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10/06/1993 | FRANCE | N°91NT00850;91NT00851

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2e chambre, 10 juin 1993, 91NT00850 et 91NT00851


VU les deux recours enregistrés le 15 novembre 1991 au greffe de la Cour présentés par le SECRETAIRE D'ETAT A LA MER ;
Le SECRETAIRE D'ETAT A LA MER demande à la Cour d'annuler :
1°) le jugement avant-dire-droit du 18 mars 1988 par lequel le Tribunal administratif de ROUEN a déclaré l'Etat responsable du préjudice subi par la Compagnie Irish Continental Lines du fait du blocage du port du Havre intervenu au mois d'août 1980 ;
2°) le jugement du 24 septembre 1991 par lequel ce même tribunal a condamné l'Etat à payer à la Compagnie Irish Continental Lines la somme de 1

249 587 F avec les intérêts à compter du 31 août 1981 et les intérêts ...

VU les deux recours enregistrés le 15 novembre 1991 au greffe de la Cour présentés par le SECRETAIRE D'ETAT A LA MER ;
Le SECRETAIRE D'ETAT A LA MER demande à la Cour d'annuler :
1°) le jugement avant-dire-droit du 18 mars 1988 par lequel le Tribunal administratif de ROUEN a déclaré l'Etat responsable du préjudice subi par la Compagnie Irish Continental Lines du fait du blocage du port du Havre intervenu au mois d'août 1980 ;
2°) le jugement du 24 septembre 1991 par lequel ce même tribunal a condamné l'Etat à payer à la Compagnie Irish Continental Lines la somme de 1 249 587 F avec les intérêts à compter du 31 août 1981 et les intérêts des intérêts à la date du 6 mars 1991 et de mettre à la charge de ladite compagnie les frais d'expertise engagés dans cette affaire ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des ports maritimes ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mai 1993 :
- le rapport de M. BOURDERIOUX, président rapporteur,
- les observations de Me X..., se substituant à Me GODIN, avocat de la Compagnie Irish Continental Lines,
- et les conclusions de M. CHAMARD, commissaire du gouvernement,

Considérant que les recours du SECRETAIRE D'ETAT A LA MER présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la fin de non recevoir soulevée par la Compagnie Irish Continental Lines :
Considérant qu'aux termes de l'article R.229 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois ... Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, le délai d'appel contre un jugement avant-dire-droit, qu'il tranche ou non une question au principal, court jusqu'à l'expiration du délai d'appel contre le jugement qui règle définitivement le fond du litige" ; que si le jugement susvisé en date du 18 mars 1988 a tranché la question de la responsabilité de l'Etat, il constitue néanmoins un jugement avant-dire-droit au sens des dispositions précitées et le jugement règlant définitivement le litige est constitué par celui susvisé du 24 septembre 1991 ; qu'ainsi, les recours du ministre enregistrés le 15 novembre 1991 et dirigés contre ces deux jugements ont été déposés dans le délai de deux mois ayant couru après le second jugement ; que, dès lors, les recours sont recevables ;
Au fond :
Considérant que les dommages résultant de l'abstention, de la part des autorités chargées de la police des ports maritimes, de prendre les mesures nécessaires pour permettre l'utilisation normale du domaine public portuaire, ne sauraient être regardés, lorsque cette abstention n'est pas fautive, comme imposant une charge anormale aux armateurs et de ce fait comme engageant à leur égard la responsabilité de l'Etat, que si cette abstention excède une certaine durée et engendre de ce fait un préjudice anormal et spécial ; que dans les circonstances de l'affaire, la suppression, au port du Havre, au mois d'août 1980, de deux escales du car-ferry "Saint-Patrick II" et celle de trois escales du navire "Saint-Killian II" n'étaient pas de nature à ouvrir droit à réparation à la société défenderesse sur le fondement de la rupture d'égalité devant les charges publiques ; que, dès lors, le SECRETAIRE D'ETAT A LA MER est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de ROUEN a estimé que la responsabilité de l'Etat était engagée à l'expiration d'un délai de vingt-quatre heures ;
Considérant qu'il appartient à la cour d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par la Compagnie Irish Continental Lines devant le tribunal administratif ;
Considérant, que l'obligation, incombant aux autorités chargées de la police des ports maritimes, de faire lever les obstacles qui s'opposent à l'utilisation normale des installations portuaires trouve sa limite dans les nécessités de l'ordre public ; que dans les circonstances de l'espèce, eu égard à l'ampleur du mouvement déclenché par les marins-pêcheurs, lesdites autorités, en s'abstenant d'utiliser la force publique pour rompre le barrage établi dans le port du Havre n'ont pas commis de faute lourde de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le SECRETAIRE D'ETAT A LA MER est fondé à demander l'annulation des jugements attaqués, par lesquels le Tribunal administratif de ROUEN a condamné l'Etat à réparer une partie du préjudice subi par la Compagnie Irish Continental Lines ; que, par voie de conséquence les conclusions incidentes de ladite compagnie ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, les frais engagés en vue de l'expertise ordonnée par le Tribunal administratif de ROUEN doivent être mis à la charge de la Compagnie Irish Continental Lines ;
Article 1er - Les jugements du Tribunal administratif de ROUEN en date du 18 mars 1988 et du 24 septembre 1991 sont annulés.
Article 2 - La demande tendant à la condamnation de l'Etat présentée par la Compagnie Irish Continental Lines devant le Tribunal administratif de ROUEN est rejetée.
Article 3 - Les conclusions incidentes présentées par la Compagnie Irish Continental Lines sont rejetées.
Article 4 - Les frais de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif sont mis à la charge de la Compagnie Irish Continental Lines.
Article 5 - La présente décision sera notifiée au SECRETAIRE D'ETAT A LA MER et à la Compagnie Irish Continental Lines.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 91NT00850;91NT00851
Date de la décision : 10/06/1993
Type d'affaire : Administrative

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICES DE POLICE - POLICE DES PORTS.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - PREJUDICE - - CARACTERE SPECIAL ET ANORMAL DU PREJUDICE.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R229


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. BOURDERIOUX
Rapporteur public ?: M. CHAMARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1993-06-10;91nt00850 ?
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