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11/12/2018 | FRANCE | N°17NC00503

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 11 décembre 2018, 17NC00503


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision verbale par laquelle la société Orange l'a affecté au service de gestion des successions (GSU) et la décision du 24 janvier 2014 rejetant son recours gracieux contre cette décision d'affectation.

Il a également demandé au tribunal de condamner la société Orange à lui verser une somme de 43 575 euros avec intérêts de droit en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité de cette décision.

Par un

jugement no 1400975-1500271 du 30 décembre 2016, le tribunal administratif de Besançon a reje...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision verbale par laquelle la société Orange l'a affecté au service de gestion des successions (GSU) et la décision du 24 janvier 2014 rejetant son recours gracieux contre cette décision d'affectation.

Il a également demandé au tribunal de condamner la société Orange à lui verser une somme de 43 575 euros avec intérêts de droit en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité de cette décision.

Par un jugement no 1400975-1500271 du 30 décembre 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 février 2017, M. B...A..., représenté par la SELAFA Cabinet Cassel, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement no 1400975-1500271 du 30 décembre 2016 ;

2°) d'annuler la décision verbale de la société Orange le nommant au service de gestion des successions (GSU) ainsi que la décision du 24 janvier 2014 rejetant son recours gracieux contre cette décision ;

3°) d'annuler la décision implicite de rejet de sa réclamation préalable du 30 octobre 2014 tendant à l'indemnisation de ses préjudices ;

4°) d'enjoindre à la société Orange de le réintégrer sur son ancien poste de " conseiller client " et de lui verser rétroactivement les primes qu'il aurait dû percevoir, notamment la part variable sur les ventes sur la base validée en février 2013 et, en toute hypothèse, de réexaminer sa situation, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

5°) de condamner la société Orange à lui verser une somme de 43 575 euros à parfaire avec intérêts au taux légal à compter de la date de sa réclamation préalable ;

6°) de mettre à la charge de la société Orange la somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions attaquées sont entachées d'incompétence ;

- la commission administrative paritaire devait être saisie avant son changement d'affectation ;

- le comité médical aurait dû être consulté en application de l'article 2 du décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 ;

- le changement d'affectation est entaché d'un vice de procédure dès lors qu'il est intervenu avant l'avis du médecin du travail du 24 octobre 2013 ;

- le changement d'affectation est entaché d'une erreur de droit dès lors que la société Orange s'est cru liée par l'avis du médecin du travail ;

- les décisions attaquées sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- les décisions illégales l'ont privé d'une prime et en particulier de la part variable des ventes et lui ont causé un préjudice moral ;

- les décisions illégales l'ont obligé à consacrer son temps libre à des démarches en vue d'obtenir la révision de sa situation ;

- les décisions illégales ont eu des conséquences sur son état de santé et ont généré des frais médicaux ;

- son placement en congés de maladie l'a empêché de poser ses congés annuels dont il est fondé à demander l'indemnisation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2017, la société Orange, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. A...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;

- le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1983 ;

- le décret n° 94-131 du 11 février 1994 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Barteaux,

- et les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., fonctionnaire des PTT depuis 1976, a intégré les services de France Telecom en 1995, devenue depuis la société Orange. Il a exercé les fonctions de " conseiller client " (Grade C) à " l'agence ventes services clients " (AVSC) de Belfort. A la suite d'une réorganisation interne entraînant la fermeture de cette agence et la création du service " Open ", relatif à la téléphonie mobile et fixe, l'internet et la télévision, M. A...a été invité, par un courrier du 11 juillet 2013, à choisir parmi trois postes. Il a demandé le poste de conseiller client " Open " au " centre clients Orange " de Belfort. Par un courrier du 17 juillet 2013, son affectation à ce poste lui a été confirmée à compter du 1er août 2013. Il a commencé la formation nécessaire à l'exercice de ses nouvelles fonctions le 22 juillet 2013, sans pouvoir l'achever en raison de ses congés annuels pris du 16 août au 7 septembre 2013. De ce fait, lors de la reprise du service, il n'a pas été affecté à son nouveau poste mais, provisoirement, à un poste de " conseiller client " dans le service " gestion des successions ". Le 5 août 2013, l'intéressé a signé un protocole " temps partiel senior handicapé " pour une période allant du 1er septembre 2013 au 30 avril 2018, date de son départ en retraite. Le 24 octobre 2013, M. A... a été examiné, à sa demande, par le médecin du travail de la société Orange qui l'a déclaré apte à son poste avec une restriction. Par un courrier du 8 novembre 2013, la société Orange l'a informé de son affectation dans le service " gestion des successions " du " centre clients Orange " de Belfort révélant ainsi un changement d'affectation définitif. Il a formé un recours administratif contre ce changement d'affectation qui a été rejeté par une décision du 24 janvier 2014. Le tribunal administratif de Besançon saisi, d'une part, d'un recours en annulation contre la décision du 24 janvier 2014 et contre la décision de changement d'affectation révélée par le courrier du 8 novembre 2013 et, d'autre part, de conclusions indemnitaires a rejeté les demandes de M. A...par un jugement du 30 décembre 2016, dont l'intéressé relève appel.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation des décisions de changement d'affectation :

2. En premier lieu, d'une part, la décision de changement d'affectation, révélée par la décision du 8 novembre 2013, doit être regardée comme ayant été prise par le directeur du CCOR Grand Est, autorité compétente en matière de gestion du personnel. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, et notamment de la délégation de pouvoirs et de signatures produite par la société Orange, que MmeD..., directrice des ressources humaines du CCOR Grand Est, bénéficiait d'une délégation du directeur du CCOR Grand Est pour signer la décision attaquée du 24 janvier 2014. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de ces décisions doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 dans sa rédaction alors applicable : " L'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires. (...) ". Aux termes de l'article 25 du décret du 11 février 1994, dans sa version applicable à la date de la décision en litige, relatif aux commissions administratives paritaires de France Télécom : " Les commissions administratives paritaires (...) connaissent des questions d'ordre individuel résultant de l'application de l'article 24, premier alinéa (2°) et second alinéa, de la loi du 13 juillet 1983 susvisée ainsi que des articles 45, 48, 51, 55, 58, 60, 67, 70 et 72 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée.(...) ".

4. Il résulte de ces dispositions que la consultation de la commission administrative paritaire est obligatoire lorsqu'une mutation emporte un changement de résidence ou une modification de la situation de l'agent. M. A...a été affecté dans un autre service du " centre clients Orange " de Belfort. Ce changement d'affectation n'entraîne ni changement de résidence, ni modification de sa situation, même s'il implique, par voie de conséquence, la perte de primes, dès lors notamment que ses nouvelles fonctions correspondent à celles qui peuvent être confiées aux agents de son corps et qu'au demeurant, elles ne sont pas sensiblement différentes de celles qu'il exerçait. Dans ces conditions, la société Orange n'était pas tenue de recueillir l'avis de la commission administrative paritaire préalablement au changement d'affectation de M.A....

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 2 du décret du 30 novembre 1984 pris en application de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 : " Dans le cas où l'état physique d'un fonctionnaire, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas de remplir les fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'administration, après avis du comité médical, invite l'intéressé à présenter une demande de reclassement dans un emploi d'un autre corps ".

6. Il résulte de ces dispositions que ce n'est que lorsqu'un fonctionnaire a été reconnu inapte à l'exercice des fonctions correspondant aux emplois de son grade que l'autorité hiérarchique est tenue de l'inviter à présenter, s'il le souhaite, une demande de reclassement dans un emploi d'un autre corps. Il ressort des pièces du dossier, notamment des fiches d'aptitude des 16 mai 2013 et du 24 octobre 2013, que M. A...a été déclaré apte aux emplois de son corps. Ainsi, la société Orange n'était pas tenue, avant de procéder à son changement d'affectation dans un autre emploi de son corps, de recueillir au préalable l'avis du comité médical.

7. En quatrième lieu, si M. A...a été affecté provisoirement dans le service " gestion des successions ", faute d'avoir accompli la formation pour exercer dans le service " Open ", il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait été définitivement affecté dans ce service antérieurement à l'avis du médecin du travail du 24 octobre 2013. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait entachée d'un vice de procédure en l'absence d'avis préalable du médecin du travail doit, en tout état de cause, être écarté.

8. En cinquième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 4624-1 du code du travail, dans sa version applicable au litige, que l'employeur est tenu de prendre en considération les propositions de mesures individuelles du médecin du travail justifiées par l'état de santé du travailleur et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite. Par suite, en décidant d'affecter définitivement M. A...à un poste de conseiller au sein du service " gestion des successions ", sans contact physique et téléphonique avec la clientèle conformément aux préconisations du médecin du travail du 24 octobre 2013, la société Orange n'a pas commis d'erreur de droit.

9. En dernier lieu, s'il ressort des pièces du dossier que M. A...avait émis le voeu, à la suite de la suppression de son poste dans le cadre de la réorganisation des services d'Orange, d'occuper les fonctions de " conseiller client Open " du " centre clients " de Belfort, il est constant, quelles qu'en soient les raisons, qu'il n'a pas intégralement suivi la formation " Open " lui permettant d'être affecté, comme l'avait accepté initialement la direction de la société Orange, à ce poste. De plus, si l'avis du médecin du travail du 24 octobre 2013 le déclarant apte à son poste avec des restrictions portait sur le poste de " conseiller clients " qu'il occupait provisoirement au sein du service " gestion des successions ", il n'en demeure pas moins, à défaut de précisions et d'avis contraires, que les restrictions médicales concernant l'absence de contacts physiques et téléphoniques avec les clients, s'opposaient également à ce que l'intéressé soit affecté au poste de " conseiller client Open " qui impliquait notamment des contacts physiques avec la clientèle. En revanche, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment de la fiche d'aptitude du médecin du travail du 24 octobre 2013, que le poste de " conseiller clients " dans le service " gestion des successions " auquel M. A... a été définitivement affecté serait incompatible avec son état de santé. Enfin, si le requérant a exercé pendant plus de dix ans une activité de ventes, cette circonstance ne permet pas de regarder son changement affectation comme dépourvu d'intérêt pour le service. Par suite, en décidant d'affecter définitivement M. A...au poste de " conseiller clients " dans le service de " gestion des successions ", la société Orange n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté ses demandes indemnitaires.

Sur les frais liés à l'instance :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société Orange, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. A...la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la société Orange présentées sur le même fondement.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société Orange sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et à la société Orange.

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N° 17NC00503


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC00503
Date de la décision : 11/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-01 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Affectation et mutation.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : CABINET CASSEL (SELAFA)

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-12-11;17nc00503 ?
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