VU l'ordonnance en date du 1er décembre 1988 par laquelle le président de la 5ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de NANTES le dossier de la requête sommaire et du mémoire ampliatif présentés par M. Bruno X... et enregistrés au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat les 9 septembre 1986 et 7 janvier 1987 sous le n° 81874 ;
VU la requête susmentionnée présentée pour M. Bruno X..., demeurant à Kergonant, 29290 MILIZAC, par Me G. DELVOLVE, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, enregistrée au greffe de la Cour le 2 janvier 1989 sous le n° 89NT00144 et tendant à ce que la Cour :
- annule le jugement n° 85/280 du 3 juillet 1986 par lequel le tribunal administratif de RENNES a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Fouesnant (Finistère) et de la compagnie d'assurances "Les Mutuelles Unies" au versement de la somme de 26 875,30 F avec intérêts de droit, en réparation des dommages résultant de l'immersion, survenue le 1er août 1981, de son bateau amarré à la cale de Beg-Meil ;
- condamne ladite commune et sa compagnie d'assurances à lui payer la somme de 26 875,30 F avec intérêts de droit, et intérêts des intérêts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi du 30 décembre 1977 ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-7O7 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-9O6 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 1989 :
- le rapport de Melle BRIN, conseiller,
- les observations de Me Y... se substituant à Me DELVOLVE, avocat de M. X... et de Me XAVIER se substituant à Me COPPER-ROYER, avocat de la commune de Fouesnant et des "Mutuelles Unies",
- et les conclusions de M. MARCHAND, commissaire du gouvernement,
Considérant que M. X..., pour une période allant du 12 juillet au 1er août 1981 (à midi) a, par contrat conclu avec la commune de Fouesnant, concessionnaire du port de plaisance, loué un emplacement de mouillage à la cale de Beg-Meil pour son navire "Nounours" ; qu'il constatait, le 1er août 1981 au matin que ce dernier était complètement immergé ; que M. X... fait appel du jugement du tribunal administratif de RENNES en date du 3 juillet 1986 refusant de faire droit à sa demande tendant à obtenir réparation de son préjudice ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que les allégations selon lesquelles le jugement entrepris serait entaché d'irrégularité en la forme comme au fond ne sont assorties d'aucune précision de nature à en apprécier le bien-fondé ;
Sur les conclusions de M. X... dirigées contre la compagnie d'assurances "Les Mutuelles Unies", assureur de la commune de Fouesnant :
Considérant que la juridiction administrative est incompétente pour connaître de la responsabilité d'une compagnie d'assurances vis-à-vis de la victime d'un accident dont l'auteur aurait souscrit auprès d'elle un contrat d'assurances ; que M. X... n'est dès lors pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de RENNES a écarté sa compétence pour statuer sur l'action dirigée contre la société "Les Mutuelles Unies" ;
Sur les responsabilités encourues :
Considérant que le dommage allégué par M. X... trouve son origine dans un défaut de conception du corps-mort posé sur un fond rocheux et risquant, de ce fait, de provoquer par enroulement de la chaîne un blocage de cette dernière ; qu'il n'est pas contesté que cet incident s'est précisément produit, et que par suite, la location par la commune de Fouesnant, en qualité de concessionnaire du port de plaisance, d'un emplacement de mouillage dont la conception même l'a rendu impropre à sa destination est constitutif d'une faute de nature à engager la responsabilité de ladite commune à l'égard de M. X... ; qu'elle ne saurait se prévaloir, par ailleurs, d'aucune stipulation contractuelle ou règlementaire applicable en l'espèce et susceptible de l'exonérer de la responsabilité qu'elle encourt ;
Considérant toutefois, qu'il résulte de l'instruction que l'utilisateur du navire en rentrant au port la nuit, à marée basse et en amarrant l'embarcation au "bout" qui précédait la chaîne sans porter attention au phénomène de la marée ni aux difficultés à relever la chaîne, a commis des négligences constitutives d'une faute opposable à M. X... propriétaire du navire et de nature à atténuer la responsabilité encourue par la commune ; qu'il sera fait une exacte appréciation des responsabilités en les fixant à 50 % pour la commune et à 50 % pour M. X... ;
Sur le montant du préjudice :
Considérant que le préjudice allégué représente la somme totale qui n'est pas sérieusement contestée de 26 875,30 F ; qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Fouesnant est condamnée à verser la somme de 13 437,65 francs en réparation du préjudice subi par M. X... ;
Sur les intérêts :
Considérant que M. X... a droit aux intérêts de la somme de 13 437,65 francs à compter du 29 octobre 1984, date de l'enregistrement de sa demande devant le tribunal administratif ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 9 septembre 1986 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Considérant qu'il suit de ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de RENNES a rejeté sa demande ;
Article 1 - Le jugement du tribunal administratif de RENNES du 3 juillet 1986 est annulé.
Article 2 - La commune de Fouesnant est condamnée à verser à M. X... la somme de 13 437,65 francs avec intérêts au taux légal à compter du 29 octobre 1984. Les intérêts échus le 9 septembre 1986 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 - Le présent arrêt sera notifié à M. X... et à la commune de Fouesnant.