VU l'ordonnance, en date du 23 septembre 1992, enregistrée au greffe de la cour le 18 décembre 1992, par laquelle le président de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article R.80 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la requête présentée pour M. Louis X..., demeurant 11, place Carnot, 35300, FOUGERES et pour la SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE TRANSPORTS GELIN, dont le siège est à la ..., par Me MASSART, avocat ;
VU la requête, enregistrée au secrétariat de la Section du contentieux du Conseil d'Etat le 3 août 1992 et le mémoire d'appel enregistré au greffe de la cour le 16 février 1993 ;
M. X... et la SARL TRANSPORTS X... demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 11 juin 1992 par lequel le tribunal administratif de NANTES a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Mayenne du 23 décembre 1991 rejetant leur opposition formée contre un état exécutoire d'un montant de 500 000 F édicté à leur encontre ainsi qu'à la condamnation de l'Etat au paiement de la somme de 7 500 F au titre des frais irrépétibles ;
2°) de prononcer la décharge de la somme susvisée de 500 000 F ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la loi n° 75-633 du 15 juillet 1975 relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux ;
VU la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement et le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 pris pour son application ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 septembre 1994 :
- le rapport de M. BRUEL, conseiller,
- les observations de Me MASSART, avocat de M. X... et de la SARL TRANSPORTS X...,
- et les conclusions de M. CADENAT, commissaire du gouvernement,
Considérant que par un état exécutoire du 27 septembre 1991 M. X... a été assujetti par le préfet de la Mayenne, sur le fondement des dispositions de l'article 3 de la loi du 15 juillet 1975 et de l'article 23 de la loi du 19 juillet 1976, à la consignation d'une somme de 500 000 F correspondant au montant des travaux à exécuter, en application d'un arrêté préfectoral du 7 mars 1991, pour la réhabilitation du dépôt de déchets industriels qu'il exploitait sans autorisation au lieu-dit "Les Vaux" sur le territoire de la commune de Saint Ellier du Maine et l'acheminement des déchets qui y avaient été déposés vers une décharge habilitée à les recevoir ; que M. X... et la SARL TRANSPORTS X... font appel du jugement en date du 11 juin 1992 par lequel le tribunal administratif de NANTES a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 décembre 1991 du préfet de la Mayenne rejetant leur opposition formée contre l'état exécutoire susvisé ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que les requérants soutiennent que le jugement attaqué est irrégulier pour avoir omis de statuer sur l'un des moyens qu'ils avaient soulevés et tiré de ce que les produits toxiques dont l'existence a été relevée dans la décharge avaient été déposés par un tiers qui aurait ensuite dénoncé M. X... à l'administration ;
Considérant que, comme l'ont relevé les premiers juges, et ainsi, d'ailleurs, que l'a constaté le tribunal de grande instance de RENNES par jugement du 26 juin 1992, les déchets entreposés dans la décharge précitée et les substances chimiques à base notamment de phénol et de chrome que les analyses en laboratoire ont permis de mettre en évidence constituaient un risque de pollution tant des eaux de surface que du sous-sol et des eaux souterraines ; qu'ainsi, compte tenu de ces risques et à défaut pour M. X... de s'être conformé à la mise en demeure qui lui avait été adressée de procéder à l'élimination de ces déchets, l'administration était fondée à recourir à la procédure de consignation prévue par les dispositions législatives précitées ; que la circonstance, à la supposer établie, que les produits en cause n'auraient pas été déversés par l'exploitant de la décharge est inopposable à l'administration ; que, dès lors, le moyen susanalysé était inopérant à l'encontre de la légalité de la décision préfectorale attaquée du 23 décembre 1991 ; qu'en s'abstenant d'écarter par des motifs explicites ledit moyen, le tribunal administratif, à supposer même qu'il ait mal interprété celui-ci, n'a donc pas entaché son jugement d'un vice de nature à en entraîner l'annulation ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Mayenne du 23 décembre 1991 ;
Considérant que les requérants soutiennent, en versant au dossier des photographies du site des Vaux prises le 25 juillet 1992, que les travaux préconisés par le préfet de la Mayenne dans son arrêté précité du 7 mars 1991 ont été entièrement exécutés et qu'une expertise permettrait de démontrer que la parcelle en cause n'est génératrice d'aucune pollution ; qu'il résulte toutefois de l'instruction, et notamment de deux rapports de l'inspecteur des installations classées en date des 1er décembre 1992 et 23 février 1993, que, bien que l'ensemble du site ait été recouvert de terre végétale et le relief de la zone sur laquelle était située la décharge sensiblement atténué, aucune des prescriptions de l'arrêté n'a été respectée hormis la cessation de l'exploitation de la décharge ; qu'en particulier, ces rapports relèvent que les bons d'acceptation des déchets par les centres d'enfouissement techniques agréés qui ont été présentés à l'inspecteur ne sont pas probants, ni en ce qui concerne l'origine de ces déchets, ni en ce qui concerne leur composition et leur volume, et qu'au demeurant les travaux d'enlèvement, effectués sans aucun contrôle de l'administration, n'ont porté que sur une centaine de tonnes de déchets, alors que l'estimation du volume à éliminer était de 1 600 tonnes minimum ; que, dans ces conditions, il n'est pas établi que la totalité des déchets aurait été enlevée et qu'ainsi les mesures prescrites seraient devenues sans objet ; que, par suite, sans qu'il y ait lieu pour la cour d'ordonner l'expertise demandée par les requérants, qui ne pourrait être que frustratoire, c'est à bon droit que le préfet de la Mayenne a émis l'état exécutoire litigieux et rejeté l'opposition formée contre celui-ci ;
Considérant, enfin, que les moyens tirés de ce que la juridiction judiciaire n'aurait pas, contrairement à ce que soutient le ministre, ordonné la remise en état des lieux, ou de ce que, au demeurant, cette remise en état n'avait pas à être assurée sous le contrôle d'un expert, sont sans incidence sur le bien-fondé des décisions prises par le préfet de la Mayenne sur le fondement des dispositions de la loi du 15 juillet 1975 et de la loi du 19 juillet 1976 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... et la SARL TRANSPORTS X... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de NANTES a rejeté leur demande ;
Sur l'amende :
Considérant qu'aux termes de l'article R.88 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans le cas de requête jugée abusive, son auteur encourt une amende qui ne peut excéder 20 000 F" ; qu'en l'espèce, la requête de M. X... et de la SARL TRANSPORTS X... présente un caractère abusif ; qu'il y a lieu de condamner M. X... et la SARL TRANSPORTS X... à payer chacun une amende de 1 500 F ;
Article 1er - La requête de M. X... et de la SARL TRANSPORTS X... est rejetée.
Article 2 - M. X... et la SARL TRANSPORTS X... sont condamnés à payer chacun une amende de mille cinq cents francs (1 500 F).
Article 3 - Le présent arrêt sera notifié à M. X..., à la SARL TRANSPORTS X... et au ministre de l'environnement. Copie sera transmise au Trésorier payeur général de la Mayenne.