Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Farmer Services Distribution a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle la communauté de communes de Hanau-La Petite Pierre a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal du Pays de Hanau.
Par un jugement n° 2001382 du 15 mars 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la requête de la société Farmer Services Distribution et a mis à sa charge le versement de la somme de 1 500 euros à la communauté de communes de Hanau-La Petite Pierre au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 12 mai 2021, la société Farmer Services Distribution, représentée par Me Clausse, demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle la communauté de communes de Hanau-La Petite Pierre a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal du Pays de Hanau et, à titre subsidiaire, de l'annuler en tant qu'il classe les parcelles cadastrées section 6 n°s 8, 63 et 112 en zone non constructible et en tant qu'elle ne maintient pas l'ancienne zone AC du plan local d'urbanisme de Schalkendorf ;
2°) de condamner la communauté de communes de Hanau-La Petite Pierre à lui verser la somme de 500 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de ce classement ;
3°) de mettre à la charge de la communauté de communes de Hanau-La Petite Pierre une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la délibération attaquée méconnait les exigences de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme en ce que les éléments de diagnostic du rapport de présentation manquent de précision ;
- le plan local d'urbanisme intercommunal entre en contradiction avec les objectifs ayant présidés à son élaboration ;
- la délibération attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant au classement en zone non constructible des parcelles cadastrées section n° 6 n°s 8, 63 et 112 et quant à l'absence de maintien de la zone AC prévue par le plan local d'urbanisme de Schalkendorf.
Par un mémoire en défense enregistré le 16 février 2022, la communauté de communes de Hanau-La Petite Pierre, représentée par la SELAS Olszak et Levy, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la société requérante en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable en ce qu'elle ne présente aucune motivation d'appel ;
- la requête est irrecevable en ce que la société Farmer Services Distribution ne démontre pas avoir un intérêt à agir ;
- les conclusions indemnitaires de la société Farmer Services Distribution sont irrecevables en contentieux de l'excès de pouvoir et n'ont en tout état de cause pas été précédées d'une demande indemnitaire préalable ;
- les moyens soulevés par la société Farmer Services Distribution ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de Mme Bourguet-Chassagnon, rapporteure publique,
- les observations de Me Tézenas du Montcel pour la communauté de communes de Hanau-La Petite Pierre.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 26 octobre 2016, le préfet du Bas-Rhin, préfet de la région Grand-Est, a prononcé la fusion de la communauté de communes du Pays de La Petite Pierre et de la communauté de communes du Pays de Hanau. Par une délibération du 20 décembre 2019, le conseil communautaire de la communauté de communes de Hanau-La Petite Pierre a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal du Pays de Hanau. La société à responsabilité limitée SARL Farmer Services Distribution, se disant propriétaire des parcelles cadastrées section 6 nos 8, 63 et 112 à Schalkendorf, a sollicité l'annulation de la délibération du 20 décembre 2019. Par le jugement du 15 mars 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté l'ensemble de ses demandes.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme : " Le rapport de présentation explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement. / Il s'appuie sur un diagnostic établi au regard des prévisions économiques et démographiques et des besoins répertoriés en matière de développement économique, de surfaces et de développement agricoles, de développement forestier, d'aménagement de l'espace, d'environnement, notamment en matière de biodiversité, d'équilibre social de l'habitat, de transports, de commerce, d'équipements notamment sportifs, et de services. (...) ". L'article R. 151-1 du même code dispose : " Pour l'application de l'article L. 151-4, le rapport de présentation : / 1° Expose les principales conclusions du diagnostic sur lequel il s'appuie ainsi que, le cas échéant, les analyses des résultats de l'application du plan prévues par les articles L. 153-27 à L. 153-30 et comporte, en annexe, les études et les évaluations dont elles sont issues ; / 2° Analyse les capacités de densification et de mutation des espaces bâtis identifiés par le schéma de cohérence territoriale en vertu du deuxième alinéa de l'article L. 141-3 ainsi que des autres espaces bâtis identifiés par le rapport lui-même en vertu du troisième alinéa de l'article L. 151-4 ; / 3° Analyse l'état initial de l'environnement, expose la manière dont le plan prend en compte le souci de la préservation et de la mise en valeur de l'environnement ainsi que les effets et incidences attendus de sa mise en œuvre sur celui-ci. "
3. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le rapport de présentation s'appuie sur un diagnostic territorial comprenant des statistiques de différents organismes reconnus et des données chiffrées, notamment relatives à l'évolution démographique du territoire, dont il n'est ni démontré ni même allégué qu'elles devraient être remises en cause. La requérante, qui se borne à soutenir que le diagnostic territorial réalisé serait insuffisant, n'indique pas quels éléments en particulier seraient manquants ou erronés. D'autre part, il ressort du tome 2 du rapport de présentation qu'il explique les choix retenus par les auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal et contient la justification des choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement. Il comporte également des développements relatifs aux objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain, ainsi que la justification des délimitations du zonage. Au surplus, les objectifs poursuivis par le plan local d'urbanisme intercommunal ont fait l'objet de deux délibérations des 29 octobre et 17 décembre 2015. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme doit être écarté.
4. En deuxième lieu, pour apprécier la cohérence exigée au sein du plan local d'urbanisme par l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.
5. La requérante soutient que le plan local d'urbanisme intercommunal a été adopté " en contradiction avec les objectifs affichés " en ce que le classement des parcelles cada strées section 6 nos 8, 63 et 112 à Schalkendorf en zone agricole non-constructible et le refus de maintenir l'ancienne zone AC du précèdent document d'urbanisme de la commune de Schalkendorf entrent en contradiction avec l'objectif de développement économique du territoire.
6. D'une part, par la délibération attaquée, les parcelles de la requérante ont été classées en zone agricole A non constructible. Si elle soutient qu'il s'agit des parcelles cadastrées section 6 n°s 8, 63 et 112, la communauté de communes soutient sans être contredite, et comme le confirment les données publiques librement disponibles en ligne, qu'il s'agit en réalité des parcelles cadastrées section 6 n°s 252 à 254, numérotation par ailleurs conforme au plan joint à la synthèse des observations émises au cours de l'enquête publique.
7. Le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme intercommunal du Pays de Hanau a notamment pour objectif le maintien de l'agriculture existante et la nécessité de répondre à ses besoins tout en préservant les milieux naturels remarquables, leurs qualités paysagères et environnementales. Le rapport de présentation précise à cette fin que les zones agricoles sont, compte tenu de la sensibilité paysagère du territoire et des enjeux environnementaux présents, généralement considérées comme des espaces agricoles inconstructibles, à l'exception des parcelles correspondant aux sites d'implantation des exploitations pouvant bénéficier d'un classement en secteur AC de la zone A. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles en l'espèce en cause, qui étaient d'ailleurs déjà classées en zone agricole non constructibles sous l'empire du précédent document d'urbanisme, sont situées au nord de la commune de Schalkendorf et correspondent à des terres agricoles non bâties, entourées d'importants espaces agricoles et naturels également vierges de constructions. Dans ces conditions, et alors que la communauté de communes n'est pas tenue d'assurer la concrétisation des projets de développement de la requérante, le classement de ces parcelles en zone agricole non constructible s'inscrit dans les orientations du projet d'aménagement et de développement durables visant à la préservation des qualités paysagères et environnementales du territoire, sans contrevenir à l'orientation visant au maintien de l'agriculture existante et au développement de l'activité agricole. Par suite, le moyen tiré de la contradiction du zonage " avec les objectifs affichés " lors de l'élaboration du plan local d'urbanisme intercommunal, qui doit être regardé comme tiré d'une absence de cohérence entre ce zonage et le projet d'aménagement et de développement durables, doit être écarté.
8. D'autre part, si la requérante soutient que le refus de maintenir l'ancienne zone AC du règlement graphique du plan local d'urbanisme de la commune de Schalkendorf entre en contradiction avec l'objectif de développement économique du territoire, elle ne précise toutefois pas plus que devant les premiers juges de quelles parcelles ou terrains il s'agit ni, en conséquence, ne justifie en quoi les caractéristiques de ces parcelles ou terrains justifieraient, sauf à commettre une erreur manifeste d'appréciation, un classement en zone agricole AC. Par suite, le moyen tiré de la contradiction du zonage " avec les objectifs affichés " lors de l'élaboration du plan local d'urbanisme intercommunal doit, de même, être écarté.
9. En dernier lieu, aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ". L'article R. 151-23 du même code précise : " Peuvent être autorisées, en zone A : / 1° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ou au stockage et à l'entretien de matériel agricole par les coopératives d'utilisation de matériel agricole agréées au titre de l'article L. 525-1 du code rural et de la pêche maritime ; / 2° Les constructions, installations, extensions ou annexes aux bâtiments d'habitation, changements de destination et aménagements prévus par les articles L. 151-11, L. 151-12 et L. 151-13, dans les conditions fixées par ceux-ci ". Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.
10. Il est de la nature de toute réglementation d'urbanisme de distinguer des zones où les possibilités de construire sont différentes. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir mais sans être lié par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. La légalité des dispositions du règlement d'un plan local d'urbanisme s'apprécie au regard du parti d'urbanisme retenu, défini notamment par les orientations générales et par les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou d'un détournement de pouvoir ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
11. D'une part, eu égard à ce qui a été dit au point 7, et alors qu'il ressort des pièces du dossier que le classement des parcelles du requérant en zone agricole AC, et non en zone A, nécessiterait la réalisation d'aménagements routiers spécifiques non prévus par la collectivité et que l'avis du commissaire enquêteur ne lie pas la communauté de communes, la requérante n'est pas fondée à soutenir, compte tenu des caractéristiques comme de la localisation de ces parcelles, qui sont des terres agricoles présentant un potentiel agrologique, biologique ou économique des terres agricoles, que le classement des parcelles section 6 n°s 252 à 254 en zone agricole A serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
12. D'autre part, si la requérante sollicite également l'annulation de la délibération du 20 décembre 2019 en tant que le plan local d'urbanisme intercommunal ne maintient pas la zone AC dans son ancien périmètre, elle ne précise toutefois pas quelles parcelles ou terrains sont ainsi en cause. Dès lors, elle ne met pas le juge à même d'apprécier en quoi, ce faisant, les auteurs du plan local d'urbanisme auraient commis une erreur manifeste d'appréciation.
13. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur les fins de non-recevoir soulevées en défense, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 20 décembre 2019.
Sur les frais liés au litige :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté de communes de Hanau-La Petite Pierre, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Farmer Services Distribution demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société Farmer Services Distribution le versement à la communauté de communes de Hanau-La Petite Pierre de la somme de 1 500 euros au même titre.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société Farmer Services Distribution est rejetée.
Article 2 : La société Farmer Services Distribution versera à la communauté de communes de Hanau-La Petite Pierre la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la société Farmer Service Distribution et à la communauté de communes de Hanau-La Petite Pierre.
Délibéré après l'audience du 3 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Antoine Durup de Baleine, président,
- M. Axel Barlerin, premier conseiller,
- Mme Nolwenn Peton, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 décembre 2024.
Le président,
Signé : A. A...L'assesseur le plus ancien
dans l'ordre du tableau,
Signé : A. Barlerin
Le greffier,
Signé : A. Betti
La République mande et ordonne au préfet du Bas-Rhin en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
A. Betti
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N°21NC01389