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07/05/1991 | FRANCE | N°89NT00418

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1e chambre, 07 mai 1991, 89NT00418


VU l'ordonnance du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 1ère sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de NANTES le dossier de la requête sommaire et du mémoire ampliatif présentés par la COMMUNE DE MAUVES-SUR-LOIRE et enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 11 août et 12 décembre 1988 sous le n° 100987 ;
VU la requête susmentionnée présentée pour la COMMUNE DE MAUVES-SUR-LOIRE (Loire-Atlantique), représentée par son maire en exercice, par la S.C.P. H. Masse-Dessen, B. Georges,

avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, et enregistrée ...

VU l'ordonnance du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 1ère sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de NANTES le dossier de la requête sommaire et du mémoire ampliatif présentés par la COMMUNE DE MAUVES-SUR-LOIRE et enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 11 août et 12 décembre 1988 sous le n° 100987 ;
VU la requête susmentionnée présentée pour la COMMUNE DE MAUVES-SUR-LOIRE (Loire-Atlantique), représentée par son maire en exercice, par la S.C.P. H. Masse-Dessen, B. Georges, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, et enregistrée au greffe de la Cour sous le n° 89NT00418 ;
La commune demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1357/85 du 7 avril 1988 par lequel le Tribunal administratif de Nantes l'a condamnée à verser à la société anonyme Gauthier la somme de 316 722,41 F, avec intérêts de droit, en réparation du préjudice subi du fait de son éviction illégale du marché de construction d'un ensemble sportif couvert avec annexe ;
2°) et de rejeter la demande présentée par la S.A. Gauthier devant le tribunal administratif ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des marchés publics ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 1991 :
- le rapport de Melle BRIN, conseiller,
- et les conclusions de M. LEMAI, commissaire du gouvernement,

Considérant que, par le jugement du 7 avril 1988 du Tribunal administratif de Nantes dont elle fait appel, la COMMUNE DE MAUVES-SUR-LOIRE a été condamnée à payer à la société Gauthier la somme de 316 722,41 F avec intérêts de droit, en réparation du préjudice que l'entreprise a subi du fait de son éviction illégale du marché de construction d'un ensemble sportif couvert avec annexe ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Gauthier a constitué avec M. X..., architecte, l'une des équipes lauréates d'un concours organisé en 1977 par le ministère de la jeunesse et des sports pour la construction, suivant des conditions techniques précises et des prix forfaitaires, d'aires couvertes à dominante sportive ; que, par délibération du 4 novembre 1983, le conseil municipal de MAUVES-SUR-LOIRE (Loire-Atlantique) a décidé de réaliser, selon ce projet-type de base, un ensemble sportif couvert avec annexe et de retenir la proposition de la société Gauthier ; que, par cette même délibération, le maire a été autorisé à passer avec cette dernière un marché négocié en application de l'article 308 et de l'article 312 bis, 3°, alors en vigueur, du code des marchés publics ; que, par délibération de son conseil municipal du 19 décembre 1984, la COMMUNE DE MAUVES-SUR-LOIRE a décidé de confier ce marché à une entreprise concurrente ;
Sur la responsabilité :
Considérant, d'une part, que la délibération du 4 novembre 1983 qui constituait une décision de contracter et qui avait été notifiée à son bénéficiaire, présentait un caractère exécutoire et avait créé des droits au profit de la société Gauthier ; qu'elle ne pouvait, en conséquence, être rapportée que dans le délai de recours contentieux et à la condition d'être illégale ; que l'attribution du marché à une autre entreprise par la délibération du 19 décembre 1984 équivaut au retrait de la décision du 4 novembre 1983 ; que celui-ci est intervenu au-delà du délai de recours contentieux et pour des motifs d'opportunité ; que la délibération du 4 novembre 1983 n'a pu, dès lors, être légalement rapportée ; que cette circonstance est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la COMMUNE DE MAUVES-SUR-LOIRE à l'égard de la société Gauthier à raison du bénéfice attendu du contrat dont elle a été irrégulièrement privée ;
Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que des contacts étroits et des échanges nombreux entre le maire de la commune et l'entreprise ont eu lieu en décembre 1983 et au cours du premier semestre de l'année 1984 à l'initiative du maire ou avec son assentiment ; qu'en incitant l'entreprise à engager des frais en vue d'un marché qui n'a pas été signé, la commune a commis une faute engageant sa responsabilité à raison du préjudice correspondant subi par l'entreprise Gauthier, laquelle, compte tenu des termes de la délibération du 4 novembre 1983, n'a commis aucune imprudence qui puisse lui être reprochée ;
Sur le préjudice :

Considérant qu'en fixant à 100 000 F le montant du préjudice résultant pour l'entreprise Gauthier de la perte du bénéfice escompté, le Tribunal administratif de Nantes n'a pas, eu égard à la nature et au montant des travaux en cause, procédé à une évaluation erronée ;
Considérant que l'entreprise a justifié, par la production de factures, des sommes de 61 362 F et 60 133 F retenues par le tribunal au titre des versements effectués aux architectes et à l'ingénieur chargés des études préalables ;
Considérant que les dépenses exposées en pure perte par l'entreprise pour la préparation des dossiers, les études et démarches effectuées, ainsi que le temps perdu ont été, à bon droit, évalués par le tribunal à la somme de 95 227 F ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE MAUVES-SUR-LOIRE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel n'est entaché d'aucune irrégularité, le Tribunal administratif de Nantes l'a condamnée à payer à la société Gauthier une somme de 316 722 F avec intérêts de droit ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de faire application des dispositions de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de condamner la COMMUNE DE MAUVES-SUR-LOIRE à payer à la société Gauthier la somme de 3 000 F qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non comprises dans les dépens ;
Article 1er - La requête de la COMMUNE DE MAUVES-SUR-LOIRE est rejetée.
Article 2 - La COMMUNE DE MAUVES-SUR-LOIRE versera à la société Gauthier une somme de trois mille francs (3 000 F) au titre de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 3 - Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE MAUVES-SUR-LOIRE et à la société Gauthier.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 89NT00418
Date de la décision : 07/05/1991
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

- RJ1 ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - DISPARITION DE L'ACTE - RETRAIT - RETRAIT DES ACTES CREATEURS DE DROITS - CONDITIONS DU RETRAIT - REGLES GENERALES - Retrait pour opportunité et hors des délais de recours d'une délibération autorisant la passation d'un marché - Illégalité (1).

01-09-01-02-01-005 La décision de contracter résultant d'une délibération du conseil municipal autorisant le maire à passer un marché négocié avec une entreprise est créatrice de droits au profit de cette dernière. L'attribution du marché à une autre entreprise par une autre délibération équivaut au retrait de la première décision. Ce retrait étant intervenu au-delà du délai de recours contentieux et pour des motifs d'opportunité est illégal. Faute engageant la responsabilité de la commune.

- RJ1 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - FORMATION DES CONTRATS ET MARCHES - APPROBATION - Décision de contracter - Retrait pour opportunité et hors des délais de recours - Illégalité (1).

39-02-03 La délibération du conseil municipal autorisant le maire à passer un marché négocié avec une entreprise est créatrice de droits au profit de cette dernière. Une autre délibération attribuant le marché à une autre entreprise équivaut au retrait de la première décision. Ce retrait étant intervenu au-delà du délai de recours contentieux et pour des motifs d'opportunité est illégal et constitutif d'une faute engageant la responsabilité de la commune.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R222

1.

Cf. CE, 1985-10-11, Compagnie générale de construction téléphonique, p. 282


Composition du Tribunal
Président : M. Mégier
Rapporteur ?: Mlle Brin
Rapporteur public ?: M. Lemai

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1991-05-07;89nt00418 ?
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