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25/04/1990 | FRANCE | N°89NT00515

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1e chambre, 25 avril 1990, 89NT00515


Vu l'ordonnance en date du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 9ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de Nantes le dossier du recours présenté par le ministre chargé du budget et enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 10 juin 1988 sous le n° 98958 ;
Vu le recours susmentionné et le mémoire complémentaire enregistré le 29 août 1988 présentés par le ministre chargé du budget et enregistrés au greffe de la Cour sous le n° 89NT00515 ;
Le ministre demande que la Cour :<

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Vu l'ordonnance en date du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 9ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de Nantes le dossier du recours présenté par le ministre chargé du budget et enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 10 juin 1988 sous le n° 98958 ;
Vu le recours susmentionné et le mémoire complémentaire enregistré le 29 août 1988 présentés par le ministre chargé du budget et enregistrés au greffe de la Cour sous le n° 89NT00515 ;
Le ministre demande que la Cour :
1°) annule le jugement du tribunal administratif de Nantes en date du 23 décembre 1987 en tant qu'il a réduit les bases des cotisations à la taxe sur la valeur ajoutée auxquelles la chambre de commerce et d'industrie de Laval et de la Mayenne avait été assujettie au titre des années 1980 et 1981 en excluant de la détermination du rapport servant au calcul de la taxe déductible les transferts de crédits effectués au profit des services à caractère industriel et commercial (aérodrome, parc des expositions, maison de l'industrie) et a accordé la décharge des cotisations correspondantes,
2°) et remette à la charge de la chambre de commerce et d'industrie de Laval et de la Mayenne des cotisations d'un montant de 439.174 F en principal et de 27.708 F en pénalités ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience du 4 avril 1990 :
- le rapport de M. Lemai, conseiller,
- et les conclusions de M. Gayet, commissaire du gouvernement,

Considérant que le ministre chargé du budget demande la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a accordé à la chambre de commerce et d'industrie de Laval et de la Mayenne des réductions de taxe sur la valeur ajoutée résultant de l'exclusion du calcul du pourcentage de déduction de la taxe ayant grevé les dépenses de services à caractère industriel et commercial (aérodrome, parc des expositions et maison de l'industrie) des virements budgétaires internes effectués au sein du budget de cet organisme au profit des sections budgétaires ouvertes pour suivre la gestion de ces services ; que le ministre soutient, à titre principal, que ces virements budgétaires internes devaient être compris dans l'assiette de l'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée des recettes des services à caractère industriel et commercial, et, à titre subsidiaire, qu'ils devaient être compris au dénominateur du rapport servant au calcul du pourcentage de droits à déduction ;
Sur les conclusions principales :
Considérant qu'aux termes de l'article 266.1 du code général des impôts : "La base d'imposition est constituée : a) Pour les livraisons de biens et les prestations de services, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de la livraison ou de la prestation" ;
Considérant que le ministre fait valoir que les virements budgétaires internes par lesquels la chambre de commerce et d'industrie réalise des prélèvements sur ses ressources propres, de nature essentiellement fiscales, destinés à combler l'insuffisance des recettes perçues auprès des usagers constituent la contrepartie de prestations taxables et entrent ainsi, en vertu des dispositions précitées, dans la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant, toutefois, que s'il résulte de ces dispositions que les compléments de recettes qui s'ajoutent aux recettes provenant de l'exploitation commerciale sont passibles de la taxe sur la valeur ajoutée, cette règle ne peut trouver application que dans le cas où ces compléments de recettes sont versés par un tiers qui aurait un intérêt propre à la poursuite de l'exploitation ; qu'en l'espèce, les sommes affectées par la chambre de commerce et d'industrie à l'équilibre des services déficitaires ne constituent pas la contrepartie d'un service rendu versée par un tiers mais sont la conséquence du fait que cet organisme est tenu, en toute hypothèse, d'assumer sur ses ressources propres les charges non couvertes par les recettes commerciales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre n'est pas fondé à demander le rétablissement des impositions dont la décharge a été accordée par le tribunal administratif en invoquant les dispositions de l'article L 203 du livre des procédures fiscales relatives au droit de compensation au motif que l'inclusion des virements budgétaires internes dans la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée des recettes des services passibles de cette taxe entraînerait des redressements nets d'un montant supérieur à celui des droits dont la décharge a été prononcée ;
Sur les conclusions subsidiaires :

Considérant qu'aux termes de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts : " ...Les assujettis qui ne réalisent pas exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction sont autorisés à déduire une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les biens constituant des immobilisations égale au montant de cette taxe multipliée par le rapport existant entre le montant annuel des recettes afférentes à des opérations ouvrant droit à déduction et le montant annuel des recettes afférentes à l'ensemble des opérations réalisées ... L'Etat et les collectivités locales n'inscrivent le produit de leurs opérations provenant de leur budget qu'au seul dénominateur du rapport" et qu'aux termes de l'article 213 de la même annexe : "Lorsqu'un assujetti a des secteurs d'activités qui ne sont pas soumis à des dispositions identiques au regard de la taxe sur la valeur ajoutée, ces secteurs font l'objet de comptes distincts pour l'application du droit à déduction. Le montant de la taxe déductible au titre des biens communs aux différents secteurs est déterminé par application du rapport prévu à l'article précédent" ;
Considérant qu'en application des dispositions précitées de l'article 213 de l'annexe II au code général des impôts la chambre de commerce et d'industrie a constitué chacun de ses services à caractère industriel et commercial relevant de la taxe sur la valeur ajoutée en secteurs d'activité distincts ; que, pour calculer le pourcentage de déduction propre à chaque secteur selon les règles fixées à l'article 212 de la même annexe, l'administration était en droit de tenir compte de l'ensemble des ressources affectées par l'organisme assujetti à ce secteur, qu'elles qu'en soient la nature ou l'origine et que celles-ci entrent ou non dans l'assiette de l'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée ; que, par suite, c'est par une exacte interprétation des règles relatives au calcul du pourcentage de déduction que l'administration a compris au dénominateur du rapport les virements budgétaires internes en cause ; que la circonstance que les dispositions précitées, en tant qu'elles précisent les conditions d'application de ces règles aux opérations des collectivités publiques, ne visent expressément que les virements budgétaires internes réalisés dans les budgets de l'Etat et des collectivités locales est sans incidence sur le bien-fondé des redressements dès lors que les services à caractère industriel et commercial gérés par les chambres de commerce et d'industrie ne sauraient, en ce qui concerne la prise en compte dans le calcul des droits à déduction des virements budgétaires internes de même nature effectués dans le budget de ces organismes, être placés dans une situation différente de celle des services à caractère industriel et commercial gérés par l'Etat et les collectivités locales ; que, par suite, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé le redressement au motif que l'administration aurait commis une erreur de droit en étendant aux virements budgétaires internes effectués dans les budgets des chambres de commerce et d'industrie les dispositions de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts visant les seuls virements budgétaires internes effectués dans les budgets de l'Etat et des collectivités locales ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour saisie de l'ensemble du litige, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la chambre de commerce et d'industrie de Laval et de la Mayenne tant devant elle que devant le tribunal administratif ;
Considérant, en premier lieu, que les secteurs d'activité constitués pour suivre la gestion de l'aérodrome, du parc des expositions et de la maison de l'industrie ne peuvent être regardés comme comprenant exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction dès lors que leur équilibre est assuré par des virements budgétaires internes qui, comme il vient d'être dit, ne sont pas passibles de la taxe sur la valeur ajoutée ; que, par suite, la chambre de commerce et d'industrie ne peut utilement invoquer la circonstance que les dépenses affectées à ces services seraient nécessaires à l'exploitation et non exclues du droit à déduction, au sens des dispositions des articles 230 et 238 de l'annexe II au code général des impôts, pour faire obstacle à l'application d'un pourcentage de déduction à la taxe ayant grevé ces dépenses ;
Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que les sommes affectées à la couverture des dépenses des services déficitaires auraient seulement le caractère d'avances et ne seraient donc pas assimilables à des recettes d'exploitation et, en tout état de cause, sans influence sur le bien-fondé de leur prise en compte dans le calcul du pourcentage de déduction de la taxe ayant grevé les dépenses qu'elles ont contribué à financer ;
Considérant, enfin, que si la chambre de commerce et d'industrie soutient que l'administration n'aurait pas intégralement appliqué dans le calcul des pourcentages de déduction la doctrine administrative exprimée dans l'instruction du 18 février 1981, elle n'assortit pas ce moyen de précisions suffisantes permettant d'en apprécier l'incidence sur le montant des redressements ; qu'en tout état de cause, elle n'est pas fondée à soutenir que cette instruction assimilerait les virements budgétaires internes aux subventions d'exploitation inscrites au numérateur du rapport ; qu'il ne résulte pas non plus de l'instruction que l'administration n'aurait pas, conformément à sa doctrine, exclu du calcul du rapport la part des virements budgétaires internes ayant le caractère de subventions d'équipement ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à demander le rétablissement des cotisations à la taxe sur la valeur ajoutée dont la chambre de commerce et d'industrie de Laval et de la Mayenne a été déchargée par le jugement attaqué, soit, dans la limite des conclusions, une somme de 439.174 F en droits et de 27.708 F en pénalités ;
Article 1 - Les cotisations supplémentaires à la taxe sur la valeur ajoutée auxquelles la chambre de commerce et d'industrie de Laval et de la Mayenne a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1978 au 31 décembre 1981 sont remises à sa charge à concurrence d'une somme de 439.174 F en droits et de 27.708 F en pénalités.
Article 2 - Le jugement du Tribunal administratif de Nantes en date du 23 décembre 1987 est annulé en ce qu'il a de contraire à l'article précédent.
Article 3 - Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'economie, des finances et du budget, chargé du budget et à la chambre de commerce et d'industrie de Laval et de la Mayenne.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 89NT00515
Date de la décision : 25/04/1990
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

- RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - PERSONNES ET OPERATIONS TAXABLES - OPERATIONS TAXABLES - Activités des services publics et assimilés - Chambres de commerce et d'industrie - Virements budgétaires internes assurant l'équilibre des services à caractère industriel et commercial gérés par ces services.

19-06-02-01-01 Les virements budgétaires internes par lesquels une chambre de commerce et d'industrie réalise sur ses ressources propres, de nature essentiellement fiscale, des prélèvements destinés à combler l'insuffisance des recettes perçues auprès des usagers de ses services à caractère industriel et commercial, n'entrent pas dans la base d'imposition de ces services à la taxe sur la valeur ajoutée (1).

CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - LIQUIDATION DE LA TAXE - DEDUCTIONS - CAS DES ENTREPRISES QUI ENGLOBENT DES SECTEURS D'ACTIVITE DIFFERENTS - Secteurs constitués par une chambre de commerce et d'industrie pour suivre la gestion de ses services relevant de la taxe sur la valeur ajoutée - Prise en compte des virements budgétaires internes assurant l'équilibre de ces services dans le calcul du pourcentage de déduction.

19-06-02-08-03-04 Les secteurs d'activité constitués par une chambre de commerce et d'industrie, en application de l'article 213 de l'annexe II au code général des impôts, pour suivre la gestion de ses services relevant de la taxe sur la valeur ajoutée ne comprennent pas exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction lorsque l'insuffisance des recettes taxables est couverte par des virements budgétaires internes par lesquels sont affectés à ces services des ressources propres de l'organisme assujetti. Ces virements budgétaires internes doivent figurer au seul dénominateur du rapport déterminant le prorata de déduction de chaque secteur, qu'ils aient le caractère d'avances ou de contributions définitives, alors même que les dispositions de l'article 212 de l'annexe II au code n'imposent expressément cette solution que pour les virements budgétaires de même nature effectués dans les budgets de l'Etat et des collectivités locales.


Références :

CGI 266
CGI Livre des procédures fiscales L203
CGIAN2 212, 213, 230, 238

1. Rapp. CE, Plénière, 1981-01-09, Société Timex Corporation, n° 10145, p. 8.


Composition du Tribunal
Président : M. Anton
Rapporteur ?: M. Lemai
Rapporteur public ?: M. Gayet

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1990-04-25;89nt00515 ?
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