l'annulation de cette décision étaient ainsi devenues sans objet ; qu'il y a lieu dès lors d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions dirigées contre ladite décision et de décider qu'il n'y a pas lieu à statuer sur ces conclusions ;
Sur la recevabilité du surplus des conclusions de la demande de première instance :
Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que la décision du 10 février 1993 par laquelle le ministre a opposé l'irrecevabilité à la demande de naturalisation de Mme X..., lui a été notifiée avec l'indication des voies et délais de recours le 17 mai 1993 ; que le recours gracieux de l'intéressée en date du 6 juillet 1994 a été présenté après l'expiration du délai de recours contentieux qu'il n'a donc pu conserver ; que, dès lors, les conclusions de Mme X... tendant à l'annulation de cette décision, étaient irrecevables comme tardives ;
Considérant, d'autre part, qu'eu égard aux circonstances de fait nouvelles tenant à la naissance d'un enfant, la nouvelle décision d'irrecevabilité opposée par le ministre le 19 juillet 1994 et notifiée à l'intéressée le 8 août 1994, n'avait pas un caractère confirmatif ; qu'en conséquence, la demande de Mme X..., enregistrée au greffe du tribunal administratif le 22 septembre 1994, n'était pas irrecevable en tant qu'elle demandait l'annulation de cette dernière décision ;
Sur la légalité de la décision du ministre en date du 19 juillet 1994 :
Considérant qu'aux termes de l'article 21-16 du code civil : "Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de nationalité" ; qu'il résulte de ces dispositions que la demande de naturalisation n'est pas recevable lorsque l'intéressé n'a pas fixé en France de manière stable le centre de ses intérêts ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X..., qui est arrivée en France en 1965 au titre du regroupement familial alors qu'elle était âgée d'un an et dont six des huit frères et soeurs ont la nationalité française, y a résidé depuis lors sans interruption ; que, de son mariage contracté en 1991 avec un ressortissant marocain, était né à la date de la décision attaquée un enfant qui vit avec sa mère ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme X... qui avait exercé une activité professionnelle depuis au moins 1989 ne disposait pas de revenus suffisants pour subvenir à ses besoins et à ceux de ses enfants ; que, dans ces conditions, et alors même qu'à la date de la décision contestée l'époux de Z...
X... vivait au Maroc faute d'avoir été autorisé à résider en France, le ministre de l'emploi et de la solidarité s'est livré à une appréciation erronée des circonstances de l'affaire en estimant que, du seul fait de la présence à l'étranger de M. X..., l'intéressée n'avait pas en France le centre de ses intérêts et qu'ainsi, sa demande de naturalisation était irrecevable ; que, par suite, Mme X... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande dirigée contre la décision du ministre en date du 19 juillet 1994 ;
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de Mme X... dirigées contre la décision susmentionnée du 25 mai 1994.
Article 2 : La décision du 19 juillet 1994 du ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville est annulée.
Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 13 janvier 1997 est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles précédents.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'emploi et de la solidarité et à Mme X....