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20/11/2018 | FRANCE | N°18NC01644

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 20 novembre 2018, 18NC01644


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2017 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1800004 du 2 mai 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour

:

I. Par une requête, enregistrée le 1er juin 2018 sous le n° 18NC01645, le préfet du Bas-Rhin ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2017 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1800004 du 2 mai 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 1er juin 2018 sous le n° 18NC01645, le préfet du Bas-Rhin demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 2 mai 2018 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Strasbourg.

Il soutient que c'est à tort que le tribunal a considéré que M. A...n'avait pas été informé de la possibilité d'être assisté d'un interprète lors de son audition par le collège des médecins de l'OFII.

Par un mémoire, enregistré le 13 août 2018, M. B...A..., représenté par Me Burkatzki, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il reprend les moyens qu'il a invoqués en première instance et soutient que :

- la requête est privée d'objet dès lors que le préfet lui a délivré une autorisation provisoire de séjour en exécution du jugement du tribunal administratif ;

- le moyen invoqué par le préfet n'est pas fondé.

II. Par une requête, enregistrée le 1er juin 2018, sous le n° 18NC01644, le préfet du Bas-Rhin demande à la cour d'ordonner le sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 2 mai 2018.

Il soutient que les moyens exposés sous la requête enregistrée sous le n° 18NC01645 sont de nature à entraîner l'annulation de ce jugement et le rejet de la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Strasbourg.

Par des mémoires, enregistrés les 2 juillet et 13 août 2018, M. B...A..., représenté par Me Burkatzki, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le préfet lui a délivré une autorisation provisoire de séjour et a ainsi exécuté le jugement du tribunal administratif ;

- le moyen invoqué par le préfet n'est pas fondé.

Par des décisions du 10 juillet 2018, le président du bureau d'aide juridictionnelle a maintenu la décision du 31 janvier 2018 accordant à M. A...le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Haudier a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Les requêtes n° 18NC01644 et 18NC01645 du préfet du Bas-Rhin ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a ainsi lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

2. M. B...A..., ressortissant kosovar né en 1984 a déclaré être entré en France au mois de septembre 2015 afin d'y solliciter l'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 16 juin 2016 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 7 décembre 2016. Le 8 mars 2017, il a présenté une demande de titre de séjour en se prévalant de son état de santé. Par un arrêté du 13 décembre 2017, le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné à l'expiration de ce délai. Le préfet relève appel du jugement du 2 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cet arrêté.

Sur les conclusions à fin de non-lieu :

3. Contrairement à ce que soutient que M.A..., la circonstance que le préfet lui ait délivré le 9 août 2018 une autorisation provisoire de séjour en exécution du jugement du tribunal administratif ne prive pas d'objet le recours formé ce dernier tendant à l'annulation dudit jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ".

5. Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " (...) Le collège de médecins peut entendre et, le cas échéant, examiner le demandeur et faire procéder aux examens estimés nécessaires. Le demandeur présente au service médical de l'office les documents justifiant de son identité. Il peut être assisté d'un interprète et d'un médecin (...) ". L'article 7 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise que " (...) Le collège peut convoquer le demandeur. Dans ce cas, le demandeur peut être assisté d'un interprète et d'un médecin de son choix (...) ".

6. Il résulte de ces dernières dispositions que si un étranger qui a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est convoqué par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) afin d'être auditionné, il doit être informé de la possibilité de se faire assister lors de cet entretien d'un interprète et d'un médecin de son choix.

7. En l'espèce, il est constant que M. A...a été convoqué pour un examen médical devant le collège de médecins de l'OFII le 21 juin 2017 et que la convocation à cet entretien ne mentionnait pas la possibilité pour l'intéressé d'être assisté d'un interprète. Si le préfet fait valoir en appel que, lors de la remise de cette convocation, il a également été remis à M. A..." une notice explicative où il est explicitement indiqué que l'intéressé peut être accompagné d'un médecin de son choix et d'un interprète ", il n'établit pas, par les pièces qu'il produit, que ladite notice aurait effectivement été remise à M.A....

8. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou s'il a privé les intéressés d'une garantie.

9. Il est constant que M. A...n'a pas été assisté d'un interprète. Le fait de ne pas l'avoir informé de la faculté dont il disposait de se faire assister d'un interprète l'a privé de la possibilité d'en bénéficier et l'a ainsi, en l'espèce, privé d'une garantie. Par suite, ce vice de procédure est de nature à entacher d'illégalité la décision litigieuse.

10. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Bas-Rhin n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du 13 décembre 2017.

Sur les conclusions tendant à ce que la cour ordonne le sursis à l'exécution du jugement attaqué :

11. La cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête du préfet du Bas-Rhin tendant à l'annulation du jugement du 2 mai 2018, les conclusions de sa requête n° 18NC01644 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet. Il n'y a, ainsi, pas lieu d'y statuer.

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

12. M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Son avocat peut, par suite, se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Burkatzki, avocat de M.A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Burkatzki de la somme de 1 500 euros.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 18NC01644 du préfet du Bas-Rhin tendant à ce que la cour ordonne le sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 2 mai 2018 .

Article 2 : Les conclusions de la requête n° 18NC01645 du préfet du Bas-Rhin sont rejetées.

Article 3 : L'Etat versera à Me Burkatzki une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Burkatzki renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

5

N° 18NC01644, 18NC01645


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18NC01644
Date de la décision : 20/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: Mme Guénaëlle HAUDIER
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : BURKATZKI

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-11-20;18nc01644 ?
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