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05/02/2019 | FRANCE | N°17NC01110

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 05 février 2019, 17NC01110


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 29 juillet 2015 par laquelle le directeur du centre hospitalier spécialisé Ravenel de Mirecourt a refusé de prolonger son activité au-delà de ses 60 ans pendant une durée d'un an, ainsi que la décision du 7 octobre 2015 par laquelle la même autorité l'a radiée des cadres pour limite d'âge à compter du 29 octobre 2015.

Par un jugement n° 1503029 du 16 mars 2017, le tribunal administratif de Nancy a annulé les d

cisions des 29 juillet 2015 et 7 octobre 2015.

Procédure devant la cour :

Par une ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 29 juillet 2015 par laquelle le directeur du centre hospitalier spécialisé Ravenel de Mirecourt a refusé de prolonger son activité au-delà de ses 60 ans pendant une durée d'un an, ainsi que la décision du 7 octobre 2015 par laquelle la même autorité l'a radiée des cadres pour limite d'âge à compter du 29 octobre 2015.

Par un jugement n° 1503029 du 16 mars 2017, le tribunal administratif de Nancy a annulé les décisions des 29 juillet 2015 et 7 octobre 2015.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 mai 2017, et un mémoire en réplique enregistré le 15 janvier 2018, le centre hospitalier spécialisé Ravenel, représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 16 mars 2017 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- Mme A...avait perdu tout intérêt à agir contre les décisions contestées dès lors qu'elle avait demandé son admission à la retraite ;

- la décision du 29 juillet 2015 présente un caractère purement confirmatif ;

- l'intéressée, classée au 8ème échelon de son grade de cadre de santé, avait 60 ans pour limite d'âge en application de l'article 1er de la loi du 18 août 1936, laquelle n'a pas été abrogée ;

- elle a opté le 21 juin 2013 pour son maintien dans le corps des cadres de santé afin de conserver cette limite d'âge.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 octobre 2017, Mme C...A..., représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge du centre hospitalier en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa demande devant le tribunal administratif était recevable ;

- l'administration, qui a gardé le silence sur sa demande de prolongation pendant plus de trois mois, est réputée l'avoir implicitement acceptée ;

- les décisions contestées sont insuffisamment motivées ;

- il résulte de l'article 1er de la loi du 13 septembre 1984 et de l'article 2 du décret du 30 décembre 2009 que sa limite d'âge est fixée à 67 ans ;

- l'article 1er de la loi du 18 août 1936 a été abrogé par la loi du 30 décembre 1975 ;

- la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales lui a indiquée, dans le cadre de son droit à l'information sur son régime de retraite, que sa limite d'âge était fixée à 62 ans ;

- à supposer que sa limite d'âge soit fixée à 60 ans, elle pouvait prolonger son activité en application de l'article 1er du décret du 30 décembre 2009.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi du 18 août 1936 ;

- la loi n° 75-1280 du 30 décembre 1975 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 ;

- la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 ;

- le décret n° 87-1077 du 30 novembre 1988 ;

- le décret n° 2001-1375 du 31 décembre 2001 ;

- le décret n° 2012-1466 du 26 décembre 2012 ;

- l'arrêté du 12 novembre 1969 relatif au classement des emplois des agents des collectivités locales en catégorie A et B ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guérin-Lebacq,

- les conclusions de Mme Haudier, rapporteur public,

- et les observations de Me E...pour le centre hospitalier spécialisé Ravenel et de Me D...pour MmeA....

Considérant ce qui suit :

1. MmeA..., née le 28 octobre 1955, a été recrutée en 1976 par le centre hospitalier spécialisé (CHS) Ravenel où elle a exercé les fonctions d'infirmière puis de surveillante des services médicaux. Elle a été reclassée dans le corps des cadres de santé le 28 janvier 2003. Le 21 juin 2013, Mme A...a refusé une intégration dans le corps nouvellement créé des cadres de santé paramédicaux afin de conserver les droits liés au classement dans la catégorie active des emplois qu'elle avait occupés au cours de sa carrière. Par un courrier du 3 avril 2015, le CHS Ravenel a informé Mme A...qu'elle devrait cesser son activité le 29 octobre 2015 au motif qu'elle aurait alors atteint sa limite d'âge. En réponse, l'intéressée a demandé, le 27 mai 2015, la prolongation de son activité professionnelle pour une année supplémentaire. Le CHS Ravenel a rejeté cette demande par une décision du 28 juillet 2015. Le recours gracieux présenté par Mme A...le même jour a été rejeté par une décision du 29 juillet 2015. Par une décision du 7 octobre 2015, l'établissement de santé a radié des cadres Mme A...pour limite d'âge, avec effet à compter du 29 octobre suivant. Le CHS Ravenel relève appel du jugement du 16 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Nancy a annulé ses décisions des 29 juillet et 7 octobre 2015.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de MmeA... :

2. En premier lieu, le CHS Ravenel fait valoir que MmeA..., qui a saisi le tribunal administratif le 26 octobre 2015, avait perdu tout intérêt à agir contre les décisions contestées lorsque les premiers juges se sont prononcés, dès lors qu'elle avait présenté le 17 novembre 2015 une demande d'admission à la retraite à la date anniversaire de ses 60 ans. Toutefois, et contrairement à ce que soutient l'établissement de santé, l'intérêt à agir s'apprécie à la date d'introduction de la demande devant le tribunal administratif. Les décisions prises par l'établissement de santé refusant d'accorder une prolongation d'activité d'une année à Mme A...et prononçant sa radiation des cadres à la date du 29 octobre 2015 lui faisaient grief lorsqu'elle a saisi le tribunal administratif de Nancy le 26 octobre 2015 et, au demeurant, continuaient de lui faire grief après le 17 novembre 2015, date à laquelle elle a sollicité son admission à la retraite afin de ne pas rester sans ressources. Par suite, le CHS Ravenel n'est pas fondé à soutenir que Mme A...aurait perdu tout intérêt à agir contre les décisions contestées.

3. En second lieu, ni la décision du 28 juillet 2015 refusant d'accorder une prolongation d'activité à MmeA..., ni la décision du 29 juillet suivant rejetant le recours gracieux formé contre la première décision ne comporte un énoncé complet des voies et délais de recours. Par ailleurs, l'administration ne justifie pas de la notification de ces deux décisions. Mme A...était donc recevable à demander l'annulation de la décision du 29 juillet 2015, qui ne présentait pas le caractère d'une décision confirmative, lorsqu'elle a saisi le tribunal administratif le 26 octobre 2015.

En ce qui concerne la limite d'âge applicable à MmeA... :

4. Aux termes de l'article 85 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Les fonctionnaires régis par le présent titre ne peuvent être maintenus en fonctions au-delà de la limite d'âge de leur emploi (...) ". Si aucune limite d'âge n'est déterminée par le statut particulier du corps auquel appartient un agent de la fonction publique hospitalière, la limite d'âge à prendre en considération est celle qui est fixée pour les agents de l'Etat.

5. En outre, aux termes de l'article 37 de la loi du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique : " I. - La limite d'âge des fonctionnaires régis par les statuts particuliers des corps et cadres d'emplois d'infirmiers et de personnels paramédicaux appartenant à la catégorie A, ainsi que du corps des cadres de santé, créés à compter de la date de publication de la présente loi, est fixée à soixante-sept ans. Les emplois de ces corps et cadres d'emplois ne sont pas classés dans la catégorie active prévue au 1° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite. / II. - Les fonctionnaires qui relèvent, à la date de création des corps et cadres d'emplois mentionnés au I du présent article, des corps et cadres d'emplois d'infirmiers et de personnels paramédicaux dont les emplois sont classés dans la catégorie active prévue au 1° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ainsi que les fonctionnaires qui relèvent à la même date du corps des cadres de santé et des autres corps ou cadres d'emplois de personnels paramédicaux et qui ont occupé des emplois ainsi classés, peuvent, dans des conditions définies par les statuts particuliers des corps et cadres d'emplois, opter individuellement soit en faveur du maintien dans leurs corps ou cadres d'emplois associé à la conservation des droits liés au classement dans la catégorie active, soit en faveur d'une intégration dans les corps et cadres d'emplois mentionnés au I du présent article (...) ". Aux termes du II de l'article 22 du décret du 26 décembre 2012 portant statut particulier du corps des cadres de santé paramédicaux de la fonction publique hospitalière : " Le droit d'option prévu par les dispositions de l'article 37 de la loi du 5 juillet 2010 susvisée est ouvert aux membres du corps des cadres de santé régi par le décret du 31 décembre 2001 susvisé pouvant faire valoir, à la date d'ouverture de ce droit d'option, une durée de services effectifs dans un emploi classé dans la catégorie active (...) / Le choix ainsi exprimé par l'agent est définitif ".

6. Il est constant que Mme A...qui, à la date de création du corps des cadres de santé paramédicaux, relevait du corps des cadres de santé régi par le décret du 31 décembre 2001, a opté en faveur de son maintien dans ce dernier corps afin de conserver ses droits liés au classement dans la catégorie active des emplois qu'elle a occupés au cours de sa carrière en qualité d'infirmière et de surveillante des services médicaux. Ni le décret du 31 décembre 2001 portant statut particulier du corps des cadres de santé de la fonction publique hospitalière, ni le décret du 30 novembre 1988 portant statuts particuliers des personnels infirmiers de la fonction publique hospitalière ne fixent de limite d'âge. En l'absence d'une telle limite d'âge, il y a lieu de prendre en considération celle qui est fixée pour les agents de l'Etat.

7. A cet égard, la limite d'âge fixée pour les agents de l'Etat occupant des emplois classés en catégorie active, dite " catégorie B ", résulte des dispositions de l'article 1er de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté qui énoncent que : " La limite d'âge est abaissée pour les fonctionnaires et employés civils de l'Etat de la catégorie A et de la catégorie B dans les conditions ci-dessous : (...) / Catégorie B : 1er échelon, 67 ans. 2e échelon, 65 ans. 3e échelon, 62 ans. 4e échelon, 60 ans ". Aux termes du premier alinéa de l'article 1er de la loi du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public dispose, dans sa rédaction applicable au litige que : " Sous réserve des reculs de limite d'âge pouvant résulter des textes applicables à l'ensemble des agents de l'État, la limite d'âge des fonctionnaires civils de l'État est fixée à soixante-sept ans lorsqu'elle était, avant l'intervention de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, fixée à soixante-cinq ans (...) ". En outre, aux termes du I de l'article 28 de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites : " Pour les fonctionnaires relevant de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée dont la limite d'âge était de soixante-cinq ans en application des dispositions législatives et réglementaires antérieures à l'entrée en vigueur de la présente loi et nés à compter du 1er janvier 1955, la limite d'âge est fixée à soixante-sept ans ". Sous réserve des dispositions prévoyant des reculs de limite d'âge, la loi du 9 novembre 2010 n'a pas eu pour effet de modifier la limite d'âge prévue au 1er échelon de la catégorie active par la loi du 18 août 1936 pour un fonctionnaire né après le 1er janvier 1955.

8. Les emplois d'infirmière et de surveillante des services médicaux occupés par Mme A... relèvent de la catégorie active en application de l'arrêté du 12 novembre 1969 relatif au classement des emplois des agents des collectivités locales en catégorie A et B, mais sans que cet arrêté, ni aucun autre texte ne prévoie une répartition de ces emplois entre les différents échelons prévus par la loi du 18 août 1936. Dans ces conditions, la seule limite d'âge applicable aux agents de l'Etat qui puisse être appliquée aux agents des services hospitaliers ayant occupé des emplois de la catégorie active est celle qu'ils ne peuvent en tout état de cause pas dépasser, c'est-à-dire celle prévue pour le premier échelon de la catégorie active des agents de l'Etat. Cette limite étant fixée à 67 ans en application des dispositions précitées de la loi du 18 août 1936, le CHS Ravenel ne pouvait donc légalement s'opposer à la demande de prolongation d'activité présentée par Mme A..., ni la radier des cadres au motif qu'elle avait atteint l'âge de 60 ans.

9. Il résulte de ce qui précède que le CHS Ravenel n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a annulé ses décisions des 29 juillet et 7 octobre 2015.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de MmeA..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont le CHS Ravenel demande le versement au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge du CHS Ravenel une somme de 1 500 euros à verser à MmeA... sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du CHS Ravenel est rejetée.

Article 2 : Le CHS Ravenel versera à Mme A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier spécialisé Ravenel et à Mme C...A....

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N° 17NC01110


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC01110
Date de la décision : 05/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-01 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Mise à la retraite pour ancienneté ; limites d'âge.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : LOMBARD

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-02-05;17nc01110 ?
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