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18/10/2018 | FRANCE | N°18NC00045

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 18 octobre 2018, 18NC00045


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Gilles Petitjean a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge totale en droits et pénalités des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie pour la période du 1er mai 2009 au 30 avril 2012.

Par un jugement n° 1500739 du 9 novembre 2017, le tribunal administratif de Besançon n'a fait que partiellement droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5

janvier 2018, la SARL Gilles Petitjean, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Gilles Petitjean a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge totale en droits et pénalités des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie pour la période du 1er mai 2009 au 30 avril 2012.

Par un jugement n° 1500739 du 9 novembre 2017, le tribunal administratif de Besançon n'a fait que partiellement droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 janvier 2018, la SARL Gilles Petitjean, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1500739 du tribunal administratif de Besançon du 9 novembre 2017 en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;

2°) de prononcer la décharge totale en droits et pénalités des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie pour la période du 1er mai 2009 au 30 avril 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration a méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ; en effet, elle ne l'a pas informée de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de ses fournisseurs français et sur lesquels elle s'est fondée pour établir les rappels litigieux ; par ailleurs, elle a refusé de lui communiquer ces documents ;

- elle était fondée à appliquer le régime de la marge ; elle n'a pas indûment ou en connaissance de cause appliqué à tort ce régime ;

- les pénalités laissées à sa charge ne sont pas justifiées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 avril 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales n'ont pas été méconnues ; en particulier, l'origine et la teneur des renseignements utilisés pour établir les rappels de taxe sur la valeur ajoutée figurent en pages 4 et 5 de la proposition de rectification du 20 décembre 2013 ; la demande de communication formulée par la société requérante ne portait pas explicitement sur les documents obtenus dans le cadre des vérifications de comptabilité de ses fournisseurs ;

- les autres moyens doivent être écartés.

Vu

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dhers,

-et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.

1. Considérant que la société à responsabilité limitée (SARL) Gilles Petitjean, qui exerce une activité d'achat et de revente de véhicules automobiles, a fait l'objet du 30 janvier au 10 décembre 2013 d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er mai 2009 au 30 avril 2012, effectuée dans le cadre de la procédure contradictoire, à l'issue de laquelle le vérificateur a estimé qu'elle avait appliqué à tort le régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge lors de la revente de 153 véhicules ; que l'administration a mis en recouvrement le 8 août 2014 des rappels de taxe sur la valeur ajoutée assortis de la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses prévues par le c de l'article 1729 du code général des impôts ; que la SARL Gilles Petitjean a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge de ces rappels et de cette majoration ; que, par un jugement rendu le 9 novembre 2017, le tribunal administratif de Besançon a substitué la majoration de 40 % pour manquement délibéré, prévue par le a de l'article 1729 du code général des impôts, à celle de 80 % qui a été appliquée aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée, et a rejeté le surplus de sa demande ; que la SARL Gilles Petitjean relève appel de ce jugement ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande " ; qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ; que cette obligation ne s'impose à l'administration que pour les renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsque le contribuable en fait la demande à l'administration, celle-ci est tenue, lorsqu'elle en dispose, de lui communiquer avant la mise en recouvrement des impositions les documents ou copies de documents contenant les renseignements qu'elle a obtenus auprès de tiers et qui lui sont opposés ;

3. Considérant qu'il est constant que pour établir les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui sont en litige, l'administration s'est fondée sur des renseignements obtenus dans le cadre des vérifications de comptabilité de trois fournisseurs de la SARL Gilles Petitjean, à savoir les sociétés Laurent Dumas, ICS et Procars Services ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification adressée à la SARL Gilles Petitjean le 20 décembre 2013, dont les mentions se bornent à indiquer que " tous les fournisseurs français ont été vérifiés. Les conclusions sont identiques pour chacun d'eux : ils font tous un usage erroné du régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge ", et de la réponse aux observations du contribuable datée du 15 avril 2014, que l'administration n'a pas informé la société requérante de la teneur de ces renseignements ; qu'elle n'a ainsi pas satisfait à l'obligation d'information prévue par les dispositions précitées de l'article L. 76 B et a dès lors entaché d'irrégularité la procédure d'imposition ; qu'en outre, la SARL Gilles Petitjean a, par un courrier du 13 février 2014, demandé à l'administration de lui communiquer les renseignements provenant de tiers, ce qui comprenait nécessairement ceux qui émanaient de ses fournisseurs ; que, contrairement à ce que soutient l'administration, bien que maladroitement rédigée, cette demande était explicite, comme l'attestent les termes de la lettre du 11 juillet 2014 par laquelle la vérificatrice avait, en réponse, communiqué une partie des documents fournis par les tiers concernés, en l'occurrence ceux transmis par la sous-préfecture de Montbéliard ; qu'en revanche, les documents obtenus des fournisseurs de la SARL Gilles Petitjean n'ont pas été communiqués à la société requérante, l'administration s'étant bornée à lui transmettre les éléments reçus dans le cadre de l'assistance administrative internationale et, ainsi qu'il vient d'être dit, ceux transmis par la sous-préfecture de Montbéliard ; que, dans ces conditions, l'administration a également méconnu l'obligation de communication prévue à l'article L. 76 B susmentionnée ; qu'il suit de là que la SARL Gilles Petitjean est fondée à soutenir que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont été établis à l'issue d'une procédure irrégulière et que, dès lors qu'elle a été privée des garanties prévues à l'article L. 76 B précité, elle doit être déchargée de la totalité des droits litigieux ainsi que des pénalités correspondantes restant à sa charge ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que la SARL Gilles Petitjean est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon, qui a uniquement substitué la majoration de 40 % pour manquement délibéré, prévue par le a de l'article 1729 du code général des impôts, à celle de 80 % qui a été appliquée aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er mai 2009 au 30 avril 2012, n'a pas fait droit à l'intégralité de ses conclusions aux fins de décharge des impositions litigieues et des pénalités correspondantes ;

Sur les conclusions présentées par la SARL Gilles Petitjean au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par SARL Gilles Petitjean et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1500739 du tribunal administratif de Besançon du 9 novembre 2017 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions à fin de décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée litigieux et le surplus des conclusions à fin de décharge des majorations présentées par la SARL Gilles Petitjean.

Article 2 : Il est accordé à la SARL Gilles Petitjean la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er mai 2009 au 30 avril 2012 ainsi que la décharge des majorations correspondantes restant à sa charge consécutivement au jugement du tribunal administratif de Besançon du 9 novembre 2017.

Article 3 : L'Etat versera à la SARL Gilles Petitjean une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Gilles Petitjean et au ministre de l'action et des comptes publics.

2

N° 18NC00045


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18NC00045
Date de la décision : 18/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-03-04-05 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. Taxe professionnelle. Questions relatives au plafonnement.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Stéphane DHERS
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : GUELOT - BARANEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-10-18;18nc00045 ?
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