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20/11/2018 | FRANCE | N°16NC02754

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 20 novembre 2018, 16NC02754


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Foncia Solonim a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 1er février 2012 par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a rejeté son recours administratif du 12 décembre 2011 tendant au retrait de l'injonction qui lui a été adressée le 18 octobre 2011 par la directrice départementale de la protection des populations de Meurthe-et-Moselle sur le fondement des dispositions de l'article L. 141-1 du code de la consommation.

L'Union des syndicats de l'immobilier

(UNIS) et de la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM) sont intervenues da...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Foncia Solonim a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 1er février 2012 par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a rejeté son recours administratif du 12 décembre 2011 tendant au retrait de l'injonction qui lui a été adressée le 18 octobre 2011 par la directrice départementale de la protection des populations de Meurthe-et-Moselle sur le fondement des dispositions de l'article L. 141-1 du code de la consommation.

L'Union des syndicats de l'immobilier (UNIS) et de la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM) sont intervenues dans l'instance.

Par un jugement n° 1200754 du 3 février 2015, le tribunal administratif de Nancy a :

1°) admis l'intervention de l'UNIS et de la FNAIM (articles 1er et 2) ;

2°) décidé de surseoir à statuer sur la demande de la société Foncia Solonim jusqu'à ce que l'autorité judiciaire, devant être saisie dans un délai de deux mois par la requérante, se soit prononcée sur la question de savoir si la rémunération " des personnes qui se livrent ou prêtent leur concours à l'établissement d'un acte de location ", telle que fixée à l'article 5 de la loi du 6 juillet 1989 dans sa version initiale, doit être entendue comme recouvrant uniquement les frais de rédaction du bail ou comme s'appliquant à d'autres prestations liées à l'entremise ou à la négociation lors d'une mise en location d'un logement d'habitation et, dans l'affirmative, qu'il soit précisé quelles prestations relèvent de cette disposition (articles 3 et 4).

Par un arrêt n° 15NC00637, 15NC00638 du 16 juin 2016, la cour de Nancy a :

1°) donné acte à la FNAIM de son désistement ;

2°) admis l'intervention de l'UNIS ;

3°) annulé les articles 3 et 4 du jugement du tribunal administratif de Nancy du 3 février 2015 ;

4°) renvoyé les parties devant le tribunal administratif de Nancy pour qu'il soit statué sur la demande de la société Foncia Solonim.

Par un jugement n° 1200754 du 11 octobre 2016, le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande de la société Foncia Solonim.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2016, et un mémoire, enregistré le 8 octobre 2018, la société Foncia Solonim, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 11 octobre 2016 ;

2°) de mettre à la charge l'Etat la somme de 5 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle ne peut pas être regardée comme s'étant livrée à une pratique commerciale trompeuse au sens de l'article L. 121-1 du code de la consommation ;

- l'article L. 141-1 du code de la consommation ne permettait pas de constater une éventuelle violation de l'article 5 de la loi du 6 juillet 1989 ;

- l'administration a fait une inexacte application de l'article 5 de la loi du 6 juillet 1989.

Par un mémoire, enregistré le 29 mai 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués par la société requérante n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de la consommation ;

- la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Haudier,

- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour la société Foncia Solonim.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 141-1 du code de la consommation, dans sa rédaction alors en vigueur : " I.- Sont recherchés et constatés, dans les conditions fixées par les articles L. 450-1 à L. 450-4, L. 450-7, L. 450-8, L. 470-1 et L. 470-5 du code de commerce, les infractions ou manquements prévus aux dispositions suivantes du présent code : (...) 2° Les sections 1, 2, 3, 8, 9 et 12 du chapitre Ier du titre II du livre Ier ; (...) V. - Les agents habilités à constater les infractions ou manquements aux obligations mentionnées aux I, II et III peuvent, après une procédure contradictoire, enjoindre au professionnel, en lui impartissant un délai raisonnable, de se conformer à ces obligations, de cesser tout agissement illicite ou de supprimer toute clause illicite (...) ".

2. Le 27 septembre 2011, un agent de la direction départementale de la protection des populations (DDPP) de Meurthe-et-Moselle a effectué un contrôle au sein de l'agence de la société Foncia Solonim située 45 rue Henri Poincaré à Nancy et a relevé plusieurs manquements et infractions à l'encontre de la société. Par un courrier du 18 octobre 2011, le directeur départemental de la protection des populations (DDPP) de Meurthe-et-Moselle a, sur le fondement du V de l'article L. 141-1 du code de la consommation, fait injonction à la société de se conformer à la réglementation sur les pratiques commerciales en matière de location et de transactions immobilières et de remédier ainsi aux infractions constatées lors du contrôle du 27 septembre 2011. La société a formé un recours administratif contre cette injonction le 12 décembre 2011. Elle a indiqué à cette occasion dans son courrier qu'elle s'était conformée à l'ensemble des injonctions hormis celles relatives à l'application de l'article 5 de la loi du 6 juillet 1989 lui enjoignant " d'afficher le prix TTC des différentes prestations liées à la location sur la vitrine et à l'entrée de son établissement, en distinguant les frais de rédaction de bail (partagés par moitié entre le locataire et le bailleur) des autres frais (frais de recherche, de négociation, etc, à la charge exclusive du bailleur) et en indiquant à qui en incombe le paiement " et " de ne plus percevoir du locataire, lors de l'entrée dans les lieux d'un bien immobilier soumis aux dispositions de la loi 89-462 du 06 juillet 1989, d'autres sommes d'argent que celles prévues pour le dépôt de garantie et pour la rédaction de bail (les honoraires de cette dernière prestation devant être partagés par moitié entre le locataire et le propriétaire) ". La société a saisi le tribunal administratif de Nancy d'une demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de Meurthe-et-Moselle du 1er février 2012 rejetant son recours gracieux. Cette juridiction, qui a considéré qu'en demandant l'annulation de la décision préfectorale du 1er février 2012 rejetant son recours gracieux la société Foncia Solonim devait être regardée comme demandant également l'annulation de l'injonction du 18 octobre 2011, a, en dernier lieu et par un jugement du 11 octobre 2016, rejeté la demande de la société. Cette dernière relève appel de ce jugement.

3. Aux termes de l'article 5 de la loi susvisée du 6 juillet 1989 : " La rémunération des personnes qui se livrent ou prêtent leur concours à l'établissement d'un acte de location d'un immeuble appartenant à autrui (...) est partagée par moitié entre le bailleur et le locataire. ".

4. Il est constant que la société requérante mettait à la charge des locataires non seulement des frais afférents à la rédaction du bail, mais également des frais de recherche ou de négociation. Le directeur départemental de la protection des populations de Meurthe-et-Moselle et le préfet ont considéré que ces derniers frais ne pouvaient pas être regardés comme concourant à l'établissement d'un acte de location et n'entraient pas dans le champ des dispositions de l'article 5 de la loi du 6 juillet 1989. Toutefois, ainsi que cela ressort notamment des travaux parlementaires de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 qui a modifié les dispositions de cet article, les dispositions en litige ne peuvent être regardées comme opérant une distinction entre les différents frais entrant dans la rémunération des agents immobiliers. La précision relative à l'établissement de l'acte de location ne vise en réalité qu'à identifier clairement la personne qui est rémunérée. La société Foncia Solonim est dès lors fondée à soutenir que c'est à tort qu'elle a été mise en demeure de cesser de percevoir du locataire d'autres sommes d'argent que celles prévues pour le dépôt de garantie et pour la rédaction de bail et d'afficher des tarifs faisant état de cette pratique.

5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête que la société Foncia Solonim est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

6. Il y a lieu, enfin, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Foncia Solonim et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1200754 du tribunal administratif de Nancy du 11 octobre 2016 et les décisions du 18 octobre 2011 et du 1er février 2012, en tant qu'elles portent sur l'application de l'article 5 de la loi du 6 juillet 1989, sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à la société Foncia Solonim une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la requête sont rejetées pour le surplus.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Foncia Solonim et au ministre de l'économie et des finances.

4

N° 16NC02754


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC02754
Date de la décision : 20/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01-03 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. Réglementation des activités économiques. Activités soumises à réglementation. Réglementation de la protection et de l'information des consommateurs.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: Mme Guénaëlle HAUDIER
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : LPA-CGR

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-11-20;16nc02754 ?
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