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19/07/2018 | FRANCE | N°18NC00155

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 19 juillet 2018, 18NC00155


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2017 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1705103 du 20 décembre 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté litigieux et enjoint au préfet du Haut-Rhin de délivrer à M. B...une carte de séjour tem

poraire.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 janvier 2018, l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2017 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1705103 du 20 décembre 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté litigieux et enjoint au préfet du Haut-Rhin de délivrer à M. B...une carte de séjour temporaire.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 janvier 2018, le préfet du Haut-Rhin demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 20 décembre 2017 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) de rejeter la demande présentée par M.B....

Il soutient que :

- l'intéressé n'a jamais sollicité la délivrance d'un titre de séjour en application des articles L. 313-14 ou L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il n'était pas tenu d'examiner une demande à un autre titre que celui pour lequel l'intéressé a déposé sa demande ;

- c'est à tort que le tribunal a considéré qu'il justifiait de son insertion professionnelle, dès lors que durant ses neuf années d'études, il ne pouvait se prévaloir d'une activité professionnelle conséquente ;

- M. B...n'atteste par ailleurs d'aucune attache véritable depuis son arrivée sur le territoire français où il n'a aucune famille ; il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a résidé la majeure partie de sa vie et où vit sa soeur ; il est célibataire sans enfant et n'a jamais porté à la connaissance de l'administration sa relation avec un ressortissant français, avec lequel il ne justifie ni d'une vie commune ni d'une relation suivie ; l'apprentissage du français ne saurait être un élément suffisant de nature à entraîner l'admission au séjour à titre exceptionnel ;

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Didiot.

1. Considérant que M.B..., ressortissant péruvien né

le 10 janvier 1990, est entré en France régulièrement le 21 août 2008 sous couvert d'un visa de long séjour en qualité d'étudiant ; qu'il a par la suite bénéficié de titres de séjour portant la mention " étudiant " régulièrement renouvelés jusqu'au 6 septembre 2017 ; que le 4 avril 2017, l'intéressé a sollicité un changement de statut et demandé à bénéficier d'un titre de séjour portant la mention " salarié " ; que par un arrêté du 22 septembre 2017, le préfet du Haut-Rhin lui a refusé la délivrance de ce titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de destination ; que le préfet du Haut-Rhin relève appel du jugement du 20 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg, a annulé l'arrêté susmentionné et lui a enjoint de délivrer à M. B...une carte de séjour temporaire ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est loisible au préfet d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation sur le fondement d'une autre disposition de ce code ; qu'il peut, en outre, exercer le pouvoir discrétionnaire qui lui appartient, dès lors qu'aucune disposition expresse ne le lui interdit, de régulariser la situation d'un étranger en lui délivrant le titre qu'il demande ou un autre titre, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, dont il justifierait ; qu'ainsi, dans l'hypothèse où un étranger sollicite la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ", il est loisible au préfet, après avoir constaté que l'intéressé ne remplit pas les conditions posées par l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, soit de lui délivrer un titre sur le fondement d'une autre disposition du code, s'il remplit les conditions qu'elle prévoit, soit, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire de régularisation, de lui délivrer, compte tenu de l'ensemble de sa situation personnelle, le titre qu'il demande ou un autre titre ;

3. Considérant qu'en l'espèce, il ressort des termes de l'arrêté attaqué que le préfet a examiné si les éléments de la situation personnelle et familiale de M. B...permettaient de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'éventuelle méconnaissance de ces dispositions et stipulations peut ainsi être contestée devant le juge ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L.313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : la carte de séjour temporaire vie privée et familiale est délivrée de plein droit à " l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

5. Considérant qu'il est constant que la durée de présence régulière en France de M.B..., fût-ce sous couvert de titres de séjours portant la mention " étudiant ", s'établissait à neuf ans à la date de la décision attaquée ; que s'il est dépourvu d'attaches familiales sur le territoire français, il justifie cependant de la réalité et de l'intensité des attaches privées qu'il y a développées ; qu'il n'est pas contesté qu'il entretient depuis 2013 une relation amoureuse avec un ressortissant français ; que l'intéressé, titulaire en France d'une maîtrise en droit, économie, gestion mention droit privé délivrée par l'université de Strasbourg en 2015, démontre également la qualité de son insertion professionnelle, notamment par l'obtention de plusieurs contrats à durée déterminée auprès de la société Gamest dans son domaine de qualification, pour un emploi de juriste/gestionnaire sinistre, emploi que cette société, satisfaite de la bonne insertion de M. B...au sein de son équipe, se propose de reconduire sous la forme d'un contrat à durée indéterminée ; que dans les circonstances particulières de l'espèce, l'arrêté attaqué a porté atteinte au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue duquel il a été pris ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Haut-Rhin n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 22 septembre 2017 refusant à M. B...un titre de séjour avec obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de destination, et lui a enjoint de délivrer à l'intéressé une carte de séjour temporaire ;

D E C I D E :

Article 1er : Le recours présenté par le préfet du Haut-Rhin est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. B...et au ministre de l'intérieur.

Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

2

N° 18NC00155


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18NC00155
Date de la décision : 19/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. DHERS
Rapporteur ?: Mme Sandra DIDIOT
Rapporteur public ?: Mme PETON

Origine de la décision
Date de l'import : 31/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-07-19;18nc00155 ?
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