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19/07/2018 | FRANCE | N°17NC00266

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 19 juillet 2018, 17NC00266


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1501398 du 6 décembre 2016, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement le 6 février 2017 et le 18 avril 2018, M.A..., représenté par MeC..., deman

de à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 6 décembre 2016 ;

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1501398 du 6 décembre 2016, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement le 6 février 2017 et le 18 avril 2018, M.A..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 6 décembre 2016 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a fait application d'un régime de preuve objective ; la charge de la preuve incombe à l'administration dès lors que le contribuable n'a pas accepté les rehaussements ;

- l'administration n'apporte pas la preuve qu'il a effectué une activité en France, qui aurait excédé 183 jours au sens de l'article 14-2 de la convention fiscale franco-luxembourgeoise.

Par un mémoire enregistré le 11 mai 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention fiscale franco-luxembourgeoise du 1er avril 1958 modifiée ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Didiot,

- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.

1. Considérant que M. A...exerce les fonctions d'architecte libéral, de maître d'oeuvre et de marchand de biens pour des sociétés de droit français et luxembourgeois ; qu'il est notamment salarié de la SARL Simpro Cos établie à Bettembourg (Luxembourg) et a porté les rémunérations brutes versées par cette dernière au cours des années 2009 et 2010 (29 802 euros et 30 696 euros) dans sa déclaration de revenus complémentaires n°2047 pour le calcul de son impôt sur le revenu français selon la règle du " taux effectif ", conformément à l'article 14 de la convention franco-luxembourgeoise ; que par proposition de rectification du 6 juin 2012, établie dans le cadre de la procédure contradictoire, l'administration lui a notifié des rappels d'impôt sur le revenu au titre des années 2009 et 2010, au motif qu'une partie de ces salaires aurait dû être imposée en France, le service ayant estimé que le contribuable avait exercé ses fonctions en France pendant plus de 183 jours ; que M. A...relève appel du jugement du 6 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que dans l'hypothèse où les premiers juges auraient commis, comme le soutient M.A..., une erreur de droit dans l'application du régime de preuve susceptible de remettre en cause, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, les motifs qu'ils ont retenus pour rejeter la demande de décharge des impositions supplémentaires litigieuses, les erreurs alléguées qui se rapportent au bien-fondé du jugement attaqué resteraient, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité de ce jugement ;

Sur les conclusions à fin de décharge :

En ce qui concerne la domiciliation fiscale de M.A... :

3. Considérant que si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l'imposition ; que, par suite, il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification ; qu'il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer, en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office, si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale ; qu'il en est ainsi à l'égard de toute convention ayant cet objet alors même qu'elle définirait directement les critères de la résidence fiscale à prendre en compte pour les besoins de son application ;

4. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française " ; qu'aux termes de l'article 4 B de ce code : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques (...) " ; que, pour l'application des dispositions précitées du a du 1 de l'article 4 B, le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles, et que le lieu du séjour principal du contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l'hypothèse où celui-ci ne dispose pas de foyer ;

5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 2 de la convention conclue le 1er avril 1958 entre la France et le Luxembourg : " (...) 4. Le domicile fiscal des personnes physiques est au lieu de la résidence normale entendue dans le sens de foyer permanent d'habitation ou, à défaut, au lieu du séjour principal " ;

6. Considérant qu'il n'est pas contesté que M. A...est fiscalement domicilié..., dans la commune de ...), au sens des dispositions et stipulations précitées ; qu'il a ainsi valablement été imposé en France à raison de ses revenus ;

En ce qui concerne l'imposition en France des revenus de source luxembourgeoise litigieux :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 79 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu. " ; qu'aux termes de l'article 14 de la convention franco-luxembourgeoise susvisée : " 1. (...) les traitements, salaires et autres rémunérations analogues ne sont imposables que dans l'Etat sur le territoire duquel s'exerce l'activité personnelle source de ces revenus. 2. Pour l'application du paragraphe précédent, n'est pas considéré comme l'exercice d'une activité personnelle dans l'un des deux Etats le fait, pour un salarié d'un établissement situé dans l'autre Etat, d'accomplir sur le territoire du premier Etat une mission temporaire ne comportant qu'un séjour inférieur à 183 jours, à la condition toutefois que sa rémunération continue à être supportée et payée par ledit établissement. Dans le cas où la mission excède une durée totale de 183 jours, l'impôt est applicable dans l'Etat sur le territoire duquel la mission est accomplie et porte sur l'ensemble des rémunérations perçues par le salarié du chef de l'activité qu'il a exercée sur ledit territoire depuis le début de sa mission (...) " ;

8. Considérant qu'il appartient au juge de l'impôt d'apprécier, au vu du dossier qui lui est soumis par l'administration et le contribuable, si les dispositions de l'article 14 de la convention fiscale franco-luxembourgeoise, susceptible de faire échec à l'application des dispositions précitées du code général des impôts, sont applicables en l'espèce ;

9. Considérant que si M. A...soutient que l'activité de " gérant technique " déployée pour le compte de la SARL Simpro Cos s'exerce principalement au siège de cette société à Bettemcourt (Luxembourg), il résulte de l'instruction et n'est pas contesté que cette dernière n'y bénéficie que d'un bureau situé dans la maison d'habitation de l'un de ses associés, et ne détient à son actif aucune immobilisation relative à du matériel de bureau ou des logiciels techniques ; que la société luxembourgeoise intervient en qualité de sous-traitant pour la société de droit français SARL Euro Building, qui réalise des chantiers de construction immobilière, lesquels, sur la période considérée, se trouvaient tous en France, non loin de la commune de Jarny (Meurthe-et-Moselle) où se trouve le siège d'une autre société gérée par le contribuable, la SARL Bureau d'EtudesA..., laquelle dispose en revanche de l'intégralité des équipements nécessaires à la réalisation de missions de maîtrise d'oeuvre effectuées par l'intéressé, selon ses dires, depuis le siège de la SARL Simpro Cos ; qu'alors que la nature de l'activité de construction immobilière impose nécessairement à l'architecte et maître d'oeuvre de se déplacer sur les chantiers de construction, M. A...ne produit aucun élément justifiant de ses déplacements professionnels au Luxembourg pour se rendre au siège de la SARL Simpro Cos, distante de 144 kilomètres de son cabinet situé à Jarny ; qu'il suit de là que c'est à bon droit, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, que l'administration a considéré que l'activité déployée par M. A...devait être regardée comme ayant été exercée plus de 183 jours en France, de sorte que les rémunérations perçues à raison de celle-ci devaient être taxées en France ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande de décharge ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie tenue aux dépens ou la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.

2

N° 17NC00266


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC00266
Date de la décision : 19/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Textes fiscaux - Conventions internationales.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Lieu d'imposition.


Composition du Tribunal
Président : M. DHERS
Rapporteur ?: Mme Sandra DIDIOT
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : SCP RICHARD et MERTZ

Origine de la décision
Date de l'import : 31/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-07-19;17nc00266 ?
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