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30/05/2023 | FRANCE | N°22NC03018

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 30 mai 2023, 22NC03018


Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

M. G... A... et Mme H... E... épouse A... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'annuler, chacun en ce qui le concerne, les arrêtés du 13 septembre 2022 par lesquels la préfète du Bas-Rhin a renouvelé leur assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement nos 2206238 et 2206239 du 2 novembre 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Par la suite, M. G... A... et Mme H... E..

. épouse A... ont également demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'annuler, ...

Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

M. G... A... et Mme H... E... épouse A... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'annuler, chacun en ce qui le concerne, les arrêtés du 13 septembre 2022 par lesquels la préfète du Bas-Rhin a renouvelé leur assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement nos 2206238 et 2206239 du 2 novembre 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Par la suite, M. G... A... et Mme H... E... épouse A... ont également demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'annuler, chacun en ce qui le concerne, les arrêtés du 25 octobre 2022 par lesquels la préfète du Bas-Rhin a renouvelé leur assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement nos 2207352 et 2207353 du 15 novembre 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg a annulé les arrêtés du 25 octobre 2022 assignant M. et Mme A... à résidence seulement en tant qu'ils obligent leur fils mineur, B... D..., à se présenter auprès des forces de police les mercredis entre 9h00 et 10h00 et a rejeté le surplus de leurs demandes.

Procédures devant la cour :

I/ Par une requête enregistrée le 2 décembre 2022, sous le n° 22NC03018, M. A... et Mme E... épouse A..., représentés par Me Airiau, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 2206238 et 2206239 du 2 novembre 2022 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg, en tant qu'il rejette leurs conclusions formulées contre les arrêtés prononçant une assignation à résidence qui imposent à leurs deux enfants mineurs de se présenter auprès des forces de l'ordre tous les mercredis ;

2°) d'annuler les arrêtés du 13 septembre 2022 de la préfète du Bas-Rhin en tant qu'ils imposent à leurs enfants mineurs de se présenter périodiquement auprès des forces de l'ordre ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à leur conseil de la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que les arrêtés du 13 septembre 2022 sont entachés d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation au regard de la situation de leurs enfants mineurs en ce qu'ils les obligent à accompagner leurs parents lorsqu'ils se présentent périodiquement auprès des forces de l'ordre, dès lors que la préfète ne démontre pas que cette mesure de pointage, en présence de leurs enfants mineurs, est nécessaire, adaptée à l'objectif poursuivi qui est de s'assurer qu'ils n'ont pas quitté le périmètre où ils sont assignés, et alors que leur fils, B... D..., né le 30 janvier 2017, est à l'école les mercredis.

La préfète du Bas-Rhin, à qui la procédure a été communiquée, n'a pas produit de mémoire en défense.

II/ Par une requête enregistrée le 14 décembre 2022, sous le n° 22NC03150, M. A... et Mme E... épouse A..., représentés par Me Airiau, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 2207352 et 2207353 du 15 novembre 2022 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg, en tant qu'il rejette leurs conclusions formulées contre les arrêtés prononçant une assignation à résidence qui imposent à leur enfant mineur, C..., de se présenter auprès des forces de l'ordre tous les mercredis ;

2°) d'annuler les arrêtés du 25 octobre 2022 de la préfète du Bas-Rhin en tant qu'ils imposent à leur enfant mineur, C..., de se présenter périodiquement auprès des forces de l'ordre ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à leur conseil de la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que les arrêtés du 25 octobre 2022 sont entachés d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation au regard de la situation de leur enfant mineur, C..., en ce qu'ils l'obligent à accompagner ses parents lorsqu'ils se présentent périodiquement auprès des forces de l'ordre, alors que la préfète ne démontre pas que cette mesure de pointage, en présence de leur enfant mineur C..., est nécessaire, adaptée à l'objectif poursuivi qui est de s'assurer qu'ils n'ont pas quitté le périmètre où ils sont assignés.

La préfète du Bas-Rhin, à qui la procédure a été communiquée dans les deux instances, n'a pas produit de mémoire en défense.

M. et Mme A... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions des 6 février 2023 et 17 mars 2023 pour les deux requêtes.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Roussaux a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A..., ressortissants afghans nés respectivement en 1994 et 1997, ont fait l'objet le 4 août 2022 d'arrêtés portant transfert aux autorités suédoises, responsables de l'examen de leurs demandes d'asile, ainsi que d'assignations à résidence, renouvelées par des arrêtés des 13 septembre 2022 et 25 octobre 2022 pour une durée de quarante-cinq jours. Par deux requêtes enregistrées sous les n° 22NC03018 et 22NC03150, qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un arrêt unique, M. et Mme A... relèvent appel d'une part, du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg du 2 novembre 2022 ayant rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 13 septembre 2022 en tant qu'ils imposent à leurs deux enfants mineurs de se présenter auprès des forces de l'ordre tous les mercredis et, d'autre part, du jugement du 15 novembre 2022, qui a annulé les mesures concernant leur fils B... D..., en tant que celui-ci a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation des dispositions des arrêtés du 25 octobre 2022 imposant la présence de leur fils C... auprès des forces de l'ordre tous les mercredis.

Sur les conclusions à fin d'annulation des arrêtés des 13 septembre 2022 et 25 octobre 2022 :

2. Aux termes de l'article L. 751-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) En cas de notification d'une décision de transfert, l'assignation à résidence peut se poursuivre si l'étranger ne peut quitter immédiatement le territoire français mais que l'exécution de la décision de transfert demeure une perspective raisonnable. / L'étranger faisant l'objet d'une décision de transfert peut également être assigné à résidence en application du présent article, même s'il n'était pas assigné à résidence lorsque la décision de transfert lui a été notifiée. / (...) ". Aux termes de l'article L. 751-4 du même code : " En cas d'assignation à résidence en application de l'article L. 751-2, les dispositions des articles L. 572-7, L. 732-1, L. 732-3, L. 732-7, L. 733-1 à L. 733-4 et L. 733-8 à L. 733-12 sont applicables. (...) ". Aux termes de l'article L. 733-1 de ce code : " L'étranger assigné à résidence en application du présent titre se présente périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie. (...) ".

3. D'une part, les obligations de se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie, susceptibles d'être imparties par l'autorité administrative en vertu de l'article L. 733-1 précité, doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées aux finalités qu'elles poursuivent. Les modalités d'application de l'obligation de présentation sont soumises au contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qui, saisi d'un moyen en ce sens, vérifie notamment qu'elles ne sont pas entachées d'erreur d'appréciation. D'autre part, si une décision d'assignation à résidence doit comporter les modalités de contrôle permettant de s'assurer du respect de cette obligation et notamment préciser le service auquel l'étranger doit se présenter et la fréquence de ces présentations, ces modalités de contrôle sont divisibles de la mesure d'assignation elle-même.

4. Par ailleurs, aucune disposition législative ou réglementaire ni aucun principe ne fait légalement obstacle à ce que l'autorité administrative, lorsqu'elle assortit la décision de transfert d'une mesure d'assignation à résidence, mesure alternative moins contraignante au placement en rétention, oblige le ressortissant étranger devant quitter le territoire, dans le cadre de la fixation des modalités d'exécution de la mesure d'assignation à résidence et afin de permettre l'éloignement de ce ressortissant étranger et des enfants l'accompagnant, à se présenter auprès des services de police avec ses enfants mineurs, sous réserve d'une erreur d'appréciation.

En ce qui concerne la légalité des arrêtés du 13 septembre 2022 :

5. Les arrêtés du 13 septembre 2022 imposent à M. et Mme A..., à titre de mesure de contrôle, de se présenter tous les mercredis, hors jours fériés, entre 9 heures et 10 heures auprès de la direction interdépartementale de la police aux frontières de Strasbourg, située à l'aéroport de Strasbourg-Entzheim, accompagnés de leurs deux fils mineurs.

6. Il ressort des pièces du dossier que si le jeune B... D..., fils ainé des requérants, âgé de cinq ans, est pris en charge tous les mercredis de 7h45 à 18h00 au sein du bâtiment de l'école maternelle dans laquelle il est scolarisé, il ne s'agit toutefois que d'un accueil de loisirs facultatif et non pas d'un enseignement scolaire. S'agissant de leur plus jeune fils, C..., les requérants n'apportent aucun élément et ne font valoir aucune circonstance particulière qui ferait obstacle à ce que celui-ci accompagne également ses parents lors de leur obligation de pointage bi-hebdomadaire. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les arrêtés litigieux sont entachés d'une erreur de droit, au regard de ce qui a été dit aux points 2 à 4 du présent arrêt, ni d'une erreur d'appréciation en ce qu'ils obligent leurs enfants mineurs à les accompagner lors de l'obligation de pointage du mercredi de 9h00 à 10h00.

7. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 2 novembre 2022, le magistrat désigné a rejeté leurs demandes d'annulation des arrêtés d'assignation à résidence pris à leur encontre le 13 septembre 2022 en tant qu'ils prévoient des modalités de présentation les mercredis entre 9h00 et 10h00 pour leurs deux fils mineurs.

En ce qui concerne la légalité des arrêtés du 25 octobre 2022 :

8. Les arrêtés du 25 octobre 2022 imposent de nouveau à M. et Mme A..., à titre de mesure de contrôle, de se présenter tous les mercredis, hors jours fériés, entre 9 heures et 10 heures auprès de la direction interdépartementale de la police aux frontières de Strasbourg, située à l'aéroport de Strasbourg-Entzheim, accompagnés de leurs deux fils mineurs.

9. Pour contester la légalité de ces arrêtés, les requérants font valoir les mêmes arguments et produisent les mêmes pièces que ceux invoqués pour contester la légalité des arrêtés des 13 septembre 2022. Dans ces conditions, et au regard notamment de ce qui a été dit au point 6 du présent arrêt, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 15 novembre 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs conclusions d'annulation des arrêtés d'assignation à résidence pris à leur encontre le 25 octobre 2022 s'agissant de la présentation de leur fils C....

Sur les frais liés aux instances :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans les présentes instances, la partie perdante, les sommes que M. et Mme A... demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme A... sont rejetées.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme H... E... épouse A..., à M. F..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Airiau.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

Délibéré après l'audience du 9 mai 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Samson-Dye, présidente,

- Mme Roussaux, première conseillère,

- M. Denizot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mai 2023.

La rapporteure,

Signé : S. RoussauxLa présidente,

Signé : A. Samson-Dye

La greffière,

Signé : N. Basso

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N. Basso

2

Nos 22NC03018, 22NC03150


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC03018
Date de la décision : 30/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme SAMSON-DYE
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : AIRIAU

Origine de la décision
Date de l'import : 13/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-05-30;22nc03018 ?
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