Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...B...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 20 novembre 2014 par laquelle la directrice de la caisse primaire d'assurance maladie du Territoire de Belfort a subordonné à l'accord préalable du service de contrôle médical le versement des indemnités journalières résultant de ses prescriptions médicales, pour une durée de trois mois du 15 janvier au 15 avril 2015.
Elle a également demandé au tribunal administratif de Besançon de condamner l'Etat à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation des préjudices qu'elle impute à la décision de la directrice de la caisse primaire d'assurance maladie du Territoire de Belfort du 20 novembre 2014.
Par un jugement n° 1500091 et 1500923 du 21 mars 2017, le tribunal administratif de Besançon a annulé la décision du 20 novembre 2014 et a rejeté le surplus des demandes de Mme B....
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 20 mai 2017 et un mémoire en réplique enregistré le 26 février 2019, la caisse primaire d'assurance maladie du Territoire de Belfort, représentée par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 21 mars 2017 en tant qu'il annule la décision du 20 novembre 2014 ;
2°) de rejeter la demande de Mme C...B...tendant à l'annulation de cette décision ;
3°) de mettre à la charge de Mme B...le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision contestée n'est entachée d'aucune illégalité externe ;
- elle pouvait légalement subordonner le versement des indemnités journalières résultant des prescriptions médicales de Mme B...à l'accord préalable du service de contrôle médical dès lors que l'intéressée prescrit un nombre anormalement élevé d'arrêts de travail ;
- Mme B...ne justifie pas que l'écart important constaté entre sa pratique et celle de ses confrères résulterait de la spécificité de sa patientèle.
Par un mémoire en défense enregistré le 27 juillet 2017, Mme C...B..., représentée par Me A...D..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 6 000 euros soit mise à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie du Territoire de Belfort en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, en outre, demande à la cour :
1°) par la voie d'un appel provoqué, d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il rejette sa demande indemnitaire et, à titre principal, de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif ou, à titre subsidiaire, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation de ses préjudices ;
2°) de condamner la caisse primaire d'assurance maladie du Territoire de Belfort à verser la somme de 7 000 euros pour recours abusif.
Elle soutient que :
- la requête d'appel est irrecevable en l'absence de motivation suffisante ;
- la décision du 20 novembre 2014 méconnaît l'article L. 162-1-15 du code de la sécurité sociale dès lors que la caisse s'est bornée à constater un nombre important d'arrêts de travail sans tenir compte de la sociologie et de la typologie de sa patientèle ;
- il appartient à la caisse de justifier que la spécificité de sa patientèle ne peut expliquer le nombre d'arrêts de travail prescrits ;
- son appel provoqué est recevable dès lors que l'appel principal a pour effet d'aggraver sa situation ;
- le jugement attaqué a irrégulièrement joint ses deux demandes ;
- il convient de renvoyer sa demande tendant à l'engagement de la responsabilité de l'Etat du fait des lois ;
- la responsabilité de l'Etat est engagée à raison de l'absence de clarté de l'article L. 162-1-15 du code de la sécurité sociale, de l'impossibilité d'atteindre le but poursuivi par le législateur et de prendre en compte la notion légale d'activité comparable, de l'imprécision de la base de comparaison et du conflit des dispositions applicables avec la loi sur l'informatique et les libertés et les règles de la responsabilité médicale ;
- son préjudice moral et les troubles dans ses conditions d'existence doivent être réparés par l'allocation d'une indemnité de 30 000 euros.
Par un mémoire enregistré le 20 février 2019, la ministre des solidarités et de la santé demande à la cour d'accueillir les conclusions d'appel de la caisse primaire d'assurance maladie du Territoire de Belfort et de rejeter la demande présentée par Mme B...en première instance.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions de Mme B...tendant à la condamnation de la caisse primaire d'assurance maladie du Territoire de Belfort à une amende pour recours abusif dès lors que la faculté d'infliger une telle amende à la requérante constitue un pouvoir propre du juge.
Les parties ont également été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions de l'appel provoqué de Mme B...tendant à la condamnation de l'Etat à réparer les préjudices qui résulteraient de l'application de l'article L. 162-1-15 du code de la sécurité sociale dès lors que ces conclusions soulèvent un litige distinct de l'appel principal de la caisse primaire d'assurance maladie du Territoire de Belfort visant l'annulation par le tribunal administratif de Besançon de sa décision du 20 novembre 2014.
Par une ordonnance du 15 novembre 2017, le président de la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Nancy a refusé de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité de MmeB....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guérin-Lebacq,
- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,
- et les observations de MeF..., substituant Me A...D..., pour MmeB....
Considérant ce qui suit :
1. La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Territoire de Belfort a relevé, dans le cadre d'un contrôle exercé sur les prescriptions de MmeB..., médecin généraliste exerçant à Belfort, que celle-ci avait prescrit, sur la période du 15 septembre 2013 au 15 janvier 2014, un nombre de journées d'arrêt de travail, indemnisées par l'assurance maladie au titre des indemnités journalières, supérieur à la moyenne régionale. La directrice de la CPAM a décidé, le 20 novembre 2014, en application des dispositions de l'article L. 162-1-15 du code de la sécurité sociale, de soumettre à l'accord préalable du service du contrôle médical de la caisse la prise en charge des prescriptions d'arrêt de travail de l'intéressée pendant une durée de trois mois à compter du 15 janvier 2015. Mme B...a saisi le tribunal administratif de Besançon en vue d'obtenir l'annulation de cette décision, ainsi que la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices résultant selon elle de l'application des dispositions de l'article L. 162-1-15 du code de la sécurité sociale. La CPAM du Territoire de Belfort relève appel du jugement du 21 mars 2017 par lequel le tribunal administratif a annulé sa décision du 20 novembre 2014. Mme B...réitère en appel sa demande indemnitaire dirigée contre l'Etat et demande à la cour la condamnation de la caisse à verser la somme de 7 000 euros pour recours abusif.
Sur la recevabilité de l'appel principal :
2. Aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge (...) ". Aux termes de l'article R. 811-13 du même code : " Sauf dispositions contraires prévues par le présent titre, l'introduction de l'instance devant le juge d'appel suit les règles relatives à l'introduction de l'instance de premier ressort définies au livre IV (...) ".
3. La CPAM du Territoire de Belfort a présenté devant la cour administrative d'appel, dans le délai de recours, une requête d'appel qui ne constitue pas la seule reproduction littérale de ses mémoires de première instance et qui énonce à nouveau, de manière précise, les arguments présentés devant les premiers juges afin de défendre la décision dont Mme B... a demandé l'annulation au tribunal administratif. Une telle motivation répond aux conditions posées par l'article R. 411-1 précité du code de justice administrative. Par suite, la fin de non recevoir opposée par Mme B... à la requête d'appel de la caisse doit être écartée.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne le moyen retenu par les premiers juges :
4. Aux termes du I de l'article L. 162-1-15 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige : " Le directeur de l'organisme local d'assurance maladie peut décider, après que le médecin a été mis en mesure de présenter ses observations et après avis de la commission prévue à l'article L. 162-1-14, à laquelle participent des professionnels de santé, de subordonner à l'accord préalable du service du contrôle médical, pour une durée ne pouvant excéder six mois, la couverture d'actes, produits ou prestations figurant sur les listes mentionnées aux articles L. 162-1-7, L. 162-17 et L. 165-1 ainsi que des frais de transport ou le versement des indemnités journalières mentionnés aux 2° et 5° de l'article L. 321-1 et aux 1° et 2° de l'article L. 431-1 du présent code ainsi qu'aux 1° et 2° de l'article L. 752-3 du code rural et de la pêche maritime, en cas de constatation par ce service : (...) 2° Ou d'un nombre ou d'une durée d'arrêts de travail prescrits par le médecin et donnant lieu au versement d'indemnités journalières ou d'un nombre de tels arrêts de travail rapporté au nombre de consultations effectuées significativement supérieurs aux données moyennes constatées, pour une activité comparable, pour les médecins exerçant dans le ressort de la même agence régionale de santé ou dans le ressort du même organisme local d'assurance maladie (...) ".
5. Pour décider de subordonner les prescriptions de Mme B...à l'accord préalable du service du contrôle médical, la directrice de la CPAM du Territoire de Belfort s'est fondée sur la circonstance que, sur la période du 15 septembre 2013 au 15 janvier 2014, l'intéressée avait prescrit 3 772 journées d'arrêt de travail donnant lieu à des indemnités journalières alors que les médecins exerçant dans le ressort de l'agence régionale de santé de Franche-Comté en avaient prescrit un nombre moyen de 890. Il ressort des pièces du dossier que cette moyenne régionale a été calculée en excluant les 10 % de médecins dont les prescriptions sont les moins nombreuses et en procédant à une différenciation entre les médecins exerçant en zone urbaine et ceux qui sont implantés en zone rurale.
6. Mme B...soutenait devant le tribunal administratif que la CPAM n'avait procédé à aucune analyse concrète de son activité tenant compte de la sociologie de sa patientèle. Elle faisait valoir à cet égard que, travaillant dans une zone marquée par une forte précarité, 30 % de ses patients bénéficient de la couverture maladie universelle contre 7 % au niveau régional et que 46 % sont exonérés du ticket modérateur en raison d'une affection de longue durée contre 27 % au niveau régional. Elle indiquait également que ses patients actifs, en majorité des ouvriers, exercent des métiers difficiles et hésitent à cesser de travailler malgré leurs problèmes de santé par peur de perdre leur emploi, qu'une minorité de ses patients, atteints de pathologies sévères, est à l'origine d'une part importante des indemnités journalières résultant de ses prescriptions et que les statistiques de la caisse ne tiennent pas compte de ses patients résidant en dehors du département.
7. Toutefois, les circonstances alléguées par Mme B...qu'une partie de sa patientèle bénéficierait, dans une proportion plus importante qu'au niveau régional, de la couverture maladie universelle ou de l'exonération du ticket modérateur ne sont pas de nature à justifier l'importance de l'écart constaté entre sa pratique et celle de ses confrères. Elle n'apporte à l'instance aucun élément permettant de démontrer que la plus grande part des arrêts de travail donnant lieu au versement d'indemnités journalières serait imputable à certains de ses patients atteints d'affections de longue durée. La sociologie de ses patients actifs, dont Mme B...relève qu'ils sont réticents à tout arrêt de travail, n'explique pas l'écart constaté par la CPAM. Il n'est pas établi que les données statistiques utilisées par la caisse, calculées sur une base régionale, ne tiendraient pas compte des patients de Mme B...résidant en dehors du département du Territoire de Belfort. Si la commission mentionnée au I de l'article L. 162-1-15 du code de la sécurité sociale a relevé, dans sa séance du 24 septembre 2014, que Mme B...avait un grand nombre de patients dans un quartier urbain caractérisé par une faible présence de médecins libéraux, ce constat ne remet pas en cause la pertinence des éléments pris en considération par la CPAM pour comparer sa situation à celle de ses confrères au niveau régional. Il ne ressort donc pas des pièces du dossier que l'activité professionnelle de Mme B...aurait été évaluée au regard de la situation de médecins généralistes dont l'activité ne serait pas comparable à la sienne. Par suite, eu égard aux critères objectifs définis par les dispositions précitées du I de l'article L. 162-1-15 du code de la sécurité sociale, la directrice de la CPAM pouvait, sans commettre d'erreur de droit, procéder à cette comparaison entre l'activité de Mme B...et celle de ses confrères. Elle pouvait également, sans faire une inexacte application des mêmes dispositions, tirer les conséquences de cette comparaison en soumettant les prescriptions de Mme B...à l'accord préalable du service du contrôle médical.
8. Il suit de ce qui précède que la CPAM du Territoire de Belfort est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Besançon a estimé que la décision du 20 novembre 2014 avait été prise en méconnaissance des dispositions du I de l'article L. 162-1-15 du code de la sécurité sociale.
9. Il appartient toutefois à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B...devant le tribunal administratif de Besançon.
En ce qui concerne les autres moyens soulevés devant le tribunal administratif :
10. Aux termes de l'article R. 148-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige : " I. - Lorsque le directeur de l'organisme local d'assurance maladie compétent constate l'une des situations mentionnées au I de l'article L. 162-1-15, il peut mettre en oeuvre la procédure de fixation d'un objectif de réduction des prescriptions ou réalisations ou la procédure de mise sous accord préalable prévues à cet article. Dans ce cas, il notifie au médecin concerné les faits constatés ou les données chiffrées relatives à sa pratique ainsi que celles relatives à la moyenne servant de base de référence, et l'informe de son droit à être entendu, sur sa demande, ou de présenter ses observations écrites, dans le délai d'un mois. L'audition donne lieu à un procès-verbal signé par l'intéressé. Le médecin peut se faire assister par la personne de son choix. / II. - A compter de l'expiration du délai mentionné au I ou du lendemain de l'audition du médecin si celle-ci intervient postérieurement à l'expiration de ce délai, le directeur peut, dans le délai d'un mois, compte tenu des observations éventuelles du médecin : 1° Soit abandonner la procédure. Dans ce cas, il en informe l'intéressé dans les meilleurs délais ; 2° Soit proposer au médecin un objectif de réduction de ses prescriptions ou réalisations prévu au II de l'article L. 162-1-15, dans les conditions précisées à la section 2 du présent chapitre ; 3° Soit poursuivre la procédure de mise sous accord préalable prévue au I de l'article L. 162-1-15, dans les conditions précisées à la section 3 du présent chapitre (...) ". Aux termes de l'article R. 148-3 du même code, dans sa version applicable : " Dans le cas prévu au 2° du II de l'article R. 148-1, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie notifie au médecin une proposition conjointe avec le médecin-conseil chef de service compétent (...) ". Aux termes de l'article R. 148-4 de ce code : " En cas de refus de la proposition mentionnée à l'article R. 148-3, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie poursuit l'instruction de la procédure prévue à la section 3 du présent chapitre ". Aux termes de l'article 148-7 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable : " Dans le cas prévu au 3° du II de l'article R. 148-1, ou dans le cas prévu à l'article R. 148-4, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie saisit la commission mentionnée à l'article R. 147-3 ou déterminée, s'il y a lieu, dans les conditions prévues au III de l'article R. 147-1. Il informe simultanément l'intéressé de son droit à être entendu par cette commission, sur sa demande, ou de présenter ses observations écrites, dans le délai d'un mois. Le médecin peut se faire assister par la personne de son choix. / La commission rend un avis motivé portant sur la nécessité et la durée de la mise sous accord préalable (...) ". Aux termes de l'article R. 148-8 du même code : " A compter de la réception de l'avis de la commission ou de la date à laquelle celui-ci est réputé avoir été rendu, le directeur peut : 1° Soit abandonner la procédure. Dans ce cas, il en informe le médecin dans les meilleurs délais ; 2° Soit décider de poursuivre la procédure. Dans ce cas, il saisit pour avis dans un délai de quinze jours le directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie. A défaut de saisine dans le délai précité, la procédure est réputée abandonnée (...) ". Aux termes de l'article R. 148-9 de ce code : " A compter de la réception de l'avis du directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie ou de la date à laquelle celui-ci est réputé avoir été rendu, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie décide, dans le délai de quinze jours : 1° Si l'avis du directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie est défavorable, d'abandonner la procédure. Dans ce cas, il informe de sa décision le médecin dans les meilleurs délais ; 2° Si l'avis du directeur général (...) est favorable, de subordonner à l'accord préalable du service de contrôle médical compétent les prescriptions ou réalisations du médecin. Dans ce cas, il notifie au médecin sa décision motivée, qui précise les prescriptions ou réalisations concernées, la date de début et de fin de la période de mise sous accord préalable ainsi que les modalités de sa mise en oeuvre (...) ".
11. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la CPAM du Territoire de Belfort a adressé un courrier le 19 juin 2014 à Mme B...afin de l'informer qu'elle envisageait d'engager à son encontre la procédure de fixation d'un objectif de réduction des prescriptions ou la procédure de mise sous accord préalable prévue à l'article L. 162-1-15 du code de la sécurité sociale. Par ce même courrier, la CPAM lui a notifié les faits constatés et les données chiffrées relatives à sa pratique ainsi que celles relatives à la moyenne servant de base de référence. Par un deuxième courrier du 21 juillet 2014, la caisse a proposé à Mme B...un objectif de réduction de ses prescriptions. L'intéressée, qui a refusé cette proposition le 28 juillet 2014, a alors été invitée, par un courrier de la CPAM du 6 août 2014, à présenter ses observations devant la commission mentionnée au I de l'article L. 162-1-15 du code de la sécurité sociale en vue de la poursuite de la procédure de mise sous accord préalable.
12. D'une part, si Mme B... soutient n'avoir jamais reçu le premier courrier daté du 19 juin 2014, il ressort des pièces du dossier que ce courrier était joint à celui du 21 juillet 2014 lui proposant un objectif de réduction de ses prescriptions. Après que l'intéressée a refusé cette proposition, la CPAM a décidé de poursuivre la procédure de mise sous accord préalable en invitant Mme B...à présenter ses observations devant la commission, ce qu'elle a fait par écrit le 14 septembre 2014. Il ressort en outre du courrier de son avocat du 23 septembre 2014 qu'elle a bien été convoquée devant cette commission le 24 septembre 2014 à 14 heures 30, afin d'y présenter d'éventuelles observations orales. Dans ces conditions, MmeB..., qui a été mise à même de s'exprimer sur le placement de ses prescriptions sous accord préalable avant que la CPAM ne prenne la décision contestée du 20 novembre 2014, n'a été privée d'aucune garantie. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'absence de réception, par l'intéressée, du courrier du 19 juin 2014 aurait exercé, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise.
13. D'autre part, il ressort tant du compte-rendu de la séance de la commission du 24 septembre 2014 que des termes de la décision du 20 novembre 2014 que les observations de Mme B... ont été prises en compte. Il ressort encore du compte-rendu précité que la commission a disposé des éléments utiles qui lui ont permis de se prononcer sur la situation de l'intéressée.
14. Enfin, Mme B...reproche à la CPAM d'avoir engagé la procédure de mise sous accord préalable sans avoir préalablement analysé sa situation de façon concrète en tenant compte de la typologie de sa patientèle. Il résulte de ce qui a été dit au point 7 que ce moyen ne peut qu'être écarté.
15. Il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée serait entachée d'un vice de procédure.
16. En deuxième lieu, Mme B...soutient que la décision du 20 novembre 2014 est insuffisamment motivée, alors qu'elle n'a pas été destinataire de l'avis de la commission précitée qui aurait pu éclairer le sens de cette décision. Toutefois, contrairement à ce qu'elle soutient, la décision du 20 novembre 2014 mentionne les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est suffisamment motivée au sens des dispositions précitées de l'article R. 148-9 du code de la sécurité sociale. Il ressort en outre des pièces du dossier que l'avis de la commission a été communiqué à Mme B...par un courrier du 20 novembre 2014.
17. En troisième lieu, aux termes de l'article 10 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, alors applicable : " (...) Aucune (...) décision produisant des effets juridiques à l'égard d'une personne ne peut être prise sur le seul fondement d'un traitement automatisé de données destiné à définir le profil de l'intéressé ou à évaluer certains aspects de sa personnalité (...) ". Les données statistiques prises en compte par la CPAM pour comparer l'activité de Mme B...à celle de ses collègues ne constituent que l'un des éléments qu'apprécie la caisse pour prendre sa décision et ne sauraient en constituer le seul fondement. Si l'intéressée soutient que la décision contestée méconnaît les dispositions précitées, il résulte des termes mêmes de cette décision que la CPAM a décidé de placer les prescriptions de l'intéressée sous l'accord préalable du service du contrôle médical après avoir exercé son pouvoir d'appréciation, sans s'estimer liée par les données statistiques résultant du système informatique de suivi des prescriptions médicales. Par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance des dispositions de l'article 10 de la loi du 6 janvier 1978 doit être écarté.
18. En dernier lieu, il résulte des dispositions précitées du 2° du I de l'article L. 162-1-15 du code de la sécurité sociale que, pour leur mise en oeuvre, le directeur de la CPAM peut comparer l'activité du médecin à celles de ses confrères en se référant aux médecins implantés soit dans le ressort de la même agence régionale de santé, soit dans celui du même organisme local d'assurance maladie. Par ailleurs, Mme B...fait valoir que certains de ses patients résident en dehors du département du Territoire de Belfort. Il n'est donc pas établi que la situation de l'intéressée aurait fait l'objet d'une analyse plus pertinente en la comparant à celle de ses confrères exerçant dans le ressort de la CPAM du Territoire de Belfort plutôt que, comme en l'espèce, à celles des médecins généralistes exerçant dans le ressort de l'agence régionale de santé de Franche-Comté.
19. Il résulte de tout ce qui précède que la CPAM du Territoire de Belfort est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a annulé sa décision du 20 novembre 2014.
Sur l'appel provoqué de MmeB... :
20. Il résulte de l'instruction que le jugement du tribunal administratif de Besançon du 21 mars 2017 a été notifié le 23 mars 2017 à MmeB.... Ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser de ses préjudices, présentées dans un mémoire enregistré le 27 juillet 2017, ont par conséquent le caractère d'un appel provoqué. Ces conclusions soulèvent un litige distinct de celui qui fait l'objet de l'appel principal formé par la CPAM du Territoire de Belfort, qui ne vise que l'annulation, par ce jugement, de la décision du 20 novembre 2014. Par suite, l'appel provoqué présenté par Mme B...le 27 juillet 2017, après l'expiration du délai d'appel, est irrecevable.
Sur les conclusions tendant à la condamnation de la caisse pour recours abusif :
21. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros ".
22. La faculté prévue par ces dispositions constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions de Mme B...tendant à ce que la CPAM du Territoire de Belfort soit condamnée à une telle amende ne sont pas recevables.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la CPAM du Territoire de Belfort, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont Mme B...demande le versement au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B...la somme dont la CPAM du Territoire de Belfort demande le versement sur le fondement des mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Besançon n° 1500091 et 1500923 du 21 mars 2017 est annulé.
Article 2 : La demande de Mme B...tendant à l'annulation de la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Territoire de Belfort du 20 novembre 2014, subordonnant le versement des indemnités journalières résultant de ses prescriptions médicales à l'accord préalable du service de contrôle médical, est rejetée.
Article 3 : Les conclusions des parties sont rejetées pour le surplus.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la caisse primaire d'assurance maladie du Territoire de Belfort, à MmeC... B..., à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Saône et à la ministre des solidarités et de la santé.
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N° 17NC01163