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19/07/2018 | FRANCE | N°17NC00235-17NC00236

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 19 juillet 2018, 17NC00235-17NC00236


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C...B...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des majorations pour manquement délibéré appliquées, au titre de l'exercice 2010, d'une part au rappel d'imposition sur le revenu relatif à la plus-value placée en report d'imposition, d'autre part au rappel de prélèvements sociaux relatifs à la plus-value bénéficiant d'un abattement pour durée de détention ;

Par un jugement n° 1401296,1402148 du 7 décembre 2016, le tribunal administratif de Strasb

ourg a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I.) Par une requête, enre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C...B...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des majorations pour manquement délibéré appliquées, au titre de l'exercice 2010, d'une part au rappel d'imposition sur le revenu relatif à la plus-value placée en report d'imposition, d'autre part au rappel de prélèvements sociaux relatifs à la plus-value bénéficiant d'un abattement pour durée de détention ;

Par un jugement n° 1401296,1402148 du 7 décembre 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I.) Par une requête, enregistrée le 3 février 2017 sous le n°17NC00235, MmeB..., représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 7 décembre 2016 ;

2°) de prononcer la décharge des majorations pour manquement délibéré appliquées, au titre de l'exercice 2010, d'une part au rappel d'imposition sur le revenu relatif à la plus-value placée en report d'imposition, d'autre part au rappel de prélèvements sociaux relatifs à la plus-value bénéficiant d'un abattement pour durée de détention ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S'agissant de la plus-value en report d'imposition :

- l'expiration du report a été effectivement déclarée au moyen de la déclaration n°2074 I, mais a simplement été reportée par erreur dans le cadre 13 de la déclaration 2074 " gains d'apport de créances en report d'imposition " au lieu d'être reportée dans le cadre 10 de la ligne 1010 de la même déclaration 2074 ; le caractère délibéré du manquement n'est ainsi pas établi ;

S'agissant de la plus-value bénéficiant d'un abattement pour durée de détention taxable aux prélèvements sociaux :

- la seule circonstance que la plus-value correspondante au titre des revenus de l'année précédente ait été correctement déclarée ne suffit pas à considérer qu'en 2010, ils ont volontairement omis de renseigner la case 3VT de la déclaration 2042 ; en effet les formulaires déclaratifs ont été modifiés entre l'année 2009 et l'année 2010 et parmi les modifications figure notamment la création d'une nouvelle obligation déclarative matérialisée par ladite case.

Par un mémoire enregistré le 26 avril 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme B...ne sont pas fondés.

II.) Par une requête, enregistrée le 3 février 2017 sous le n°17NC00236, MmeB..., représentée par MeD..., demande à la cour, pour les mêmes motifs que ceux exposés sous le n°17NC00235 :

1°) d'annuler le jugement susvisé du tribunal administratif de Strasbourg du 7 décembre 2016 ;

2°) de prononcer la décharge des majorations pour manquement délibéré appliquées, au titre de l'exercice 2010, d'une part au rappel d'imposition sur le revenu relatif à la plus-value placée en report d'imposition, d'autre part au rappel de prélèvements sociaux relatifs à la plus-value bénéficiant d'un abattement pour durée de détention ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire enregistré le 26 avril 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme B...ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Didiot,

- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.

1. Considérant que M. B...a apporté en 1997 à la société Thermo Est Holding 9 300 actions qu'il détenait dans le capital de la société Thermo Est ; que la plus-value réalisée lors de cet apport, estimée à 759 024 euros, a été placée sous le régime du report d'imposition ; que M. B...a cédé le 19 septembre 2010 les actions qu'il détenait dans le capital de la société Thermo Est Holding depuis l'apport réalisé treize ans plus tôt, ce qui a rendu la plus-value de 759 024 euros imposable ; qu'à l'issue d'un contrôle sur pièces ayant mis en évidence des irrégularités déclaratives, l'administration a, par proposition de rectification du 30 novembre 2012, établie selon la procédure contradictoire, imposé cette plus-value à l'impôt sur le revenu, au taux de 18 %, et aux prélèvements sociaux au titre de l'année 2010 ; que ces rappels ont été assortis de la majoration de 40 % prévue par le a de l'article 1729 du code général des impôts ; que M. B...a cédé les 1er avril 2010 et 25 juin 2010 des actions qu'il détenait dans les sociétés Thermo Est et Thermibel ; que les plus-values réalisées lors des trois cessions de titres effectuées en 2010, qui s'élevaient au montant total de 4 714 900 euros, ont partiellement été exonérées de prélèvements sociaux par M. et Mme B...qui se sont placés sous le régime d'abattement applicable aux plus-values réalisées par les chefs d'entreprises faisant valoir concomitamment leurs droits à la retraite, prévu aux articles 150-0 D bis et 150-0 D ter du code général des impôts ; que, consécutivement au même contrôle sur pièces, l'administration a procédé à un rappel de prélèvements sociaux afférentes à la base de 4 479 270 euros au titre de 2010 ; que ce rappel a également été assorti de la majoration de 40 % ; que M. et Mme B...ont contesté les seules majorations susmentionnées ; que M. B...est depuis décédé ; que Mme B...relève appel du jugement du 7 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à la décharge desdites majorations ;

Sur la jonction :

2. Considérant que les requêtes n° 17NC00235 et 17NC00236 présentées pour Mme B... ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a donc lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur les conclusions à fin de décharge :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l 'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration " ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la pénalité pour mauvaise foi a pour seul objet de sanctionner la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives ; que, pour établir cette mauvaise foi, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt ; que, pour établir le caractère intentionnel du manquement du contribuable à son obligation déclarative, l'administration doit se placer au moment de la déclaration ou de la présentation de l'acte comportant l'indication des éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ;

En ce qui concerne la majoration pour manquement délibéré appliquée au rappel relatif à la plus-value placée en report d'imposition :

5. Considérant que M. et Mme B...ont rempli le formulaire n°2074-I relatif à la déclaration des plus-values en report d'imposition en faisant apparaître la plus-value litigieuse en " plus-values imposables immédiatement ", mais n'ont pas reporté cette somme dans les éléments imposables de leur déclaration d'impôt sur le revenu au titre de l'exercice 2010, l'inscrivant au contraire, à tort, dans les plus values en report d'imposition ;

6. Considérant que si la requérante fait valoir qu'il n'y a pas réellement eu d'omission de déclaration, mais une simple erreur matérielle de report, il résulte de l'instruction que les modalités d'inscription du montant de plus-value imposable étaient précisées clairement dans le formulaire n°2074-I précité, que M. et Mme B...avaient été alertés du caractère imposable de la plus-value en cause par échanges de courriers avec l'administration fiscale à l'occasion d'un précédent contrôle en 2008 ; qu'eu égard par ailleurs à l'importance de la somme en cause, et alors que les intéressés n'ont pas déposé de déclaration rectificative, le caractère intentionnel de la dissimulation de revenus imposables doit être regardé comme établi ; que c'est par suite à bon droit que l'administration leur a infligé la majoration de 40% contestée ;

En ce qui concerne la majoration pour manquement délibéré appliquée au rappel relatif à la plus-value bénéficiant d'un abattement pour durée de détention :

7. Considérant que si les plus-values de cessions de titres réalisées par des dirigeants de petites et moyennes entreprises en vue de leur départ à la retraite peuvent bénéficier d'un abattement pour durée de détention, ce dernier ne s'applique que pour le calcul de l'impôt sur le revenu, les prélèvements sociaux restant toujours dus sur la totalité du gain net réalisé par le cédant ; qu'en l'espèce, il résulte de l'instruction que les époux B...ont omis de déclarer la plus-value de cession de titres réalisée en 2010 à ce titre dans la base taxable aux prélèvements sociaux ;

8. Considérant que si Mme B...se prévaut d'une modification des formulaires de déclarations de revenus en 2010, et la création d'une nouvelle obligation déclarative de la base imposable aux prélèvement sociaux matérialisée par la case 3VT dans la déclaration de revenus modèle 2042, il est constant que tant les formulaires spécifiques de déclaration des plus-values que la notice d'accompagnement de la déclaration type n°2042 comportaient l'ensemble des indications quant aux données à compléter ; que les époux B...n'ont initialement déclaré aucune somme dans la case 3VT, puis ont envoyé un courrier rectificatif à l'administration fiscale le 1er juillet 2011 déclarant dans la base taxable aux prélèvement sociaux le seul montant de plus-value taxable à l'impôt sur le revenu, soit 235 290 euros, et non la totalité de ladite plus-value représentant une somme de 4 479 270 euros : que la contribuable, qui avait déjà déclaré en 2009 une plus-value bénéficiant d'un abattement pour durée de détention, laquelle avait été soumise à contributions sociales, ne peut sérieusement soutenir avoir ignoré le caractère imposable de la totalité de la somme ; qu'eu égard en outre à l'ampleur de la somme en cause, la négligence alléguée des époux B...doit être regardée comme présentant en l'espèce un caractère délibéré ; que c'est dès lors également à bon droit que l'administration a fait application de la pénalité correspondante ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie tenue aux dépens ou la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de Mme B...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.

2

N° 17NC00235,17NC00236


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC00235-17NC00236
Date de la décision : 19/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-02-01-03-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Évaluation de l'actif. Plus et moins-values de cession.


Composition du Tribunal
Président : M. DHERS
Rapporteur ?: Mme Sandra DIDIOT
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : SCP RICHARD et MERTZ

Origine de la décision
Date de l'import : 31/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-07-19;17nc00235.17nc00236 ?
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