Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 14 janvier 2025 par lequel le préfet du Bas-Rhin l'a assigné à résidence dans le département du Bas-Rhin pour une durée de quarante-cinq jours.
Par un jugement n° 2500377 du 5 février 2025, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg a annulé cet arrêté du 14 janvier 2025, suspendu les effets de la décision du 25 avril 2024 par laquelle la préfète du Bas-Rhin a fait obligation à M. A... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et enjoint au préfet du Bas-Rhin de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 février 2025, le préfet du Bas-Rhin demande à la cour de surseoir à l'exécution de ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 5 février 2025.
Il soutient que :
- les conclusions à fin de suspension des effets de l'obligation de quitter le territoire français du 25 avril 2024 n'ont été présentées que lors de l'audience du 22 janvier 2025 ;
- ces conclusions étaient, à cette date du 22 janvier 2025, irrecevables et, en les accueillant, la magistrate désignée a entaché son jugement d'irrégularité ;
- à supposer ces conclusions recevables, il appartenait à la magistrate désignée, a minima, de différer la clôture de l'instruction, sinon de suspendre voire renvoyer l'affaire à une date ultérieure et, en s'abstenant de le faire, elle a méconnu l'article L. 5 du code de justice administrative et commis une irrégularité ;
- le délai de recours contentieux contre la décision portant obligation de quitter le territoire français était échu et l'exception de recours parallèle faisait obstacle à ce que M. A... puisse obtenir, par le biais du recours pour excès de pouvoir contre l'assignation à résidence, les mêmes effets que ceux qu'il aurait pu obtenir en contestant par voie d'action la mesure d'irrégularité et, à ce titre aussi, le jugement est irrégulier ;
- il n'appartient pas au juge de l'assignation à résidence de connaître de la demande de suspension des effets de l'obligation de quitter le territoire français ;
- l'impossibilité d'exécuter la mesure d'éloignement n'entraîne pas nécessairement l'illégalité de l'assignation à résidence ;
- la magistrate désignée s'est à tort estimée tenue d'annuler l'assignation à résidence et, ce faisant, a rendu un jugement irrégulier et mal fondé ;
- le fait que son épouse bénéficie de la protection subsidiaire ne rend pas, de manière absolue, impossible une vie privée et familiale du couple en Arménie ;
- M. A... ne remplit pas les conditions de délivrance d'une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " membre de la famille d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire " au titre de l'article L. 424-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- c'est en entachant son jugement d'un défaut de motivation, d'un défaut d'examen, d'une erreur de droit, d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation que la magistrate désignée a statué comme elle l'a fait ;
- l'injonction prononcée est irrégulière, dès lors qu'en l'état, aucun réexamen n'est à mener puisque l'intimé n'a pas sollicité son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 424-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'en remplit pas les conditions, le tribunal ayant prononcé une injonction privée de tout effet utile ab initio et cette injonction devra, en tout état de cause, être réformée ;
- il y a lieu de réformer l'article 5 du jugement, a minima en diminuant le montant fixé par le tribunal au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
- les autres moyens soulevés devant le tribunal administratif de Strasbourg ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 avril 2025, M. B... A..., représenté par Me Berry, demande à la cour :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) de rejeter la requête du préfet du Bas-Rhin ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 avril 2025.
Vu :
- la requête n° 25NC00283, enregistrée le 7 février 2025, par laquelle le préfet du Bas-Rhin relève appel du jugement du tribunal administratif de Nancy n° 2500377 du 5 février 2025 ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Durup de Baleine a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
Sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire :
1. M. A... ayant été en cours d'instance et le 24 avril 2025 admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, sa demande d'aide juridictionnelle provisoire est sans objet.
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement attaqué :
2. M. B... A..., ressortissant arménien né en 1999, est entré sur le territoire français muni de son passeport arménien en cours de validité et, selon ses déclarations, le 10 août 2023. Il a présenté une demande d'asile, qui a été rejetée par une décision du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 26 janvier 2024 et une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 24 avril 2024. Par un arrêté du 25 avril 2024, la préfète du Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement d'office à l'issue de ce délai et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant un an. Cet arrêté du 25 avril 2024, assorti de l'indication des voies et délais de recours, a été adressé le 26 avril 2024 au domicile déclaré par M. A... à Strasbourg. Le 14 juin 2024, M. A... s'est marié à Strasbourg avec une ressortissante arménienne née en 2002, dont il ressort du dossier qu'elle a été admise en France au bénéfice de la protection subsidiaire et dont, en outre, la mère, titulaire d'une carte de résident, a été admise à ce bénéfice par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 17 juillet 2018 alors que cette ressortissante arménienne née en 2002 était mineure. L'épouse de M. A... est titulaire d'une carte de résident, valable jusqu'au 28 septembre 2034 et qui lui a été délivrée le 29 septembre 2024 par la préfète du Bas-Rhin.
3. Par un arrêté du 14 janvier 2025, le préfet du Bas-Rhin a assigné M. A..., qui n'a pas saisi le juge d'un recours dirigé contre l'arrêté du 25 avril 2024 et qui est demeuré sur le territoire français, à résidence dans le département du Bas-Rhin pour une durée de quarante-cinq jours.
4. Le préfet du Bas-Rhin demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement du 5 février 2025 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg a suspendu les effets de la décision du 25 avril 2024 faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, annulé l'arrêté du 14 janvier 2025, lui a enjoint de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois et a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
5. Aux termes de l'article R. 222-25 du code de justice administrative : " Les affaires sont jugées soit par une chambre siégeant en formation de jugement, soit par une formation de chambres réunies, soit par la cour administrative d'appel en formation plénière, qui délibèrent en nombre impair. / Par dérogation à l'alinéa précédent, le président de la cour ou le président de chambre statue en audience publique et sans conclusions du rapporteur public sur les demandes de sursis à exécution mentionnées aux articles R. 811-15 à R. 811-17 ".
6. Aux termes de l'article R. 811-15 du même code : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement ".
7. Il ressort des termes de la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Strasbourg qu'il demandait à cette juridiction, outre d'annuler l'arrêté du 14 janvier 2025, de suspendre les effets de la décision portant obligation de quitter le territoire français du 25 avril 2024 et d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation.
8. En l'état de l'instruction, les moyens présentés par le préfet du Bas-Rhin ne paraissent pas sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 14 janvier 2025 accueillies par ce jugement, comme aux fins de suspension des effets de la décision portant obligation de quitter le territoire français du 25 avril 2024 et d'injonction de réexamen de la situation de M. A..., ainsi que de celles au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
9. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Bas-Rhin n'est pas fondé à demander que soit ordonné le sursis à l'exécution du jugement du 5 février 2025.
Sur les frais de l'instance :
10. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique en mettant à la charge de l'Etat le versement à Me Berry de la somme de 600 euros à ce titre, sous réserve que Me Berry renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire.
Article 2 : La requête du préfet du Bas-Rhin est rejetée.
Article 3 : L'Etat versera à Me Berry la somme de 600 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que Me Berry renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, à M. B... A... et à Me Claude Berry.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 avril 2025.
Le président-rapporteur
Signé : A. DURUP DE BALEINELe greffier
Signé : A. BETTI
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
A. Betti
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N° 25NC00284