Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 12 février 1996, présentée pour le Syndicat Intercommunal d'Electrification de Pipriac (S.I.E.P.), représenté par son président, par la S.C.P. ARION, GUYOT, GARNIER, GUYOT-GARNIER, LOZAC'HMEUR, BOIS, DOULLOU, PERSON, SOUET, ARION Ph., avocat ;
Le syndicat demande à la Cour :
1 ) de réformer le jugement n 95-1156 en date du 10 janvier 1996 par lequel le Tribunal administratif de Rennes, statuant sur sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 7 avril 1995 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a modifié les statuts du Syndicat départemental d'électrification (S.D.E.) d'Ille-et-Vilaine, n'a annulé cet arrêté qu'en tant qu'il prévoit à son article 2-8 -c que le syndicat départemental perçoit la taxe sur les fournitures d'électricité visée à l'article L.233-1 du code des communes ;
2 ) d'annuler en totalité ledit arrêté ;
3 ) de condamner l'Etat et le Syndicat départemental d'électrification d'Ille-et-Vilaine à lui verser la somme de 10 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, au titre tant de la première instance que de l'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 septembre 1997 :
- le rapport de M. MARGUERON, conseiller,
- les observations de Me BOIS, avocat du Syndicat Intercommunal d'Electrification de Pipriac,
- les observations de Me VALADOU, avocat du Syndicat départemental d'électrification d'Ille-et-Vilaine,
- et les conclusions de Mme DEVILLERS, commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.166-1 du code des communes, applicable en l'espèce eu égard à la date de l'arrêté attaqué : " ...Des syndicats mixtes peuvent être constitués par accord entre des institutions d'utilité commune interrégionales, des régions, des ententes ou des institutions interdépartementales des départements, des communautés urbaines, des districts, des syndicats de communes, des communes, des chambres de commerce et d'industrie, d'agriculture, de métiers et autres établissements publics, en vue d'oeuvres ou de services présentant une utilité pour chacune de ces personnes morales. Ces syndicats doivent comprendre au moins une collectivité territoriale ou un groupement de ces collectivités" ; qu'aux termes de l'article L.166-5 du même code, également relatif aux syndicats mixtes : "Les syndicats qui ne comprennent pas d'autres personnes morales que des communes, des syndicats de communes ou des districts, restent soumis aux dispositions du chapitre III du présent titre" ; qu'il résulte de la combinaison de ces textes que les dispositions relatives aux syndicats de communes, et notamment celles relatives aux règles de majorité régissant la création ou la modification de ces derniers, contenus au chapitre III du titre VI du livre premier du code des communes auquel renvoie son article L.166-5, ne sont applicables qu'aux seuls syndicats mixtes qui ne comprennent pas d'autres personnes morales que des communes, des syndicats de communes ou des districts ; que dès lors qu'un syndicat mixte comprend d'autres personnes morales, toute décision de création ou de modification le concernant ne peut intervenir en dehors d'un accord de tous ses membres, conformément aux dispositions précitées de l'article L.166-1 ;
Considérant que l'arrêté du 7 avril 1995 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a modifié les statuts du Syndicat départemental d'électrification d'Ille-et-Vilaine a eu pour objet, notamment, de porter des communautés de communes au nombre des membres de ce syndicat, lequel ne comprenait jusqu'alors que des communes et des syndicats de communes ; qu'ainsi, nonobstant les circonstances que l'arrêté du 26 octobre 1964 qui l'avait autorisé ait visé les seules dispositions du code de l'administration communale alors en vigueur relatives aux syndicats de communes et que les communautés de communes dont s'agit auraient résulté de la transformation d'anciens syndicats de communes, cet arrêté a eu pour effet, en réalité, d'exclure le syndicat départemental d'électrification d'Ille-et-Vilaine, qui était par nature un syndicat mixte, du champ d'application de l'article L.166-5 du code des communes, et d'instituer un syndicat mixte relevant des dispositions de l'article L.166-1 de ce code ; que, dès lors, il ne pouvait légalement intervenir sans l'accord de toutes les personnes morales intéressées ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le Syndicat Intercommunal d'Electrification de Pipriac, membre du syndicat départemental d'électrification d'Ille-et-Vilaine, a émis un avis défavorable au projet de modification statutaire approuvé par l'arrêté du 7 avril 1995 ; que ce syndicat, qui est recevable à soulever pour la première fois en appel ce moyen qui ne repose pas sur une cause juridique distincte de celles invoquées par lui devant les premiers juges, est ainsi fondé à soutenir que l'arrêté, pris sans son accord, est intervenu sur une procédure irrégulière et, par suite, à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il n'a pas fait entièrement droit à ses conclusions tendant à l'annulation dudit arrêté ; que les conclusions d'appel incident du syndicat départemental d'électrification d'Ille-et-Vilaine dirigée contre la partie du même jugement qui a prononcé l'annulation partielle de l'arrêté doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que le Syndicat départemental d'électrification d'Ille-et-Vilaine succombe dans la présente instance ; que sa demande tendant à ce que le Syndicat Intercommunal d'Electrification de Pipriac soit condamné à lui verser une somme au titre des frais qu'il a exposés doit, en conséquence, être rejetée ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions précitées, de condamner l'Etat et le Syndicat départemental d'électrification d'Ille-et-Vilaine à payer chacun au Syndicat Intercommunal d'Electrification de Pipriac la somme de 4 000 F ;
Article 1er : Le jugement en date du 10 janvier 1996 du Tribunal administratif de Rennes, en tant qu'il n'a pas fait entièrement droit aux conclusions du Syndicat Intercommunal d'Electrification de Pipriac tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 7 avril 1995 du préfet d'Ille-et-Vilaine, ensemble ledit arrêté sont annulés.
Article 2 : L'Etat et le Syndicat départemental d'électrification d'Ille-et-Vilaine verseront chacun au Syndicat Intercommunal d'Electrification de Pipriac une somme de quatre mille francs (4 000 F) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 3 : Les conclusions du Syndicat départemental d'électrification d'Ille-et-Vilaine et le surplus des conclusions du Syndicat Intercommunal d'Electrification de Pipriac sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au Syndicat Intercommunal d'Electri-fication de Pipriac, au Syndicat départemental d'électrification d'Ille-et-Vilaine et au ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.