Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 5 janvier 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a constaté qu'elle n'était plus admise au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français avec un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éloignement.
Par un jugement n° 1800466 du 17 avril 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 mai 2018, Mme D...A..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 17 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 janvier 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a constaté qu'elle n'était plus admise au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français avec un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éloignement ;
2°) d'annuler cet arrêté du 5 janvier 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
Sur la régularité du jugement :
- ni l'expédition notifiée aux parties ni la minute du jugement n'ont été signées par les membres de la formation de jugement ;
- il n'a pas été statué sur l'intervention volontaire de M. B...A..., son époux qui a déposé la demande de regroupement familial ; le tribunal ayant statué infra petita, son jugement est irrégulier ;
- le tribunal a à tort considéré que l'arrêté contesté ne constitue pas le rejet de la demande de regroupement familial déposée par M.A... ; le jugement est entaché d'une erreur de fait ;
- le jugement est entaché d'une contradiction de motifs ;
Sur la légalité de l'arrêté :
- l'arrêté est entaché d'un vice de compétence ;
- l'arrêté est entaché d'un vice de procédure au regard de l'article L. 314-5 du code des relations entre le public et l'administration dès lors que le préfet a refusé l'admission au séjour de Mme A...au motif que le dossier était incomplet sans solliciter au préalable les pièces manquantes ;
- le préfet a commis un détournement de pouvoir puisque l'arrêté refuse en réalité la demande de regroupement familial déposée par son mari ;
- la décision est privée de base légale et entachée d'une erreur de droit dès lors qu'il est reproché, à tort, à son époux de ne pas être son mandataire ;
- l'arrêté méconnait le 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mai 2018.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Lambing a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., née en 1997 de nationalité kosovare, serait entrée irrégulièrement en France le 7 janvier 2017 selon ses déclarations. Le 15 février 2017, elle a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 29 mai 2017 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 21 novembre 2017. Le 25 octobre 2017, M. A...a sollicité un regroupement familial en faveur de son épouse. Par arrêté du 5 janvier 2018, le préfet du Bas-Rhin a constaté que Mme A... n'était plus admise au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français avec un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éloignement. Mme A... relève appel du jugement du 17 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 5 janvier 2018.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".
3. Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué est signée par le président de la formation de jugement, l'assesseur le plus ancien ainsi que par le greffier d'audience. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifiée à Mme A...ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement. Le moyen tiré de l'absence de signature du jugement attaqué manque ainsi en fait et doit, par suite, être écarté.
4. En deuxième lieu, il ressort des motifs et du dispositif du jugement que le tribunal a statué sur l'intervention de M. A...à l'instance introduite par son épouse. Contrairement à ce que soutient MmeA..., les premiers juges n'ont ainsi pas entaché d'irrégularité leur décision.
5. En troisième lieu, les moyens tirés de ce que les premiers ont à tort considéré que l'arrêté contesté ne constitue pas le rejet de la demande de regroupement familial déposée par M. A..., et de ce que le jugement serait entaché d'une contradiction de motifs, concernent le bien fondé du jugement et non sa régularité.
Sur la légalité de l'arrêté du 5 janvier 2018 :
6. En premier lieu, Mme A...se borne à reprendre en appel, sans apporter plus de précisions ou de justifications, le moyen tiré du défaut de compétence du signataire de l'arrêté, dès lors qu'il n'est pas établi qu'il disposerait d'une délégation de signature régulière et qu'il n'est pas justifié que le secrétaire général de la préfecture aurait été absent ou empêché. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges.
7. En deuxième lieu, aux termes aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étranger et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ". Aux termes de l'article L. 743-3 du même code : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI. ".
8. Mme A...soutient que le préfet ne pouvait se fonder sur l'incomplétude de la demande de regroupement familial déposée par son mari le 25 octobre 2017 pour refuser son admission au séjour. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile déposée par Mme A... a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 29 mai 2017 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 21 novembre 2017. L'arrêté contesté vise les dispositions précitées des articles L. 511-1 I 6° et L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que le refus de la qualité de réfugié et de la protection subsidiaire opposé à MmeA.... L'arrêté constate ensuite, dans son dispositif, que Mme A...n'est plus admise au séjour. Dans ces conditions, le préfet a statué uniquement sur la situation de Mme A...à la suite du rejet définitif de sa demande d'asile. La demande de regroupement familial déposée par son mari a seulement été prise en compte par le préfet dans le cadre de l'appréciation des atteintes portées à sa vie privée et familiale. Il s'en suit que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que le préfet a méconnu l'article L. 314-5 du code des relations entre le public et l'administration, et que l'arrêté serait entaché d'un vice de procédure.
9. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8, le préfet n'a ni entaché sa décision de détournement de pouvoir, ni entaché son arrêté d'une erreur de droit au sens de l'article 1432 du code civil, l'arrêté contesté n'étant pas fondé sur ces dispositions.
10. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 8° A l'étranger reconnu réfugié en application du livre VII ainsi qu'à : a) Son conjoint, son partenaire avec lequel il est lié par une union civile ou son concubin, s'il a été autorisé à séjourner en France au titre de la réunification familiale dans les conditions prévues à l'article L. 752-1 ; b) Son conjoint ou son partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d'au moins dix-huit ans, si le mariage ou l'union civile est postérieur à la date d'introduction de sa demande d'asile, à condition que le mariage ou l'union civile ait été célébré depuis au moins un an et sous réserve d'une communauté de vie effective entre époux ou partenaires ; (...) ". Aux termes de l'article L. 752-1 du même code : " I.-Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié ou qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : 1° Par son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d'au moins dix-huit ans, si le mariage ou l'union civile est antérieur à la date d'introduction de sa demande d'asile (...) ".
11. Mme A...soutient que son mari bénéficiant de la protection subsidiaire, le préfet a méconnu les dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en édictant l'arrêté attaqué. Toutefois, Mme A...a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile le 15 février 2017. M. et Mme A...se sont mariés antérieurement à la date d'introduction de la demande d'asile de cette dernière, le 28 juillet 2016. Il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A...ait été autorisée à séjourner en France au titre de la réunification familiale. Il s'ensuit que Mme A...ne remplissait pas les conditions posées par les dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur de droit au regard de ces dispositions ne peut qu'être écarté.
12. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...). ".
13. Il ressort des pièces du dossier que Mme A...était présente en France depuis un an à la date de la décision attaquée. Si M. et Mme A...se sont mariés le 28 juillet 2016, la communauté de vie entre les époux n'a débuté qu'en février 2017, date à laquelle Mme A...établit sa présence en France. Mme A...se prévaut de la présence en France de membres de sa belle-famille, sans toutefois justifier de l'intensité des liens qu'elle entretient avec eux. Mme A... n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où réside la totalité de sa famille. La séparation des époux ne serait que temporaire le temps de l'instruction d'une demande de regroupement familial ou de réunification familiale. Dans ces conditions, Mme A...n'est pas fondée à soutenir qu'en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts de cette décision.
14. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 13, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation. Le moyen doit être écarté.
15. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A...et au ministre de l'intérieur.
Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
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N° 18NC01465