Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 23 février 1995, présentée pour Mme X..., demeurant ..., par la SCP Druais-Doucet-Michel, avocat ;
Mme X... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 924077 en date du 28 décembre 1994 du tribunal administratif de Rennes en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre exécutoire établi à son encontre par la commune de Plérin pour avoir paiement de la somme de 128 386 F et en ce qu'il l'a condamnée à verser à la commune les intérêts de cette somme dus à compter du 1er octobre 1992 ainsi que 5 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
2 ) d'annuler ce titre et subsidiairement d'ordonner une expertise en vue de déterminer le coût des travaux que la commune n'a pas réalisés ainsi que le prévoyait le contrat conclu ainsi que l'importance des dégradations causées à la végétation par les travaux de construction du mur ;
3 ) de condamner la commune à lui payer 5 000 F sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 1996 :
- le rapport de Mme Devillers, conseiller,
- les observations de Me Y..., se substituant à Me Druais, avocat de Mme X..., de Me Bois, avocat de la commune de Plérin,
- et les conclusions de M. Cadenat, commissaire du gouvernement,
Considérant que, par un contrat conclu en septembre 1990 entre M. et Mme X... et la commune de Plérin, cette dernière s'est engagée, notamment, à construire un mur de protection de la propriété des époux X... en contrepartie de la cession gratuite par ceux-ci d'une bande de terrain destinée par la commune à l'aménagement d'une promenade publique et du versement d'une somme de 928 386 F ; qu'estimant que la commune n'avait pas respecté ses engagements contractuels relatifs à ce mur et que la réalisation de celui-ci avait causé des dommages dont elle serait en droit d'obtenir réparation, Mme X..., après avoir réglé la somme de 800 000 F, s'est opposée à l'exécution du titre exécutoire émis par la commune pour avoir paiement du solde du contrat, soit 128 386 F ; que, par son jugement du 28 décembre 1994, après avoir admis que la commune n'avait pas tenu ses engagements contractuels concernant la hauteur du mur et que le rehaussement de celui-ci s'élèverait, selon les éléments fournis par Mme X... à environ 40 000 F, le tribunal administratif a relevé qu'à concurrence de cette somme, la commune avait effectué des travaux de plantations et d'engazonnement de la propriété auxquels elle n'était pas tenue et que, par compensation entre les deux sommes, le titre exécutoire était fondé ; que le tribunal administratif a rejeté en conséquence la demande de Mme X..., l'a condamnée à verser 5 000 F à la commune au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et, faisant droit partiellement aux conclusions reconventionnelles de la commune, l'a condamnée en outre à lui verser les intérêts, au taux légal, à compter du 1er octobre 1992, de la somme de 128 386 F ; que Mme X... demande à la cour de surseoir à l'exécution de ce jugement et de l'annuler en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre exécutoire contesté et en ce qu'il a prononcé des condamnations à son encontre ;
Sur le principe de la compensation opérée par les premiers juges :
Considérant qu'il est constant que les travaux d'engazonnement et de plantations réalisés par la commune sur la propriété de M. et Mme X... n'étaient prévus ni par le contrat de septembre 1990 ni par aucun autre contrat conclu entre les parties ; qu'ainsi la créance que détiendrait la commune à raison de ces travaux sur Mme X..., à supposer même qu'elle fût liquide et exigible, est d'une nature différente de celle que l'intéressée aurait sur la commune du fait de la méconnaissance par cette dernière du contrat conclu en septembre 1990 ; que, dans ces conditions, aucune compensation n'était possible entre ces deux créances ; que Mme X... est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont opéré cette compensation ;
Sur le montant des travaux de rehaussement du mur :
Considérant que, selon le contrat conclu entre les parties, la commune devait édifier un mur de "2,20 mètres de hauteur par rapport au niveau de la promenade" ; que ces stipulations doivent être regardées comme précisant que la hauteur du mur doit être mesurée au pied de celui-ci du côté de la promenade et non pas à l'axe médian de celle-ci, comme l'affirme la commune ; qu'ainsi, c'est à bon droit que les premiers juges ont fondé leur décision sur le fait que la hauteur du mur était non pas de 2,20 m comme prévu au contrat mais de 2,05 m ;
Considérant que Mme X... ne produit aucun élément de nature à démontrer que l'estimation des travaux de rehaussement du mur dont elle s'est prévalue en première instance, soit 39 925,52 F, correspondant très exactement au rehaussement de 15 cm sur toute la longueur du mur, soit 260 mètres, ne reflétait pas les données économiques du marché et ne pouvait, en conséquence, valablement fonder la décision des premiers juges ; qu'aucune expertise n'était ainsi utile à la solution du litige dont le tribunal administratif était saisi ; que, pour la même raison, l'expertise sollicitée en appel ne peut être ordonnée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'à concurrence de la somme de 39 925,52 F, le titre exécutoire émis par la commune n'est pas fondé ;
Sur les dommages causés au parc par les travaux réalisés en exécution du contrat :
Considérant qu'en admettant même que les travaux réalisés en exécution du contrat conclu en septembre 1990 aient causé à la propriété de Mme X... des dommages dont elle serait en droit d'obtenir réparation, sur le fondement de la responsabilité pour dommages de travaux publics, la créance dont l'intéressée serait susceptible de se prévaloir à ce titre n'étant certaine ni dans son principe ni dans son montant ne pourrait, en tout état de cause, se compenser avec celle que la commune détient à son encontre ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a entièrement rejeté sa demande, l'a condamnée d'une part, à verser 5 000 F à la commune sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, d'autre part, à payer à la commune les intérêts de la somme de 128 386 F ;
Sur les intérêts de la somme de 128 386 F :
Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit, la somme dont Mme X... est redevable envers la commune de Plérin ne s'élève pas à 128 386 F mais seulement à 88 460,48 F ; que, par suite, les intérêts que le tribunal administratif a condamné Mme X... à verser à la commune par l'article 2 de son jugement doivent être appliqués non à la somme de 128 386 F mais à celle de 88 460,48 F ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de condamner la commune de Plérin à verser 4 000 F à Mme X... sur le fondement de ces dispositions ;
Considérant que la commune de Plérin succombe dans la présente instance ; que sa demande tendant à ce que Mme X... soit condamnée à lui verser une somme au titre des frais qu'elle a exposés doit, en conséquence, être rejetée ;
Article 1er - Les articles 1 et 4 du jugement n 924077 du 28 décembre 1994 du tribunal administratif de Rennes sont annulés.
Article 2 - Le titre exécutoire émis par la commune de Plérin à l'encontre de Mme X... est annulé en ce qu'il excède la somme de quatre vingt huit mille quatre cent soixante francs quarante huit centimes (88 460,48 F).
Article 3 - La somme de cent vingt huit mille trois cent quatre vingt six francs (128 386 F) mentionnée à l'article 2 du jugement du tribunal administratif est ramenée à quatre vingt huit mille quatre cent soixante francs quarante huit centimes (88 460,48 F).
Article 4 - L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Rennes est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 - La commune de Plérin versera quatre mille francs (4 000 F) à Mme X... sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 6 - Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... ainsi que les conclusions de la commune de Plérin tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetés.
Article 7 - Le présent arrêt sera notifié à Mme X..., à la commune de Plérin et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme.